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« Vous ne baiserez pas » : on a discuté date, sexualité et misogynoir avec Naya Ali

Sur Twitter, sous le pseudo “Mauvaise fille”, Naya Ali raconte ses dates les plus marquants ou loufoques avec un sens imparable du storytelling. Telle une Carrie Bradshaw des temps modernes, elle livre avec humour et sincérité ses réflexions sur l’amour et le sexe. Le 28 août, la créatrice de contenus franchit un nouveau cap en publiant un premier essai au titre évocateur, “Vous ne baiserez pas”, aux éditions Les Insolentes.

“Je m’appelle Naya, j’ai 35 ans, je suis une femme noire, pas trop moche, qui ne baise presque jamais.” Dans cet essai drôle, pédagogique et accessible, Naya Ali se confie avec candeur sur ses expériences affectives et sexuelles. A travers son expérience de femmes noire et queer, elle aborde des notions sociologiques indispensables pour comprendre l’intersectionnalité, telles que la misogynoir, le colorisme ou le lesbianisme politique.

Spécialiste de la sexualité féminine, Naya fut l’une des voix du podcast Hot Line (2021-2023). Elle s’est intéressée au mouvement pro-sexe, sur lequel elle dresse un constat en demi-teinte. Comme l’annonce le sous-titre de “Vous ne baiserez pas”, l’autrice postule aussi que “la misère sexuelle n’est pas un problème d’hommes”. Rencontre.

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Madmoizelle. Qu’est-ce qui t’a poussé à écrire ce livre ?

Naya Ali. Je suis journaliste de formation. En 2018, j’ai ouvert un compte twitter, “Mauvaise Fille”, où j’écrivais un peu sur ma vie et sur le féminisme. C’était un mélange d’humour et d’un truc un peu sérieux, où je déconstruisais pas mal de choses sur le fait d’être une meuf noire. J’ai commencé à poster mes premiers threads, des histoires de cul sur plusieurs tweets, et j’ai vu arriver plein d’abonné·es hyper rapidement.

Je pensais que j’allais réunir 100 personnes (rires) ! C’est un exercice extrêmement difficile, parce qu’on peut se dire qu’il ne faut pas rire des discriminations. Mais je me suis rendue compte que c’était vraiment thérapeutique. C’est comme si je faisais quelque chose de mes traumas, qu’ils ne restaient pas là, à servir à rien, que j’arrivais à en tirer des bénéfices.

À lire aussi : « La suradaptation des personnes racisées est une épée de Damoclès » : Douce Dibondo (La Charge raciale)

Ensuite, j’ai été approchée par ma maison d’édition, mais je n’étais pas sûre de vouloir en faire un livre. Quelques années plus tard, je leur ai dit : “allons-y, faisons-le ce livre”. J’y voyais une continuité et beaucoup d’abonné·es me disaient : “Naya, tu devrais écrire un livre”. Ça m’a poussé à réfléchir, à transformer ce compte Twitter en un bouquin et aussi en une grosse thérapie (rires) ! C’était compliqué d’écrire ce livre mais je suis vraiment contente de l’avoir fait. Je ne savais pas par où commencer, parce que ce n’est pas le même exercice que sur les réseaux sociaux. Là, il fallait trouver une trame, un ordre des choses etc. 

Dire aux femmes noires qu’elles ressemblent à des hommes, c’est leur dire qu’elles ne sont pas assez femmes, qu’elles n’appartiennent pas au champ de la séduction.

Dans cet essai, tu retraces avec un humour mordant l’historique de ta vie sexuelle et affective. Dès l’adolescence, tu fais l’expérience de la misogynoir. Peux-tu nous éclairer sur ce concept ?  

Le premier chapitre, c’est “être une femme”.  Je voulais parler de tout ce qu’on reçoit dans le sexe en tant que meuf. Le deuxième chapitre bifurque sur “être une femme noire”, parce que ce n’est pas la même chose qu’être une femme blanche. On reçoit de la misogynie, spécifique à la race. On ne reçoit pas du racisme d’un côté et de la misogynie de l’autre, mais une nouvelle forme de discrimination qui est un mélange de racisme et de misogynie. Certaines insultes ne sont vécues que par les meufs noires. C’est ça la misogynoir. 

