« Actuellement dans notre pays, près d’un viol sur deux est perpétré par un conjoint ou un ex-conjoint. Ce fait, gravissime, est pourtant très peu médiatisé et conscientisé par la population ». C’est par ces quelques lignes que s’ouvre la tribune du Collectif français contre le viol conjugal, publiée le 10 août dans le journal Libération.
Déconstruire le mythe du devoir conjugal
Pour les signataires, qui annoncent dans ce texte la création du collectif, ces chiffres sont notamment dus à l’ancrage très fort de la notion de devoir conjugal au sein du couple qui, « malgré la vague #MeToo », fait toujours partie des mœurs et de l’imaginaire collectif.
Ce mythe implique insidieusement une absence de consentement :
Beaucoup de victimes témoignent avoir été forcées par leur partenaire mais ne posent pas le mot ‘viol’ sur leur vécu, pensant que leur conjoint est dans son bon droit. Bon nombre d’agresseurs admettent d’ailleurs forcer leur partenaire, tout en se sentant légitimes pour le faire sous couvert de devoir conjugal.
Pourtant, depuis les années 80, la qualité de partenaire ou d’ex-partenaire, co-habitant ou non, constitue pénalement une circonstance aggravante du viol, portant les peines encourues jusqu’à 20 ans de réclusion criminelle (contre 15 sinon).
Mais encore faut-il que les textes de lois soient correctement appliqués. Ce qui est loin d’être une évidence, martèle le collectif :
« L’application des textes de lois sur ce sujet et la prise en charge des victimes n’est toujours pas au rendez-vous. Dans les faits, la majorité des viols conjugaux ne sont pas pris sérieusement en compte par la justice et sont requalifiés en tant que délit ou classés sans suite. »
La question de l’exclusivité sexuelle dans le couple
Outre la notion archaïque et sexiste du « devoir conjugal », qui joue donc un rôle de taille dans le fléau du viol conjugal, faut-il également mettre en cause le modèle d’exclusivité sexuelle érigé en norme au sein du couple ?
C’est en tout cas ce que soulève l’autrice et chroniqueuse Maïa Mazaurette sur Twitter (X) : « si le couple n’était pas le seul exutoire sexuel légitime, avec des partenaires possessifs, on n’en serait pas là ».
Une femme sur trois est concernée
Quoi qu’il en soit, il faut agir pressement pour replacer la notion de consentement au sein du couple. En effet, selon le dernier rapport du Haut Conseil à l’Égalité entre les femmes et les hommes, une Française sur trois (33%) a déjà eu un rapport sexuel suite à l’insistance de son partenaire, alors qu’elle n’en avait pas envie.
C’est face à ces chiffres vertigineux que le collectif s’est formé, souhaitant mener un travail de fond sur la question du consentement au sein des couples. Actions militantes, sensibilisation, accompagnement des victimes…
Les actions du collectif sont assorties d’un ensemble de requêtes formulées dans la tribune : plus de prévention, formation des fonctionnaires publics en contact avec les victimes, intégration du sujet aux cursus de droit et de médecine, révision de l’article 215 du Code civil (« qui oblige les époux à une communauté de vie, interprétée par la jurisprudence comme incluant le devoir conjugal »), exclusion de la notion de devoir conjugal dans les procédures de divorce, accompagnement psychologique de l’agresseur pour éviter les récidives une fois la peine purgée…
Si vous ou quelqu’un que vous connaissez est victime de violences conjugales, ou si vous voulez tout simplement vous informer davantage sur le sujet :
- Le 3919 et le site gouvernemental Arrêtons les violences
- Notre article pratique Mon copain m’a frappée : comment réagir, que faire quand on est victime de violences dans son couple ?
- L’association En avant toute(s) et son tchat d’aide disponible sur Comment on s’aime ?
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