Ironie du calendrier, alors que le gouvernement vient d’annoncer la mise en place d’un « pack nouveau départ » pour aider les victimes de violences conjugales, l’État français vient d’être condamné pour « faute lourde » dans… une affaire de violences conjugales. Selon Le Monde, les faits remontent au 12 juin 2018, à Marseille. Cathy* allait chercher ses enfants lorsque son ex-compagnon, Karim Bouembassa, a surgi pour lui asperger le visage avec de l’acide. L’homme a été condamné en juin 2020 à 15 ans de prison avec une période de sûreté de 10 ans. Mais, le 16 novembre dernier, le tribunal de Paris a également reconnu la culpabilité de l’État, reconnaissant « l’inaptitude du service public de la justice à remplir [sa] mission, laquelle a fait perdre une chance à [Cathy] de ne pas subir cette agression ». L’agent judiciaire de l’État a été condamné à lui verser 10 000 euros au titre des dommages et intérêts.
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Inefficacité des sanctions
Au moment de l’agression, Karim Bouembassa fait déjà l’objet d’une condamnation avec sursis, d’une mise à l’épreuve, et compte déjà deux contrôles judiciaires à son actif. Il lui est donc formellement interdit d’entrer en contact avec son ex-compagne ou d’approcher de son domicile. Il n’est même pas supposé vivre dans la même ville qu’elle, et réside normalement en région parisienne. Le procès montrera plus tard qu’il n’a en fait jamais quitté Marseille. Avant l’ultime agression, la justice savait déjà que Karim Bouembassa n’avait que faire des interdictions qui lui étaient imposées. Ce dernier l’avait montré en multipliant notamment les menaces de mort à l’encontre de Cathy et de leurs enfants. Malgré tout, la justice n’a pris aucune décision allant au-delà des contrôles judiciaires que l’accusé ne respectait pas.
Un sentiment d’impunité
Pour Me Romain Maréchal, avocat de Cathy, « le maintien en liberté de Karim Bouembassa en dépit de preuves de violences conjugales et de violation de son contrôle judiciaire a eu pour conséquence de faire naître chez lui un sentiment d’impunité et lui a laissé toute latitude pour procéder à sa macabre agression par aspersion d’acide ».
Si les femmes victimes de violences hésitent souvent à porter plainte, ce n’était pas le cas de Cathy. Entre mars et juin 2018, elle avait déposé pas moins de 7 plaintes contre son ex-compagnon. Alors que ce dernier est finalement derrière les barreaux, elle a confié au Monde son soulagement. « Du commissariat à l’association d’aide aux victimes, durant les deux procès, tout le monde reconnaissait l’existence de grandes failles, a-t-elle confié au journal. Ne pas les sanctionner aurait été pour moi une seconde violence, institutionnelle celle-ci. »
*Le prénom a été modifié
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Visuel de Une : Unsplash / Kat J
Si vous ou quelqu’un que vous connaissez est victime de violences conjugales, ou si vous voulez tout simplement vous informer davantage sur le sujet :
- Le 3919 et le site gouvernemental Arrêtons les violences
- Notre article pratique Mon copain m’a frappée : comment réagir, que faire quand on est victime de violences dans son couple ?
- L’association En avant toute(s) et son tchat d’aide disponible sur Comment on s’aime ?
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Les Commentaires
Je pense notamment au magistrat dijonnais qui proposait sur internet de violer sa fille de 12 ans et de lui faire des trucs bien dégueulasses (lui uriner dessus, la prendre à plusieurs...). Au final, comme il n'y a pas eu passage à l'acte (il n'a pas eu le temps ?), on ne lui a pas retiré l'autorité parentale. Il a même pu rentrer à son domicile avec un bracelet électronique.
Mais que se passe t-il si finalement il passe à l'acte ? La "justice" aura laissé faire... Et même s'il ne fait rien, ce n'est pas normal qu'un type qui a des idées aussi tordues puisse avoir encore de l'autorité sur son enfant.
Et ce n'est qu'un exemple parmi tant d'autres... Combien de parents violeurs ont pu continuer d'abuser de leur gosse parce que le conjoint (souvent la mère) n'a pas été cru ou, pire, poursuivi en justice ?