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Santé

Voici comment réagir quand vous pensez avoir été droguée à votre insu ?

Partout en France, de plus en plus de personnes dénoncent des intoxications à leur insu, via une substance mise dans leur verre ou une piqûre. Mais alors, comment identifier les effets d’une soumission chimique et bien réagir pour soi-même mais aussi avec des proches potentiellement infectés ?

Comment réagir quand on pense avoir été droguée à son insu ? Tranquillisants, somnifères et plus rarement le GHBCes substances, utilisées par les agresseurs, peuvent déclencher confusion, trou noir, et autres symptômes chez ceux qui les ingèrent à leur insu.

Le phénomène de la soumission chimique, que nous avons décrypté et analysé avec des spécialistes et qui est loin d’être récent, reste difficile à quantifier avec précision car les démarches à suivre médico-judicaires, sont peu connues, et extrêmement éprouvantes.

Avec l’aide de Samira Djezzar, médecin praticienne hospitalière spécialisée en toxicologie, membre du Comité scientifique permanent « psychotropes, stupéfiants et addictions » de l’ANSM, Madmoizelle vous détaille la procédure à suivre si vous pensez avoir été victime ou témoin de soumission chimique.

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© Mauricio Mascaro – Pexels

Quelle est la procédure à suivre si on pense avoir été soumise chimiquement ?

Sur le moment, vous êtes incohérente, désorientée, désinhibée… Vous présentez des signes d’amnésie antérograde ou encore des troubles de la conscience. Si vous vous en rendez compte rapidement, alertez les gens autour de vous, à commencer par les responsables du bar ou de la boite de nuit où vous êtes, et surtout, ne restez pas seule.

Mais peut-être que vous vous en apercevrez seulement quelques heures plus tard… À votre réveil par exemple, la sensation que quelque chose ne va pas peut se mélanger à une absence totale ou partielle de souvenirs… Vous le craigniez, vous avez peut-être été droguée à votre insu quelques heures plus tôt. Encore une fois, contactez un proche afin de ne pas rester seule.

Bien entendu, si vous vous sentez mal, ne réfléchissez pas et foncez le plus rapidement possible aux urgences les plus proches de chez vous. Mais attention, sachez qu’actuellement en France, hormis le CHRU de Nancy qui propose un protocole accéléré, comme l’a relayé France Info, le 16 mai dernier, l’hôpital n’est pas, aux yeux de la loi, la première destination à prendre pour faire reconnaitre que vous avez été soumise chimiquement.

Étape 1 : le dépôt de plainte

Actuellement en France, le processus pour savoir si on a été droguée à son insu malmène les victimes. Alors que souvent, le traumatisme est omniprésent, et la parole difficile à libérer, on demande aux potentielles victimes de commencer par déposer plainte avant même d’être examinée par un médecin, comme le confirme Samira Djezzar :

« Il faut commencer par déposer plainte, et non une main courante. Et c’est grâce à cette plainte que la police judiciaire vous orientera vers les urgences médico-judiciaires qui réaliseront alors les analyses toxicologiques qui pourront être réquisitionnés par la justice. »

Sachez que la soumission chimique est un délit reconnu par la loi française d’après l’article 222-30-1 du Code pénal :

« Le fait d’administrer à une personne, à son insu, une substance de nature à altérer son discernement ou le contrôle de ses actes afin de commettre à son égard un viol ou une agression sexuelle est puni de cinq ans d’emprisonnement et de 75.000€ d’amende. Lorsque les faits sont commis sur un mineur de quinze ans ou une personne particulièrement vulnérable, les peines sont portées à sept ans d’emprisonnement et à 100 000€ d’amende. »

Selon les articles 222-24 et 222-28 du Code pénal, les agressions sexuelles et les viols sont considérés comme un crime, et la soumission chimique comme étant une circonstance aggravante. Un viol, après soumission chimique, est puni de 20 ans de réclusion criminelle et une agression sexuelle de 7 ans d’emprisonnement et de 100 000 euros d’amende.

Étape 2 : la prise en charge médicale

Si vous ne souhaitez pas déposer plainte, la doctoresse Samira Djezzar conseille de consulter dans tous les cas un médecin généraliste. Ce dernier, pourra vous prescrire des prélèvements toxicologiques, le plus rapidement possible, avant que la substance ne disparaisse de votre organisme. Mais sachez, que ces prélèvements ne pourront pas être réquisitionnés par la justice si vous décidez, dans un second temps, de déposer plainte contre votre agresseur.

« Pour que des prélèvements soient recevables par la justice, il faut qu’ils soient réalisés sous scellée judiciaire et effectués au minimum deux fois, en prévision des contre-expertises judiciaires. »

Même si vous ne souhaitez pas déposer plainte, la consultation médicale reste primordiale. En effet, en cas de suspicion d’agression sexuelle, vous avez jusqu’à 48 heures pour voir un médecin qui pourra vous prescrire un traitement post exposition contre le VIH, ainsi qu’un moyen de contraception d’urgence.

Aussi, il est important que les victimes soient prises en charge psychologiquement pour surmonter le traumatisme entraîné par un tel évènement. Vous pouvez alors vous tourner vers des psychologues ou même des psychiatres.

