Plus d’une semaine après les nouveaux attentats de Paris, l’émission du Petit Journal du 23 novembre avait clairement pour angle, ou en ligne de mire, le rôle des médias en situation de crise.
On y parle donc de la Belgique, surveillée aussi bien par la police et l’armée que par les journaux du monde entier depuis que l’état d’alerte maximale a été annoncé pour cause de menaces terroristes. Au programme, un reportage de Camille Crosnier à Bruxelles sur la sécurité des frontières entre la France et la Belgique, mais aussi et surtout le #BrusselsLockdown et le choix journalistique de la RTBF, première chaîne de Belgique.
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Faut-il continuer à informer la population malgré la demande explicite des autorités de ne rien diffuser sur les actions de la police ? Pour Jean-Pierre Jacqmin, directeur de l’information pour RTBF interrogé par Yann Barthès, la réponse est oui… mais de façon intelligente. En faisant le tri entre les informations diffusables, et celles qui peuvent mettre en danger cette même population anxieuse de savoir ce qu’il se trame dans ses rues. Un entretien très intéressant que je vous invite à (re)voir grâce au replay, mais qui sert surtout d’introduction à la problématique, si je puis dire, du jour.
L’invité spécial était le journaliste indépendant Djaffer Ait Aoudia. Au lendemain des attentats, Ait Aoudia s’est rendu au restaurant Casa Nostra, dans le XIème arrondissement, qui a fait partie des établissements directement touchés par les attaques dans le but de réaliser un portrait du patron. Le hasard veut qu’il assiste ce jour-là à une négociation entre des journalistes du Daily Mail et du patron du restaurant à propos d’images prises par les caméras de surveillance.
Une vidéo exclusive sur laquelle le tabloïd a finalement mis la main pour la modique somme de 50 000€, pour la diffuser quelques jours plus tard avant d’être reprise par de nombreux médias. Extrait de l’émission :
La scène a été filmée en caméra cachée. Ait Aoudia avoue avoir profité de « faire partie des meubles
» pour filmer les personnes présentes à leur insu, et les images qu’il a choisi de partager au Petit Journal font déjà scandale. Ou un bad buzz, comme on dit chez les jeunes.
La vidéo du journaliste montre en effet le patron du restaurant présenter via son smartphone les fameuses images prises par ses caméras de surveillance. Les négociateurs du Daily Mail sont plus qu’intéressés, mais il y a un hic : la vidéo a été cryptée par la police, précisément pour ne pas qu’elle tombe entre les mains des médias. Qu’à cela ne tienne ! Le patron a un pote « hacker », un « as en informatique », qui va contourner le problème. Ni une, ni deux, il arrive, récupère la vidéo, « petit » échange d’espèces… et le Daily Mail a son scoop.
Si cette révélation a quelque chose d’écoeurant au premier abord, elle met néanmoins le doigt sur un débat plus que jamais d’actualité à propos du rôle du journaliste en situation de crise. À l’heure où l’état d’urgence semble impératif pour la sécurité de la population, on commence à se demander si la sécurité ne va pas finir par primer sur les libertés, et menacer notamment la liberté de la presse.
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Avouez donc qu’au vu de la diversité des positions parmi les médias, la question se pose : quel doit être le rôle de la presse en situation de crise ? Informer avant tout ou collaborer avec les autorités au nom de la sécurité ? Y a-t-il un juste milieu ?
Et puis surtout, quelle est la différence entre « information » et « course au scoop » ? Rep à sa, le Daily Mail.
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Les Commentaires
Je n'ai peut-être pas vu l'ensemble de la vidéo, car sur celle que j'ai vu, il n'y avait pas de mort unno:
et les personnes ne sont pas reconnaissables.
Je précise que je ne défends pas le fait qu'elle ait été diffusée, mais que je nuance juste l'affirmation que les médias qui l'ont diffusée sont "hors la loi".