À lire aussi : Le baromètre des discriminations révèle l’ampleur du racisme anti-noir en France

Dans mon livre, je cite le cas le plus représentatif en France, Aya Nakamura. C’est une chanteuse noire, “dark skin”, c’est-à-dire qu’elle n’est pas claire de peau. Allez sur n’importe quel post Twitter ou Instagram d’Aya Nakamura, vous verrez plusieurs insultes qui la traitent d’homme ou de footballeur. Dire que les femmes noires ressemblent à des hommes, c’est une insulte spécifique qu’on nous sort depuis des années. Et c’est une insulte transphobe. C’est comme si on disait aux meufs noires qu’elles ne sont pas assez femmes, qu’elles n’appartiennent pas au champ de la séduction. Tu ressembles à un homme, ça veut dire qu’aucun homme hétéro ne te désirera jamais. Et pourquoi les footballeurs ? Parce que ce sont les personnes noires célèbres les plus visibles en France.

Tu évoques la fétichisation des femmes noires par les hommes blancs, que tu as pu vivre. Quel visage prend-t-elle ?

Dès l’adolescence, j’ai compris que les hommes ne s’intéressaient pas à moi comme on s’intéresse à une meuf blanche, qu’on va considérer comme neutre. L’intérêt qu’on me porte est dû à la race, comme si j’étais “niche”, comme si j’étais de la zumba italienne (rires). C’est vraiment un intérêt très spécifique. Les hommes blancs vont projeter leur imaginaire par rapport aux meufs noires. Il y a deux sortes de fétichistes : les fétichistes Afro-Américains et les fétichistes fans de l’Afrique. Les fans de l’Afrique vont dire qu’ils ont visité le Mali. Ils vont te demander : “c’est quoi ton plat préféré ? Ah c’est pas le mafé ? Tu sais pas le cuisiner ?”, alors que j’ai mangé du mafé une fois dans ma vie (rires). Les fétichistes Afro-Américains vont avoir le crâne rasé, porter des baggy etc. Ils vont imiter ces codes-là. Dans leur manière de s’accessoiriser, il y a la musique afro-américaine comme le rap, le R’n’B, les vêtements. C’est comme si on était un petit sac Chanel, un accessoire de plus. On n’est pas considérées comme une personne. 

Les gens ne vont pas essayer d’apprendre à me connaître. Dans mon livre, je parle de mes goûts spécifiques, qui n’ont rien à voir avec ce qu’on attend d’une femme noire. J’ai souvent eu en réponse, “t’es bizarre”, parce que je ne correspondais pas à ce qu’ils attendaient. Ils pensaient que j’allais cocher toutes les cases de leur approche fétichiste. 

Les hommes blancs vont projeter leur imaginaire par rapport aux meufs noires. On n’est pas considérées comme une personne.

Tu écris : “Quand tu es une femme noire, tu ES tes cheveux”. Pourquoi les cheveux tiennent-ils une place si importante dans la vie d’une femme noire ?

C’est un long chapitre dans mon livre. Les cheveux définissent comment tu vas te percevoir dès que tu es une petite fille. Déjà, noire et métisse, ce n’est pas la même chose. Si tu es métisse et que tu as des boucles, ce ne sera pas perçu comme des cheveux crépus ou une afro. Il existe une culture du bon cheveu. Dans les familles africaines, le cheveu noir est considéré comme plus beau quand il ressemble aux cheveux des métis et qu’il est long. Si tu nais avec des cheveux crépus et courts, ce qui était mon cas, on considère que tu n’as pas de bons cheveux. Les gens disaient à ma mère : “oh la la, la pauvre, le peigne se casse, t’arrives à la coiffer ?”. Le tout devant moi. Vous imaginez l’impact sur une petite fille de 6 ans ? Entendre des choses comme : “elle n’a pas eu de chance, pourtant sa grande sœur, ça va, ça passe, mais celle-là. Bon, tu pourras la défriser plus tard…”

Donc tu grandis en haïssant tes cheveux. Il y a aussi cette phrase qui est très utilisée : “elle n’a pas de cheveux”. Alors que j’ai des cheveux ! Mais ça veut dire avoir les cheveux crépus et courts. Il existe une hiérarchie du cheveu. Quand tu n’as pas des cheveux lisses, on va te faire des remarques. Mais chez les personnes racisées, il y a une hiérarchie à l’intérieur pour les cheveux.

En fait, c’est tous les jours que tu entends parler de tes cheveux ?  

C’est sans arrêt. Je ne me rappelle pas d’un mois dans mon enfance où on n’a pas parlé de mes cheveux. C’est comme ça que j’ai appris que j’étais noire. Apprendre que t’es noire, ça parait bizarre comme phrase. C’est une question qu’on pose aux personnes racisées. C’est quand tu as pris conscience du racisme. Moi, c’était en primaire, parce que j’avais des tresses plaquées. On m’a fait des remarques. Les tresses plaquées, c’est bien quand tu as 4/5 ans. C’est mignon. Mais à partir d’un moment, tu dois avoir les cheveux lisses. Le passage à l’âge adulte, c’est avoir des cheveux de blanche. Surtout à l’époque. Aujourd’hui, le mouvement Nappy a permis aux femmes de sortir avec des afros. Dans la rue, on va toucher nos cheveux quand on a des afros, mais on va moins te regarder qu’avant. 

