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Julie, qui accuse des pompiers de l’avoir violée, se sent abandonnée par la justice

Une jeune femme a porté plainte pour viol contre une vingtaine de pompiers. Des années plus tard, la justice semble lui faire défaut.

Le 23 juillet 2019

Julie est une jeune femme qui accuse une vingtaine de pompiers de l’avoir violée à de nombreuses reprises pendant son adolescence (lire ci-dessous). Elle a porté plainte.

RMC relaie aujourd’hui sa colère et celle de sa famille face à une décision de justice : les faits sont requalifiés en « atteintes sexuelles sur mineure », au lieu de viols.

« […] en cause, « le défaut de consentement qui […] apparaissait insuffisamment caractérisé » selon l’avis du parquet de Versailles. »

Corinne, la mère de Julie, va faire appel de cette décision.

Le 5 novembre 2018

Comme je le disais à une collègue avant d’écrire cet article : « c’est rare que j’ai envie de couper des couilles, mais là j’ai très envie de couper des couilles ».

Vous allez comprendre pourquoi.

Violée par des pompiers à l’adolescence

RMC relaie l’histoire de Julie, qui témoigne au micro de la chaîne.

La jeune femme a 23 ans, et a porté plainte il y a déjà 8 ans contre une vingtaine de pompiers qu’elle accuse de l’avoir violée à de multiples reprises pendant son adolescence.

C’est à l’âge de 13 ans que Julie, après une crise d’angoisse en cours, est prise en charge par des pompiers. Elle garde contact avec l’un d’entre eux.

D’abord, comme beaucoup d’adolescentes ayant l’attention d’un homme adulte, elle est flattée. Puis le cauchemar débute.

Le pompier inclut d’autres collègues dans leur relation, fait passer le numéro de téléphone de l’adolescente, et les viols, parfois en réunion, commencent.

Julie évoque l’auto-mutilation

, les tentatives de suicide, l’hôpital psychiatrique. Et ses agresseurs connaissent, non seulement son jeune âge puisqu’ils l’ont rencontrée au collège, mais aussi la grande détresse qu’elle traverse :

« Plus y avait des viols plus je faisais des crises d’angoisse et ils étaient obligés de ré-intervenir, ce qui fait que mon état de santé était parfaitement connu. »

Consentir à 13 ans, en détresse, vraiment ?

Le juge en charge de l’affaire n’a « pas retenu le défaut de consentement », selon RMC.

De « viol », le cas passe donc à « atteinte sexuelle » — et les peines encourues baissent drastiquement.

À partir de quel âge un ou une enfant est-elle en mesure de consentir à une relation sexuelle avec un adulte, une personne majeure ?

Cette question a fait débat pendant plusieurs mois, notamment à travers des affaires comme celle de Pontoise à propos de Sarah, 11 ans, dont le viol n’avait pas été reconnu.

C’était la volonté du Président Macron, et de Marlène Schiappa, que de fixer un seuil d’âge minimum en-dessous duquel l’enfant aurait été présumé non consentant.

Il aurait donc incombé à l’accusé de prouver que son ou sa partenaire avait effectivement consenti à la relation sexuelle.

Sauf que le Conseil d’État s’est penché sur le projet du texte, et a rendu un avis expliquant que cette mesure risquait d’être jugée non conforme à notre droit constitutionnel — le droit suprême en France.

Pour éviter que la mesure soit censurée, Marlène Schiappa et Nicole Belloubet (ministre de la Justice) ont voulu créer un nouveau délit, « l’atteinte sexuelle avec pénétration », dans un article : l’article 2.

L’idée était de permettre de condamner plus sévèrement l’atteinte sexuelle, dans les cas où l’on n’arrivait pas à prouver le viol.

Problème : cette mesure a fait réagir vivement de nombreuses associations, qui tenaient à la mise en place d’un seuil d’âge minimum.

Une pétition lancée par le Groupe F accusait l’article 2 de dé-criminaliser le viol (ce n’était pas le cas, mais ça a beaucoup fait réagir).

Le problème de fond dénoncé par les associations était celui de la correctionnalisation : puisqu’on n’arrive pas à prouver le viol, et donc à faire condamner les violeurs aux Assises, on crée un nouveau délit, pour réussir à condamner plus souvent, plus sévèrement… mais un peu par défaut.

Ce n’est pas idéal, mais c’est mieux que de relaxer des violeurs ? Le débat s’est ouvert.

Finalement, sous la pression des associations, Marlène Schiappa et Nicole Belloubet ont retiré le délit d’atteinte sexuelle avec pénétration de l’article 2.

Tout ce débat, ses enjeux et sa résolutions sont résumés dans cet article, rédigé au moment de la polémique : Polémique sur l’article 2 de la loi Schiappa : « l’atteinte sexuelle avec pénétration » est retirée de la loi.

Selon Julie :

« À 13, ou à 14 ans, on ne peut pas donner son consentement. »

Je me permets de nuancer, car certaines personnes font leurs premières expériences sexuelles, avec le consentement de tout le monde, à cet âge-là.

Mais Julie était dans une position spécifique. RMC cite son avocat, Jean Tamalet :

« Les pompiers ont un ascendant sur Julie à l’époque, ce qui est un des éléments constitutifs de la contraintes. Sa vulnérabilité est avérée, compte tenu des médicaments qu’elle prend à haute dose. »

Qu’un juge estime, en 2018, qu’on ne peut pas prouver le défaut de consentement d’une adolescente de 13 ans, en détresse psychologique, face à plusieurs hommes adultes (les accusés avaient la vingtaine au moment des faits)…

Ça me donne envie de couper des couilles, ouais.

Mais ça ne serait pas très productif. Alors je vais continuer à soutenir l’éducation au consentement, la pédagogie autour de la culture du viol, et espérer que les choses changent.

Que justice soit rendue.


Écoutez Laisse-moi kiffer, le podcast de recommandations culturelles de Madmoizelle.

Les Commentaires

39
Avatar de skippy01
30 juillet 2019 à 08h07
skippy01
On marche vraiment sur la tête, là. C'est comme si à chaque affaire de viol, ils se donnaient pour mission de remuer ciel et terre pour que le violeur s'en sorte.
4
Voir les 39 commentaires

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