Depuis quelques semaines, une grogne monte sur YouTube. Des vidéastes ne sont pas contents : leurs chiffres d’audience sont devenus plus aléatoires, les vues sont moins au rendez-vous et leurs abonné•es ne voient plus forcément leurs vidéos apparaître dans leur fil d’actu.
Du moment où certains créateurs ont dénoncé le problème, à celui où certains ont carrément envisagé de quitter le réseau de partage de vidéos, en passant par la réponse de YouTube : on vous raconte tout !
PewDiePie, le plus gros youtubeur de la planète, menace de fermer sa chaîne
C’était au début du mois de décembre. Le youtubeur suédois PewDiePie annonce qu’il fermera sa chaîne après avoir atteint le seuil des 50 millions d’abonné•es — un record.
PewDiePie s’est d’abord distingué avec sa chaîne sur le jeu vidéo. Au fil du temps, il s’est imposé comme un personnage à part entière, plutôt caractériel et excentrique, qui n’a pas sa langue dans sa poche.
Ai-je été surprise par son idée de fermer sa chaîne YouTube ? À peine. La raison en revanche, était plus qu’intéressante : PewDiePie était furieux contre le nouvel algorithme de YouTube.
Si vous voulez connaître le fin de mot de l’histoire : le youtubeur n’a pas supprimé sa chaîne et s’est contenté de nous rire au nez dans une vidéo qui m’a fait marrer et pleurer en même temps.
Mais la question, elle, est bien là : que se passe-t-il avec l’algorithme de YouTube ? Pourquoi de nombreux vidéastes, tous niveaux confondus, constatent une baisse inexplicable du nombre de leurs abonné•es ?
Fannyfique, youtubeuse de talent et aussi fière représentante du pôle vidéo de madmoiZelle, s’interroge.
« Ce que je ne comprends pas c’est qu’il y a un énorme décalage entre le nombre d’abonné•es d’une chaîne et le nombre de vues sur une vidéo. Prenons un vidéaste qui aura 20 000 abonné•es, il se retrouvera disons avec 5 000 vues sur une vidéo sans raison.
C’est normal qu’il y ait un décalage, mais aussi énorme… c’est quand même bizarre. »
Et pour cause : les vidéos n’apparaissent plus systématiquement dans le fil d’actu des abonné•es. Les abonnements sur la page d’accueil ont laissé place à un onglet intitulé « tendance », qui met en avant les contenus les plus populaires, plutôt que les abonnements.
Du coup, on n’est plus systématiquement notifié•e des nouvelles publications de chaînes auxquelles on est abonné•e, et on ne pense plus forcément à aller les voir.
Sur madmoiZelle, le constat est sans appel : le mois dernier, on a perdu une centaine d’abonné•es, alors qu’on ne fait normalement que gagner des abonné•es d’un mois sur l’autre. À chaque nouvelle vidéo publiée, on perd presque une centaine de personnes… qui reviennent un peu plus tard lorsqu’ils réalisent qu’elles ont été désabonnées.
Moi-même, à mon petit niveau avec mes 700 abonné•es, je vois le compteur descendre de manière vertigineuse ces derniers mois. C’est d’autant plus pénible que les gens s’abonnent à ma chaîne par curiosité, mais comme je ne suis pas connue ils ne se souviendront pas de moi si je disparais subitement de leurs abonnements.
Du coup, adieu les abonné•es !
YouTube répond aux critiques
Que pense YouTube de tout ça ? Il est vrai que pour savoir ce qu’il se passe, le mieux est encore de demander aux principaux intéressés.
YouTube a une chaîne support, permettant de dispenser des conseils aux vidéastes. Et pour le coup, ils ont fait quelque chose bien loin de leurs habitudes : ils ont publié une vidéo d’explication, pour couper court à toute discussion.
Dans cette vidéo, YouTube assure donc que les utilisateurs et utilisatrices n’ont donc pas été désabonné•es des chaînes auxquelles ils et elles s’étaient abonné•es.
https://www.youtube.com/watch?v=zRAFWF3LJnw
Sauf que tout n’est pas si simple ! Ces réponses ne convainquent pas les vidéastes, qui s’interrogent notamment sur les changements dans l’onglet tendances, accessible depuis la page d’accueil. Et qui semble avoir changé sa sélection.