Avant, il n’y avait pas une seule meuf dans la rue avec une afro. C’était soit un tissage, donc un rajout de cheveux, soit se défriser les cheveux avec des crèmes hyper toxiques à la soude. Les défrisants étaient très à la mode. Tu te brûlais le crâne, tu devenais chauve après un an, mais tu t’infligeais ça pour avoir les cheveux lisses ! 

Le passage à l’âge adulte, c’est avoir des cheveux de blanche.

L’une des idées phares de ton essai, c’est de venir tordre le cou à la notion de “misère sexuelle”, que les hommes célibataires involontaires, les “incels”, se sont appropriés. 

La misère sexuelle, c’est un terme qui circule depuis plusieurs années sur internet. Ça a commencé sur les forums des incels, des communautés d’hommes masculinistes et misogynes. Ces hommes constatent qu’ils n’ont pas de succès avec des femmes. Ils construisent une haine autour des femmes, en croyant que c’est à cause d’elles qu’ils sont dans cet état de non-amour, de non-sexe. Ces incels ont créé la notion de misère sexuelle, c’est-à-dire qu’ils ne reçoivent pas de sexe de la part des femmes alors qu’ils devraient. En fait, ils mettent le sexe sur le même pied d’égalité que se nourrir ou dormir. Sauf que la misère sexuelle, ça n’existe pas. La misère, ça concerne le fait de ne pas avoir de toit, de ne pas pouvoir se nourrir, et tu meurs de ça. Tu ne décèdes pas de ne pas avoir de relation sexuelle. 

Et surtout, c’est hyper misogyne parce qu’ils disent aux femmes qu’elles devraient, par devoir, coucher avec les hommes pour leur éviter cette misère. Ils partent du principe que les femmes sont privilégiées, parce qu’elles vont sur Tinder et elles peuvent coucher le soir même avec un gars. Donc, elles ne connaissent pas la misère sexuelle. C’est faux. Dans mon bouquin, j’explique que si la misère sexuelle existait, ce serait les femmes qui la subiraient. 

Certes, sur Tinder, je vais avoir plus de matchs qu’un homme moyennement beau, mais ces opportunités vont être violentes ou médiocres. Dans la masse d’hommes qui vont vouloir coucher avec moi, je vais avoir des mecs qui vont m’enterrer dans leur jardin si j’y vais, qui vont mal se comporter avec moi, être insultants… Ce que j’explique, c’est que le sexe est médiocre avec les hommes. Il n’y a pas d’empathie, de bon traitement. Donc, entre ne rien avoir et avoir des violences, je préfère ne rien avoir. C’est pour ça que j’ai diminué mes interactions avec les hommes. 

La misère sexuelle et amoureuse concerne principalement les femmes, et encore plus les femmes noires.

Quand j’avais 20 ans, je faisais des dates, j’étais un peu insouciante. Et en fait, j’enchaînais violence sur violence. Je me suis demandée, mais qu’est-ce qu’il faut faire pour avoir quelque chose de qualitatif ? Quand je parle avec des amis mecs hétéro, je vois bien qu’ils ont beaucoup moins de matchs que moi, mais leurs interactions sont beaucoup plus qualitatives. Il suffit de regarder les chiffres : un homme ne va pas risquer sa vie ou des violences quand il date. 

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La misère sexuelle et amoureuse concerne principalement les femmes, et encore plus les femmes noires. On parlait de fétichisme. En tant que femme noire, je peux te dire que 70% de mes interactions sur les applis vont contenir des violences racistes. En premier message, au mieux que je vais avoir : “t’es de quelle origine ?” avant même un bonjour. Et au pire, “j’ai jamais baisé avec une noire”. Ce qui est triste, c’est que même les mecs noirs vont t’envoyer des trucs du genre “bite noire de 20 cm, ça t’intéresse ?”. Ils ont tellement intériorisé le racisme, et je pense que c’est aussi un moyen de survie et de drague. Ils se sont rendu compte que le fétichisme leur permettait de baiser, donc ils se servent du cliché du gros pénis. 

Une autre remarque m’a marquée dans ton livre, ce sont les mecs qui te disent : “moi, les meufs noires, je peux pas”. 

