C’est la nouvelle campagne gouvernementale pour réduire le gaspillage, inciter à la réparation et la réutilisation de nos objets, afin de préserver l’environnement. Et elle s’adresse à… nous.
Le ministère de la Transition écologique nous invite à prendre de « bonnes habitudes », et cela passe notamment par un petit clip où des gens comme vous et moi, qui ne chantent pas vraiment juste – car ça sonne plus authentique – entonnent Comme d’habitude de Claude François en réparant leur cafetière et en jetant une ampoule dans le bon bac.
Voir au-delà du réparage de cafetière
Achetez des aliments en vrac, optez pour la cup et les culottes de règles, faites vos propres produits d’entretien, arrêtez de consommer de la viande… les conseils pour que chacune et chacun agisse sur son quotidien pour réduire ses déchets et consommer moins ne manquent pas.
C’est le parti pris de cette campagne où l’on voit des personnes faire les bons gestes de bon cœur. Oui, même quand il s’agit de réparer sa cafetière au petit matin.
Cette campagne, elle nous dit que nous chacun, à notre petit niveau, nous pouvons faire quelque chose. Elle reprend ainsi l’allégorie du colibri, ce minuscule oiseau qui, face à un incendie dévastateur, s’active pour tenter d’éteindre le feu en transportant de l’eau dans son bec sous l’œil médusé des autres animaux qui l’avertissent : « Ce n’est pas avec ces gouttes d’eau que tu vas éteindre le feu ! ». Ce à quoi le colibri répond :
« Je le sais, mais je fais ma part. »
Nos petites actions, nos petites habitudes, déjà prises ou à prendre, sont-elles assez ?
L’injonction aux petits gestes individuels, ces petits ruisseaux qui font les grandes rivières, entretient-elle une illusion — celle que de « bonnes habitudes » pourraient inverser la vapeur face à la catastrophe climatique qui se profile ?
Dans une chronique pour Le Monde, le journaliste Stéphane Foucart montre par un exemple récent, la pandémie mondiale de Covid-19, qu’on ne peut se contenter de cela :
« L’idée sur laquelle repose le mouvement est séduisante. Elle mise sur le courage moral de quelques-uns, sur l’éthique de l’action individuelle, sur l’exemplarité et la capacité des conduites vertueuses à inspirer les autres.
Hélas ! Entre autres enseignements, la pandémie de Covid-19 vient d’administrer la preuve empirique que si “faire sa part” est peut-être nécessaire, c’est très loin d’être suffisant. »
Les mesures prises un peu partout dans le monde pour endiguer la progression de la pandémie due au SARS-CoV-2 ont formé une expérience inédite à l’échelle planétaire sur l’impact que pourrait avoir la prise de conscience subite, par 4 milliards d’individus – c’est, grosso modo, le nombre d’humains qui se sont retrouvés confinés pendant plusieurs semaines –, des dégâts que produisent leurs déplacements et leur consommation sur le climat.
Le confinement de près de la moitié de l’humanité et la mise à l’arrêt des pans de l’économie affectés par cette contrainte n’auront eu finalement qu’un impact limité. »
Comme le rappelle Greenpeace en réaction à cette nouvelle campagne, les engagements de la France ne sont à ce jour pas tenus en matière de réduction des émissions de gaz à effets de serre :
Moins de petits gestes, plus de grandes mesures drastiques
Cette campagne ne remet pas en question le modèle économique actuel, ni ne demande aux grandes industries de prendre leurs responsabilités.
De nombreuses grandes multinationales ont davantage intérêt à nous dire de faire pipi sous la douche que de revoir leurs modes de production.
Cette bonne vieille rengaine des petites habitudes du quotidien, c’est d’ailleurs Julien Doré qui y répondait assez impeccablement en septembre dernier, alors qu’on lui demandait justement quel était son geste du quotidien pour « sauver la planète ».
Il avait alors pointé l’hypocrisie d’un tel discours :
« Les choix qui sont faits par ces gens qu’on a choisis, sont axés sur le fait de nous culpabiliser nous au quotidien. »
Il ne s’agit pas de dire qu’agir à titre individuel ne servirait à rien. Oui, on peut s’inscrire à une AMAP, plutôt que d’acheter ses légumes plein de pesticides au Franprix, quand on en a la possibilité. Et oui, comme dans le clip de cette campagne, on pourra toujours réparer sa cafetière, si tant est qu’on en a le temps et les ressources.
Agir à son niveau, cela peut d’ailleurs avoir des effets positifs, notamment en transmettant des bonnes pratiques, en incitant ses proches et son entourage à faire de même. Cela peut aussi être un moyen efficace de gérer l’éco-anxiété.
Mais il s’agit de reconnaitre les limites de ces injonctions, notamment quand celles-ci sont diffusées par des dirigeants ou par des industries.
À lire aussi : Le dernier rapport sur le dérèglement climatique du GIEC est là, et oui, la fin du monde est proche
Crédit photo : Ministère de la transition écologique (capture)
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Les Commentaires
Blague à part, le sujet des déchets a tendance à m'énerver assez vite parce que