Toutes les 9 minutes, une femme a subi un viol ou une tentative de viol en France au cours de l’année écoulée.
Tu n’y crois pas ? Tu peux relire, ce sera toujours aussi vrai : toutes les 9 minutes, une femme a subi un viol ou une tentative de viol en France au cours de l’année écoulée.
Je répète, parce que le chiffre est effarant. Parce que personne n’a envie de croire à de telles statistiques. Et pourtant, le rapport de l’Institut national d’études démographiques (INED) est sans appel : 62 000 femmes ont été victimes d’un viol (52 400) et/ou d’une tentative de viol (36 900) au cours des 12 derniers mois.
La quantité de femmes victimes de violences sexuelles est alarmante.
Et c’est sans compter les autres agressions sexuelles prises en compte dans l’étude avec lesquelles on atteint le chiffre de 580 000 victimes : les questions posées portaient en effet à la fois sur le fait que quelqu’un se soit, contre le gré de la personne, « frotté ou collé contre [elle] », sur des attouchements ou des rapports sexuels forcés, mais également « d’autres actes ou pratiques sexuelles » subi•es contre son gré.
Cette dernière formulation est importante pour identifier tout ce qui pourrait relever du viol ou d’autres agressions sexuelles sans que les victimes les aient identifiés comme tels. C’est donc une enquête exhaustive, recouvrant tous les types de violences sexuelles, qui a été menée.
Vidéo extraite de la campagne d’ONU Femmes à l’occasion du 25 novembre, journée de lutte contre les violences faites aux femmes.
Les plus touchées par les violences sexuelles sont les 20-34 ans
Outre ce chiffre global, il est intéressant de se pencher sur plusieurs aspects plus spécifiques de l’étude.
Les femmes les plus jeunes sont aussi plus exposées aux violences sexuelles. La catégorie des 20 à 34 ans est cinq fois plus concernée que celle des 50-69 sur les 12 derniers mois par exemple – même si celles ci sont tout de même touchées par le phénomène.
Et si l’on se penche sur l’âge des victimes au moment où elles ont été agressées pour la première fois (car beaucoup de personnes ont déclaré plusieurs agressions), 56% d’entre elles étaient mineures — dont 40% avaient moins de 14 ans.
La famille et le couple, contexte trop récurrent des agressions sexuelles
Non, le violeur type n’agit pas dans une ruelle isolée à la nuit tombée. C’est un proche.
Ces chiffres doivent être mis en relation avec ce que l’étude appelle les « espaces de vie », c’est-à-dire le contexte de l’agression, leur position par rapport à l’assaillant•e. Cinq ont été distingués : la famille et les proches, les études, le couple, le travail, l’espace public et autres lieux de vie.
Et l’étude vient encore une fois démontrer que le mythe du violeur psychopathe que l’on croise dans une ruelle sombre en rentrant de soirée est loin d’être la norme. Dans la plupart des cas, l’agression a lieu dans le contexte de relation avec la famille, les proches ou (ex-)conjoints/petits amis :
« Trois femmes sur quatre, parmi celles qui en ont subis, les ont vécus dans ce cadre. »
Les hommes représentent 94 à 98% des agresseurs, et 4% des victimes
Si les femmes composent une majorité de victimes et qu’elles reportent principalement des hommes comme étant les agresseurs (94 à 98%), ces derniers se trouvent cependant tout de même du côté des victimes.
Les agressions sexuelles commises sur les hommes sont encore taboues, mais pourtant 3,94% d’entre eux déclarent avoir été victimes d’une forme ou d’une autre de violence sexuelle au cours de leur vie.
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Pour trois-quart d’entre eux, ils ont subi les agressions au cours de leur enfance ou de l’adolescence, et dans ces cas là encore c’est le plus souvent le fait d’un homme, dans leur entourage familial…
Plus d’une femme sur dix victime de violences sexuelles
Certaines de vos proches ont sans doute été violées, car ce fléau touche tout le monde.
Ce chiffre d’une femme toutes les 9 minutes, il m’a fait l’effet d’une gifle. J’ai beau savoir que ça peut concerner n’importe qui, ça reste aberrant. En moyenne, 14,47% des femmes ont été victimes au cours de leur vie de violences sexuelles (et c’est sans compter le harcèlement et l’exhibitionnisme).
Je regarde autour de moi, dans mon entourage, et je ne peux que constater que je connais sans doute plus de victimes de viol que ce que je sais. Et sans doute plus de violeurs également.
Je sais quelles conséquences ça peut avoir sur la vie des victimes, et ça me désespère de voir que la culture du viol est encore si présente, en témoigne un autre constat de l’enquête :
« Ces agressions les plus citées [ndlr : attouchements aux sexes, seins et fesses, embrasser de force, pelotage] sont associées à des échelles de gravité différentes : tandis qu’un tiers des femmes les déclarent « très graves » et un autre tiers « assez graves », un homme sur six seulement les considère « très graves » ou « assez graves ».
On continue de m’apprendre à moi, jeune femme, à ne pas être violée, plutôt que d’éduquer tout le monde à la notion de consentement.
https://twitter.com/_MonsieurQ_/status/802157382218510336
Lutter contre la culture du viol, terreau des violences sexuelles
La publication de cette enquête doit faire avancer les choses. Soutenue par Najat Vallaud-Belkacem en 2012, lorsqu’elle était ministre des droit des femmes, cette étude est le résultat d’une volonté politique et elle sera d’ailleurs poursuivie et étendue notamment aux territoires d’outre-mer et au contexte universitaire, afin d’identifier au mieux les axes de travail pertinents pour lutter contre les violences sexuelles.
Dès maintenant, le 5ème plan de lutte contre toutes les violences faites aux femmes inclut des dispositions relatives aux violences sexuelles, notamment concernant les conditions de dépôt de plaintes des victimes, la facilitation du constat de preuves, la poursuite de la formation des professionnel•les…
Et le gouvernement communique également sur ces questions depuis quelques jours avec des visuels que l’on retrouve déjà sur les réseaux sociaux, comme l’explique Najat Vallaud-Belkacem sur son site :
« Une campagne gouvernementale, lancée ce jour, vise à déconstruire les stéréotypes qui banalisent et légitiment ces violences, et pour la première fois, le viol. »
Contre les violences sexuelles, le temps de l’action
Outre ces mesures à venir, si vous êtes vous même victimes, ou témoins de violences sexuelles, vous pouvez vous référer au site du gouvernement qui y est consacré pour trouver toutes les informations nécessaires.
Il existe également le numéro d’écoute nationale, 3919, qui est la référence en termes de prise en charge de toutes les violences faites aux femmes, aussi bien les violences conjugales, que sexuelles ou au travail, etc. Vous y trouverez des personnes capables de vous orienter vers des dispositifs d’aide locaux selon votre situation et le numéro est gratuit.
Quelques précisions sur l’enquête :
L’enquête a été réalisée sur un échantillon de près de 16 000 femmes et 12 000 hommes représentatif de la population âgée de 20 à 69 ans.
Pour obtenir le chiffre d’une femme violée toutes les 9 minutes, voilà le calcul que nous avons effectué :
- 62 000 femmes au cours des 12 mois sur lesquels s’est étalée l’étude.
- Divisé par 365, cela fait environ 169.8 femmes par jour.
- Divisé par 1440 (le nombre de minutes par journée) on a donc environ 0,11 femmes violées par minute.
- C’est en multipliant 0,11 par 9 que j’arrive le plus proche de 1 : 0.11 x 9 = 1,05
- Ce qui nous donne le chiffre d’une femme violée toutes les 9 minutes en France.
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