Des études ont prouvé que les femmes les moins matchées sur les applis de rencontre sont les femmes noires. On a parlé de fétichistes qui te veulent absolument pour de mauvaises raisons. Mais il y a aussi ces mecs qui ont tellement de conceptions racistes qu’ils te disent tout de suite “moi les meufs noires, ça me plaît pas”, comme si toutes les meufs noires se ressemblaient. Ce qui est drôle c’est que quand tu veux savoir pourquoi les fétichistes aiment les femmes noires et pourquoi d’autres les rejettent, les raisons sont similaires ! Sauf qu’il y a un camp qui les apprécie, genre ils vont dire “gros caractère, gros cul”, et l’autre camp qui n’aime pas ça. Leur critère de détestation ou d’appréciation reposent sur des clichés racistes. 

Ces mecs pensent que ce sont leurs goûts, mais ils confondent goûts et constructions. Ils détestent quand on leur parle de construction raciste, alors que tout le monde en a. Quand je dis ça à quelqu’un, je pense qu’il entend : “t’es la personne la plus raciste de l’univers”. Il va se braquer, alors que c’est une construction raciste, le fait que tu en viennes à dire “toute cette communauté, je peux pas”. C’est la manière dont t’as grandi, les références que tu as eu, la famille, tes fréquentations… Après, c’est à toi de voir si tu veux te déconstruire ou pas. 

Les applis de rencontre ont beaucoup évolué en dix ans. J’ai l’impression que beaucoup d’hommes ont décidé de transformer ça en quelque chose de très sexuel.

Ton livre est parsemé d’anecdotes sur des dates plus ou moins catastrophiques, voire traumatisants. Si je te dis “appli de rencontre” aujourd’hui, que me réponds-tu ? 

Les applis de rencontre, c’est vraiment un endroit diabolique (rires). Ça m’a permis d’avoir des histoires que je considère aujourd’hui comme étant sympas. Les applis de rencontre ont beaucoup évolué en dix ans. Quand j’ai commencé, j’avais 50% de chance d’avoir un truc horrible, 50% de chance d’avoir un truc normal ou sympa. Aujourd’hui ça descend à 10% ! Je pense que c’est vraiment fini pour moi. 

Avec les applis, tu peux rencontrer des gens qui ne sont pas dans ton milieu, donc c’est super à la base. Mais j’ai l’impression que beaucoup d’hommes ont décidé de transformer ça en quelque chose de très sexuel. Et ça, c’est venu aussi avec tous les nouveaux mouvements de déconstruction sexuelle, les mouvements sexpo, pro-sexe. On a commencé à crier : “les femmes aussi aiment le sexe !”, et c’était super. On apprend plein de choses sur la sexualité aujourd’hui. Ça a permis ça, mais ça a aussi créé une espèce de consommation des corps beaucoup plus rapide, plus égoïste, plus individualiste. Ça s’est retranscrit sur les applis, où tu vas avoir des codes pour montrer que tu veux que du cul. Moi qui ai un profil ouvert aux femmes et aux hommes, je ne vois quasiment jamais les femmes utiliser des codes comme MMM, un hashtag qui prône à la base une sexualité positive et bienveillante, mais les mecs le mettent sans savoir ce que ça veut dire. Quand tu leur demandes, ils te disent “oui, c’est parce que je veux baiser”. C’est comme si le rôle des applis s’était transformé en une place pour coucher. 

Tu reviens également sur ta bisexualité et la découverte de milieux queer pas aussi ouverts que tu le pensais. Et tu fais ce constat : “le lesbianisme politique est un privilège qui n’est pas accessible à toutes les femmes.”

Ça existe et ça a aidé plein de meufs, mais je fais une variante pour les femmes racisées. Selon les milieux sociaux, tu as des femmes qui ne peuvent pas éliminer les hommes hétéro facilement de leur vie, que ce soit dans les milieux hyper religieux ou pauvres. Même si tu as des lesbiennes dans ces milieux ou des meufs bi qui voudraient s’en passer, elles ne peuvent pas. C’est un privilège de couper les hommes de sa vie et de se dire : “les hommes, c’est fini”. Ça se passe beaucoup dans les milieux intellectuels ou artistiques, quand tu es à un niveau de vie où tu t’es émancipé du contrôle des hommes. Mais quand tu as encore ce contrôle sur toi, tu fais comment ? Le lesbianisme politique existe, mais ce n’est pas une solution pour tout le monde. C’est très blanc et un peu bourgeois. 

