Article initialement publié le 9 novembre 2022
Sur les réseaux sociaux numériques, nombreuses sont les féministes à vulgariser des connaissances en matière de sexisme (on appelle ce genre les « vidéo essays »). Outre Clara Dfx (anciennement connue sous le pseudo de Clarinette) ou Amocide, Sabine se développe sur TikTok et YouTube en se spécialisant dans la lutte contre le « bullshit développement personnel et spiritualité ».
Dans une vidéo publiée le 25 octobre 2022 sur la plateforme du groupe Alphabet, @lasabz_ analyse la façon dont le « Girl Power » feint de se réinventer au service du féminisme sur les réseaux sociaux, mais nourrit en fait bien trop souvent le sexisme.
Comment le Girl Power alimente le sexisme ?
Dans une vidéo YouTube publié le 25 octobre 2022, la créatrice de contenu décrypte la façon dont la revendication du Girl Power s’articule autour de 4 archétypes sur les réseaux sociaux :
- la bien connue girl boss et son féminisme libéral,
- celle plus bohème qui se réclame du féminin sacré,
- celle qui aspire à une perfection lisse (pour être « that girl », c’est-à-dire cette femme parfaite, qui se lève à l’aube pour enchaîner yoga, matcha, écriture de journal intime, et course à la productivité)
- la femme alpha (qui clame être dans sa #DarkFeminineEra : l’ère de la féminité sombre).
4 archétypes féminins en vogue sur les réseaux, 1 même misogynie véhiculée
Sabine alias @lasabz démontre dans sa vidéo comment ces 4 archétypes qui prétendent défendre une forme de pouvoir féminin verse en fait bien trop souvent dans l’essentialisation sexiste et la misogynie intériorisée.
Loin de condamner de manière monolithique ce type de contenu qui peut faire du bien à regarder pour certaines personnes, elle rappelle qu’il serait virtuellement impossible d’éviter complètement ce genre de contenus sur les réseaux.
Plutôt que de culpabiliser, on pourrait donc les apprécier en gardant un regard critique, d’une part. D’autre part, pour entretenir ce recul, Sabine alias @lasabz recommande également de diversifier le type de contenus que l’on consomme, en plus de continuer à s’interroger sur les représentations qu’ils véhiculent, explicitement ou non.
3 questions à Sabine, alias @lasabz_
Madmoizelle. Comment vous présentez-vous ?
Sabine. J’ai 28 ans et je suis professeure de yoga. J’ai d’abord fait une école de commerce (ESCP Business School avant de travailler en start-up. L’an dernier, j’ai tout quitté pour me lancer dans le yoga. C’est en faisant cette reconversion que j’ai commencé à me poser des questions sur le milieu dans lequel j’entrais et sur les discours développement personnel et spirituel qui se multiplient sur les réseaux. J’ai d’abord tenu un compte TikTok sur ce sujet et maintenant, je propose aussi des formats plus longs sur YouTube.
Pourquoi vous êtes-vous spécialisée dans le décryptage du développement personnel et de la spiritualité ?
Je veux parler de ces sujets parce qu’ils ont un pouvoir d’attraction puissant et qu’il est important de les contrebalancer. Je me suis rendue compte qu’à partir du moment où l’on parlait de bien-être et de spiritualité, que ce soit sur les réseaux ou IRL, on avait vite tendance à perdre notre esprit critique. Personnellement, je me suis surprise à croire sur parole plein de préceptes de yoga alors que je garde une conscience politique très forte dans d’autres domaines. Le but de mes contenus, c’est de comprendre pourquoi ces discours ont un tel effet sur nous et quelles sont les idées politiques qu’ils propagent.
En quoi les arnaques autour du développement personnel et de la spiritualité constituent des enjeux féministes, selon vous ?
Les arnaques du dev perso et de la spiritualité new age ne concernent pas que les femmes parce que les dérives prennent beaucoup de formes différentes. En revanche, ce que je remarque, c’est que sur les réseaux, les discours dev perso/spirituels sont très genrés : hommes et femmes ne sont pas exposés aux mêmes contenus. Pour les femmes, les contenus dev perso ont beau avoir l’air variés, on retombe vite dans les injonctions classiques : injonctions à la beauté, à l’hétérosexualité, etc. Donc dans une certaine mesure, effectivement, déconstruire le dev perso, c’est parler de féminisme. Mais dans mes prochaines vidéos, j’espère pouvoir parler aussi d’appropriation culturelle dans ces discours-là, de capitalisme, de validisme… Ce sont des discours à la croisée de beaucoup de combats.
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Crédit photo de Une : Capture d’écran YouTube.
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
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