On dénote entre autres une présence bizarrement importante de chaînes de télé ou de radio, qui sont généralement loin d’être les stars de YouTube. Et de manière générale, quand il s’agit de créateurs individuels, ce sont principalement des mecs, bien entendu.
Capture d’écran de l’onglet tendances
Eh oui, parce que ce changement tend à disqualifier encore un peu plus les femmes, déjà peu présentes sur YouTube. On a beau créer des réseaux pour les mettre en avant, elles subissent toujours un sexisme latent que les nouvelles règles de YouTube n’arrangent pas.
C’est ce que pointe Marie Camier, présidente du réseau les Internettes :
« C’est horrible à dire mais je pense que les femmes vidéastes ne ressentent pas le problème de la même façon, parce que généralement elles ne sont pas sur les mêmes quantités d’abonné•es…
D’expérience, elles ont aussi tendance à minimiser les phénomènes, elles s’en plaignent assez rarement et quand elles le font, elles s’excusent ! »
Marion Seclin, par exemple, a toujours droit à un torrent de pouces rouges sous ses vidéos. Ce qui la disqualifie d’office côté référencement, comme on a pu le constater par exemple avec la dernière vidéo des Scienceuses consacrée à Ada Lovelace.
Le débat s’oriente sur la qualité du contenu des chaînes
Mais ce problème de référencement pose une autre question.
Jusqu’à présent, le moyen le plus rapide de faire grimper le compteur était de collectionner les likes, les commentaires et les pouces bleus. Un sport dont étaient friand•es certain•es vidéastes, comme l’explique Squeezie.
Ha oui tiens ! Si, pour avoir du succès sur YouTube, on faisait des vidéos de qualité ?
En essayant à tout prix d’appâter de chaland, n’aurait-on pas oublié ce que c’était de prendre le temps de plancher sur un script, de soigner la mise en scène, le montage ou encore le concept ?
C’est en tout cas la question que s’est posée Adèle, en toute sincérité.
En tant qu’internaute si on aime un contenu, le mieux est encore d’aimer la vidéo pour améliorer son référencement. Parce qu’un comportement positif, ça paye toujours !
Au sujet des vidéos qui n’apparaissent plus dans votre fil d’actualité : vous pouvez cliquer sur la cloche à côté du nombre d’abonné•es de la chaîne en question, pour être notifié•es lorsqu’une nouvelle vidéo sort.
Juste en bas à droite !
Quitter YouTube ?
Le problème c’est que faire du contenu de qualité ne garantit pas forcément que nos vidéos vont marcher. Et en plus, ce n’est pas nécessairement le but premier.
Laurine, de la chaîne Broadcasting Bino, explique que ce nouvel algorithme lui pose plus de soucis vis-à-vis de ses abonné•es :
« En fait, ça ne me dérange pas tant que ça de perdre des abonné•es, c’est plus un problème de visibilité.
Les gens qui me suivent ne sont pas prévenus des nouvelles vidéos que je publie et viennent ensuite me poser des questions sur Twitter. Pourtant ce ne sont pas des robots ni des comptes fantômes ! »
Quand je lui demande si la solution serait encore de quitter YouTube, elle rit :
« Je crois qu’on y pense tous, mais on se dit que c’est impossible.
Même s’il y avait une autre plateforme qui pouvait faire concurrence à YouTube, on publierait dessus mais on continuerait à exister sur YouTube parce que c’est hyper ergonomique, hyper optimisé… Il n’existe pas d’alternative équivalente. »
Difficile, mais pas impossible. Karim Debbache a par exemple dévoilé sa nouvelle émission, Chroma, sur Dailymotion.
Dailymotion, ce site français de partage de vidéo, serait une bonne alternative, non ? En fait, pas tellement : les chiffres de cette émission, pourtant de grande qualité, peinent à grimper. Selon Laurine, ils seraient bien plus conséquents si les vidéos avaient été publiées sur YouTube.
Pour l’instant, l’équipe de maintenance du site soutient que les perturbations constatées sur les chaînes ne sont pas liées à un bug côté YouTube.
Dans le même temps, un sondage d’opinion a été lancé parmi les vidéastes par YouTube, pour connaître leur niveau de satisfaction vis-à-vis de la plateforme.
Affaire à suivre ?
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