Étape 3 : les dépistages

Il existe trois dépistages différents pour prouver que vous avez été victime de soumission chimique. Sachez que si ces prélèvements sont réalisés dans le cadre d’une procédure judiciaire – vous avez donc déposé plainte en amont – ou encore s’ils ont été prescrits par votre médecin traitant, ils vous seront remboursés par la sécurité sociale.

Si vous avez été droguée à votre insu il y a moins de six heures par du GHB, vous pouvez réaliser un dépistage sanguin. Au delà de ce délai, il y a peu de chance que la substance étrangère soit décelée dans votre organisme.

Vous pouvez également réaliser un dépistage urinaire dans un laboratoire. Encore une fois, si vous avez soumise chimiquement il y a plus de 12 heures au GHB, il y a peu de chance que ce prélèvement soit concluant. En ce qui concerne les autres substances, comme les benzodiazépines, leurs traces disparaissent des urines et du sang, après 2 à 3 jours.

Passés ces délais, il ne vous reste plus qu’un seul moyen pour prouver la soumission chimique : l’analyse capillaire. Ce prélèvement doit être effectué 3 à 5 semaines après les faits afin de suivre par segmentation les variations de concentrations des produits. Quatre mèches sont alors prélevées : trois pour l’analyse et une pour la contre-expertise.

Suite à ces prélèvements, vous obtiendrez le dosage exact de la substance qui vous a infecté ainsi qu’une datation plus ou moins précise du moment où cela a eu lieu. Aussi, en cas d’agression sexuelle, des prélèvements ADN peuvent être réalisés.

Comment réagir si on a été témoin d’une scène de soumission chimique ?

Si vous êtes témoin d’une scène de soumission chimique, il est primordial d’intervenir, comme nous le rappelle Samira Djezzar :

« Tout témoin qui ne réagit par face à une potentielle victime de soumission chimique, c’est non assistance à personne en danger, un acte répréhensible par la loi, pouvant entraîner jusqu’à 5 ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende. »

Si vous avez été témoin d’une soumission chimique sur une victime, il est important que vous soyez là dans un premier temps pour la rassurer, l’informer sur les démarches possibles et l’accompagner si elle souhaite les entreprendre. Le plus important est de rester bienveillant, à l’écoute de la victime, et tenter de la mettre en confiance pour lui permettre de conscientiser la violence qu’elle a subi et surtout, qu’elle réalise, que ce n’est pas sa faute… qu’elle a été seulement la proie d’un prédateur !

N’oubliez pas qu’avant toute chose, accompagner une victime, c’est aussi respecter des choix, parfois contraires à ceux que l’on ferait pour soi. Si elle ne désire pas déposer plainte, c’est son droit. Le plus important est qu’elle soit en sécurité et qu’elle soit bien accompagnée.

Les alternatives pour protéger son verre

Bonne nouvelle : de plus en plus d’alternatives existent désormais pour protéger son verre dans les milieux festifs. Des dispositifs utiles mais qui laissent perplexe… Nous devons porter nous-même la responsabilité de notre propre sécurité pour le plus grand malheur de notre propre portefeuille ! Quelle triste époque : encore une fois protéger son verre s’ajoute à la liste interminable des stratégies que nous devons instaurer pour éviter d’être droguée à notre insu…

En 2019, deux New-Yorkaises ont inventé My cup Condom, un film de latex, à enfiler directement sur votre verre et qui en épouse parfaitement les contours.

Le groupe DriveCase, spécialisé dans la vente d’accessoires de mobilité et de prévention routière depuis plus de 8 ans vient également de lancer, un couvercle anti-intrusion et anti-drogue, à usage unique, 100% recyclable, et fabriqué en France.

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© DriveCase

Si vous n’en trouvez pas ou que vous êtes allergique au latex, vous pouvez essayer undercover Colors, un vernis à ongle. Une fois trempé dans votre verre, ce dernier peut changer de couleur en présence d’une substance chimique.

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© Undercover Colors

La doctoresse Samira Djezzar a quelques derniers conseils très simples mais qui permettent de limiter les risques : éviter de sortir seule si vous ne connaissez pas la personne que vous devez voir, prévoir un « Sam » – un des membres du groupe qui ne boit pas et ne prend aucune autres substances – lors de vos soirées, éviter les mélanges alcool/cannabis, ne pas laisser son verre sans surveillance et surtout refuser tous les verres de la part d’inconnus… Enfin, on vous le redit, si cela vous arrive, libérez-vous de toute culpabilité et essayer d’en parler.

Si vous pensez avoir été droguée à votre insu, vous pouvez contacter directement le centre d’addiction-vigilance de Paris, qui répondra à toutes vos interrogations sur tous les aspects de votre agression. Vous pouvez les contacter par mail, ceip[email protected] , ou par téléphone au +33 (1) 40 05 42 70.

Quelques ressources en cas de violences sexuelles

À lire aussi : Droguées à leur insu, elles témoignent pour que les futures victimes soient mieux prises en charge

Image en Une : © Helena Lopes – Pexels


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