En ce qui me concerne, j’ai essayé. Je parle de mon ex avec qui je suis restée un an. Après ça, je me suis dit, “j’ai trouvé ma voie, c’est fini les hommes !”. Quand tu as vécu une relation très cool avec une femme, tu te dis “pourquoi retourner dans la misère ?”. Sauf que quand j’ai commencé à fréquenter les milieux queer, à l’époque, il n’y avait pas d’espaces pour les personnes queer racisées. Je pense qu’aujourd’hui, c’est beaucoup plus facile. Mais à l’époque où j’ai tenté, c’était des milieux très blancs, où je ne me suis pas sentie la bienvenue et où j’ai subi du racisme. 

Dire à une meuf bisexuelle racisée, “excuse-moi, mais pourquoi tu te mets pas avec une meuf là, tu te fais du mal”, c’est oublier que dans les milieux queer, elle vit aussi dans le racisme. C’est pour ça qu’on parle d’intersectionnalité, qui est le fait de multiplier les discriminations. Donc si ça s’applique à toi, en tant que meuf blanche et que ça marche du tonnerre, cool, mais ce n’est pas forcément le cas pour toutes les meufs. 

Au-delà d’aimer le sexe, j’aime tout ce qui l’entoure. J’aime les aventures, c’est pour ça que je raconte des histoires.

Ta conclusion fait écho à celle d’Ovidie dans son essai “La chair est triste hélas” (2023). La somme de toutes tes expériences te mènent à ne plus avoir envie de t’exposer à du sexe avec des hommes. 

Là, si je m’imagine heureuse, c’est avec une meuf plutôt qu’avec un homme. Qui sait ce que l’avenir me réserve ? Et en ce qui concerne ma relation aux hommes, avant j’avais une espèce de folie qui me faisait y retourner tout le temps, parce que je crois que je suis une éternelle romantique. Au-delà d’aimer le sexe, j’aime tout ce qui l’entoure. J’aime les aventures, c’est pour ça que je raconte des histoires. J’ai toujours été très sentimentale. Et j’ai toujours été très reconnaissante envers les hommes qui m’offraient une histoire, même si ce n’était pas sérieux. Ils m’offraient une balade à moto. Et c’est d’une rareté assez incroyable. Parce que les hommes ne respectent pas les femmes qui baisent. 

A partir du moment où c’est pour le sexe, ils n’ont pas à te respecter. Ils n’ont pas à englober ça avec une histoire. Ils n’ont pas à faire autre chose avec toi que te baiser. Je suis persuadée que les hommes considèrent très mal les femmes avec qui ils sont en train de baiser, alors que c’est un acte d’amour. Je suis reconnaissante avec les personnes avec qui je couche. Je suis toujours très gentille. 

C’est pour ça que ça me parait difficile de continuer, parce que le sexe pour le sexe ne m’a jamais intéressée. Et surtout, c’est très violent. Je parle dans mon livre du fait que le sexe est éphémère, mais les traumas restent. Le sexe, j’ai un orgasme et c’est terminé. Mais le traumatisme, parce que le mec a été méchant, a dit une remarque raciste, sur mon poids ou misogyne… Ça me reste dans la tête pendant des années, voire pour toujours. Est-ce qu’il est bon de prendre un tel risque ? Je ne pense pas. Il me faudrait une proposition d’aventure extraordinaire pour que je change d’avis !  

À lire aussi : Les applis de rencontres peuvent-elles aider contre la dating fatigue ?

Dans mon dernier chapitre, je parle aussi de la charge du dating et c’est quelque chose qui me freine. La charge du dating, c’est un terme que j’ai inventé, une sorte de charge mentale mais pour organiser le date. C’est à dire que les hommes, je pense que leur ex avait la charge mentale de toute l’organisation de leur couple et avant, c’était leur mère qui organisait leur vie. Et donc, ces mecs n’ont jamais eu de responsabilités. Au moment où tu parles avec un mec sur une appli, il ne va pas savoir choisir un restaurant. Il va dire : “je sais pas, et toi ?” Et déjà, ça m’empêche d’aller à la rencontre parce que je l’ai trop fait, choisir la date, le restaurant, l’heure… et j’ai pas envie d’être leur daronne (rires). Donc je ne le fais plus du tout. 

À lire aussi : Lassé des applications de rencontre ? Cette tendance dating fait son grand retour

Aujourd’hui, je ne dis pas aux meufs d’arrêter de baiser. Parce que ce serait un peu hypocrite. Je l’ai fait pendant longtemps (rires). Mais je préviens, c’est à vos risques et périls ! Voilà tout ce qui s’est passé dans ma vie. Lisez l’histoire et voyez ce que vous voulez faire.


Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.

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