Les chiffres sont atterrants. Selon une enquête IFOP commandée par l’Association pour l’insertion sociale et professionnelle des personnes handicapées (LADAPT), une femme handicapée sur cinq a déjà été victime de viol, soit le double du taux observé pour l’ensemble des femmes. Un pourcentage qui grimpe à 33 % lorsqu’il s’agit d’un handicap mental, psychique ou cognitif. Elles sont également en première ligne pour les violences conjugales (35 %). « Leur situation de vulnérabilité physique, psychologique et économique les expose davantage aux comportements de prédation » analyse le rapport. Celui-ci complète les données de la Drees, qui révélait en 2020 qu’ 1,9 % des femmes en situation de handicap. Ces dernières déclarent par ailleurs avoir subi des violences sexuelles au cours des deux dernières années, contre 0,8 % des personnes non handicapées.
La triple peine des femmes en situation de handicap
Plus souvent victimes, moins souvent dépistées et nettement moins crues, les femmes handicapées écopent donc d’une triple peine.
Interrogée par l’AFP, la psychiatre Muriel Salmona, spécialiste du psycho-trauma, revient sur les conséquences de ces violences, qui créent « des troubles du comportement ou une dissociation, comme si la personne était anesthésiée, déconnectée, amorphe. Ces symptômes seront mis sur le compte du handicap. Ou on dira que la personne raconte n’importe quoi. » En plus de mal repérer les victimes, l’accueil de celles-ci est insuffisant, voire complètement inadapté dans les commissariats et autres postes de gendarmerie.
Anne-Sarah Kertudo, fondatrice de l’association Droit Pluriel, spécialisée dans l’accompagnement juridique des personnes handicapées, raconte à l’AFP les dérives extrêmement choquantes dont font les frais certaines plaignantes : « Les sourdes par exemple, on leur demande de trouver un interprète en langue des signes pour prendre leur plainte. On a même demandé à certaines de mimer leur viol. » Parfois, les commissariats refusent tout bonnement d’auditionner les plaignantes, sous prétexte qu’elles sont handicapées.
Un plan quinquennal pour apporter une première série de solutions
Mercredi 8 mars, l’exécutif a dévoilé sa stratégie quinquennale en matière d’égalité femmes-hommes. Parmi les centaines de mesures présentées, certaines sont consacrées à la lutte contre les violences sexuelles dont sont victimes les personnes handicapées. Ces premiers éléments de réponse, apportés en réaction aux alertes des différentes associations, ont pour but de mieux repérer ces violences, en créant, par exemple, des outils de signalements adaptés, remis aux personnes handicapées dès leur entrée dans une institution médico-sociale, en favorisant l’accès aux soins gynécologiques, ou en organisant des ateliers de sensibilisation au consentement et à la vie affective et sexuelle…
La ministre chargée des Personnes handicapées, Geneviève Darrieussecq, a par ailleurs appelé à « une formation des policiers et gendarmes, dans l’Education nationale et dans le secteur médico-social pour détecter les signaux faibles, recueillir les témoignages, notamment des personnes non verbales ». Une déclaration qui va dans le sens des associations et professionnels, qui exigent une meilleure formation des forces de l’ordre et la mise à disposition d’outils de communication adaptés.
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