Ces derniers mois, un nombre effroyable d’agressions sexuelles ont eu lieu en Inde et ils ont reçu une certaine couverture médiatique — avec par exemple le cas de la jeune étudiante décédée des suites de ses blessures après avoir été violée et passée à tabac l’hiver dernier.
Pour répondre à la culpabilisation des victimes et au slut-shaming qui ont bien trop souvent découlé de la médiatisation de ces faits divers, les comédiens Gursimran Khamba, Rohan Joshi, Tanmay Bhat et Ashish Shakya ont décidé de faire une vidéo pour All Indian Backchod à la fois drôle (parce que son texte est hilarant et qu’elle est bien jouée) et terriblement déprimante (parce que les arguments mis dans la bouche des actrices ne sont pas inventés, avec, à plusieurs reprises, des citations véritables).
Cette vidéo, relayée par Buzzfeed et intitulée It’s your fault (C’est ta faute) est jouée par l’animatrice Juhi Pandey et la comédienne Kalki Koechlin. Niveau cynisme et dénonciation par l’humour noir, elles donnent tout (traduction juste sous la vidéo) :
« Kalki — Les filles, vous pensez que le viol est quelque chose que les hommes font par désir d’exercer une domination, influencés par des années de patriarcat ? Vous avez clairement été induites en erreur par l’idée que les femmes sont aussi des personnes. Parce que voyons les choses en face mesdames : le viol, c’est votre faute !
Tout commence avec les vêtements que vous portez. Des études scientifiques suggèrent que les femmes qui portent des jupes sont la cause principale de viol. Vous savez pourquoi ? Parce que les hommes ont des yeux. Voici quelques exemples de tenues provocantes qui peuvent provoquer un viol.
Juhy — Remarquez que ce qu’elles ont toutes en commun. C’est ça : elles sont toutes portées par des femmes. Pas de femmes ? Pas de viol !
Maintenant, certaines personnes vont peut-être argumenter en disant que le crime est commis par des hommes. Et à ces personnes je dis : mais qui a donné naissance à ces hommes ? Là encore, c’est nous ! (Elle se fait agresser) C’est ma faute.
Kalki — La culture indienne propose de nombreuses méthodes progressives pour en venir au viol. Par exemple, on leur prescrit des « briatikli » (orthographe non vérifiée)* : quand vous vous référez à votre agresseur en disant « bria »*, et voilà : viol annulé. (Elle se fait agresser et crie « bria »*) Mesdames : ça marche à tous les coups.
(*Malgré nos multiples recherches, cette référence, probablement culturelle, nous échappe totalement. N’hésite pas à nous éclairer dans les commentaires si tu la connais !)
Juhy — Une autre façon qu’ont les femmes de propager le viol : travailler tard le soir. Mesdames : pourquoi travailler tard et être indépendante ? En fait, pourquoi travailler tout court ? C’est à ça que servent les maris ! Fun fact : si c’est votre mari, ce n’est pas du viol.
Kalki — Des gens ont répandu des rumeurs qui disent que le viol peut être causé par autre chose que vous. Par exemple, le Chowmein est préparé dans la cuisine. Et qui est dans la cuisine ?
Juhy – Les films. Et qui aguiche les hommes à l’écran ? (Elle nous montre du doigt).
Kalki – Et les téléphones portables. Les téléphones portables sont faits pour discuter. Et qui discute beaucoup ? (Elle se montre du doigt)
Juhy — En fait, pour être un peu plus claire : voici un camembert. Comme vous pouvez le constater, les femmes sont la cause principale de l’agression sexuelle dans 100% des cas. (Elle regarde le graphique qui parle de 90% des cas) Oh, je suis désolée, faux calcul : clairement, ce camembert a été fait par une femme.
Kalki — Avant de partir, n’oublions pas : si vous êtes fatiguées de vous sentir humiliées par le viol, vous pouvez toujours aller voir les policiers et être humiliées par eux à la place :
Faux policier – Madame, quand le viol a eu lieu, vous étiez avec des hommes ? Kalki – Non, non. Faux policier – Pourquoi vous sortez sans la protection d’un homme ? Kalki – En fait il y avait deux de mes amis ! Faux policier – Vous voyez : c’est ce qui arrive quand on traîne avec des hommes la nuit. Alors, qu’avons-nous appris aujourd’hui ? Kalki – C’est… C’est ma faute. Merci officier, merci !
Kalki — Dernier point mesdames : arrêtez d’inciter les plus jeunes à vous violer. Ils jouissent vite et ça fait de vous quelqu’un qui a commis un viol sur mineur. Juhy — Et c’est la faute de qui ? Toutes les deux — C’est votre faute ! »
Rire des propos insultants et plein de non-sens proférés par des personnalités publiques indiennes qui rendent les femmes coupables des agressions sexuelles qu’elles vivent, rire de l’inefficacité de la plupart des mesures prises par les autorités, c’est possible. C’est possible et surtout, c’est extrêmement dénonciateur.
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