Depuis que la création de madmoiZelle, mon temps étant compté, j’ai décidé de ne plus rester prisonnier des séries dans lesquelles je me suis embarqué : pas question de rester « tiède » plus de 2-3 épisodes, j’exige d’elles qu’elles me fassent rire, pleurer, grimacer de douleur, qu’elles m’interpellent. C’est pourquoi j’ai adoré Breaking Bad, The Newsroom ou plus récemment Rectify. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que True Detective est dans la veine de ces séries qui ne vous laissent pas indifférent-e.
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En voyant que HBO réunissait Woody Harrelson et un Matthew McConaughey qui a fui ses rôles de minet depuis quelques années dans une série policière a priori bad ass, mon sang n’a fait qu’un tour… voici 5 raisons pour lesquelles il avait bien senti le coup, le bougre.
1 – Parce que Nic Pizzolatto, et son scénario.
Le scénario est signé Nic Pizzolatto, 38 ans, écrivain originaire de la Louisiane, dont le premier roman, Galveston, publié en 2010, devrait connaître une seconde vie grâce à la série. Celui-ci était encore prof à l’université il y a quatre ans et le voici propulsé tout en haut d’Hollywood avec cette série qui fait sensation.
Fait rare à la télévision aujourd’hui, il a écrit tout seul le script de True Detective. Ce qui l’a d’ailleurs totalement hanté : « j’avais des conversations dans la tête 24h/24. J’avais Maggie, Martin et Rust dans la tête en permanence. » C’est dire le niveau d’implication du bonhomme.
C’est sans doute l’explication d’une certaine constance dans l’écriture tout au long des épisodes diffusés jusque-là – 6 à l’heure où j’écris ces lignes, et il l’avoue lui-même : « si vous n’aimez pas True Detective après trois épisodes, laissez tomber. En revanche, si vous aimez après trois épisodes, je pense que la série ne vous décevra pas ».
Si les détracteurs s’accordent à dire que True Detective ne raconte rien de fascinant, je ne vois pas les choses de cette façon : si le rythme (des six épisodes diffusés jusque-là) est plutôt lent, on rentre tout de suite dans le vif du sujet : Rust Cohle (Matthew McConaughey) et Martin Hart (Woody Harrelson) sont deux ex-flics, interrogés chacun de leur côté en 2012 sur une affaire datant de 1995, à l’époque où ils venaient de devenir partenaires. Ces deux interrogatoires forment la base narrative des premiers épisodes, à base de flash-backs.
« L’affaire » en question n’est néanmoins pas le crime banal : une jeune femme est retrouvée morte au pied d’un arbre, coiffée de bois de cerfs et entourée de symboles sataniques. Les deux flics vont raconter à leurs collègues leur version de l’enquête.
2 – Parce que ce duo, nom de nom.
C’est d’ores et déjà annoncé : ces deux-là ne seront ensemble que pour la saison 1 et les 8 épisodes qu’elle contient. On sait que la saison 2 de True Detective est signée et qu’ils ne rempileront pas. On aura a priori droit à un autre duo, si on en croit les rumeurs qui courent sur l’internet, même si Pizzolatto avoue qu’il préfère ne pas faire de deuxième saison que de faire une deuxième saison moyenne. Donc autant en profiter.
Woody Harrelson et Matthew McConaughey se connaissent bien : les deux hommes ont joué ensemble dans trois films, qui n’auront certes pas marqué l’Histoire du cinéma – notamment « En direct sur Ed TV ». Si Harrelson, pas spécialement chaud au premier abord pour passer du grand écran au petit, a fait True Detective, c’est parce que McConaughey l’a convaincu d’en être.
Ils sont parfaitement complémentaires, ces deux-là : Harrelson en père de famille macho, adultère, aussi peu prompt à gérer ses scrupules que sa jalousie colèrique — un comble, alors que McConaughey campe un ermite passionné de son job, dont la mort de la petite fille a bouleversé et flingué le mariage, et qui lit beaucoup trop de bouquins au goût de son partenaire un peu bas du front.
Le premier est religieux parce-que-c’est-comme-ça-non-? alors que l’autre est un agnostique beaucoup trop conscient du cynisme de l’espèce humaine pour croire à une quelconque entité supérieure. Ils ont à peu près pour seul point commun leur amour du métier de flic et cette enquête qui les lie d’emblée.
3 – Parce que McConaughey est dingue.
Rust Cohle en 1995 et en 2012
Ça reste la grande question de ce début d’année : comment Matthew McConaughey a fait pour passer du minet premier rôle des romcom hollywoodiennes à… ça ?
Sa métamorphose avait déjà été remarquée au ciné dans Mud (grandiose) et Killer Joe fin 2013, mais ses rôles dans Dallas Buyers Club, True Detective – et dans une moindre mesure sa seule scène dans Le Loup de Wall Street, vraiment marquante – confirment que l’ex beau-gosse à bouclettes a bien changé depuis « Comment se faire larguer en 10 leçons ». Aux US, ils ont même trouvé un p’tit nom pour ce changement radical : la McConaissance.
Woody Harrelson a dit de lui dans Variety : « en incarnant Cohle, il est devenu un autre homme. On ne communiquait plus de la même façon. Il n’était plus Matthew, il était Rust Cohle, et il m’a rendu fou furieux à plusieurs reprises. Un boulot fantastique. »
Il faut dire que le personnage de McConaughey a… du recul sur le genre humain, dirons-nous. Voici ce qu’il dit lors d’une conversation avec Martin, où celui-ci cherche à savoir ce qu’il a dans le crâne (sa réponse ne va pas le décevoir) :
Je pense que la conscience humaine est un faux-pas tragique dans l’évolution de l’être humain. On est devenus trop conscients de nous-mêmes, la nature a créé un aspect de la nature qui la sépare d’elle-même. Nous sommes des créatures qui ne devraient même pas exister selon les lois de la nature.
Nous travaillons avec l’illusion que nous sommes une entité, une sécrétion d’expérience sensorielle et de sentiments, programmés avec une assurance totale que nous sommes tous des êtres à part entière, alors qu’en fait nous ne sommes rien. Je pense que la chose la plus honorable qu’on pourrait faire pour notre espèce est de nier notre programmation, d’arrêter de nous reproduire et de marcher main dans main, entre frères et soeurs, vers notre extinction, une dernière nuit.
4 – Parce que c’est beau.
La Louisiane, le bayou. La photo est sublime, les acteurs sont magnifiques, et on sent une vraie continuité dans la réalisation. Ceci est d’ailleurs sans doute dû au fait que les huit épisodes ont été réalisés par un seul et même réal, Cary Fukunaga, alors que la mode actuelle est de multiplier différents réalisateurs au sein d’une même série – et d’une même saison.
5 – Parce que les différents niveaux de lecture.
Difficile d’en dire plus à ce niveau sans spoiler la série. Sachez juste que sous la trame principale « basique », il semblerait que le scénario de True Detective regorge de différents niveaux de lecture, qui pourront vous révéler beaucoup de choses, si vous avez envie de vous investir un peu plus dans la série.
Si vous avez vu au moins les cinq premiers épisodes, je ne peux que vous conseiller cet article d’Élise Costa chez Slate. Du travail d’orfèvre, qui m’a donné envie de re-regarder les premiers épisodes.
- Le topic True Detective sur le forum madmoiZelle
- La playlist Spotify de la série, remise à jour après chaque épisode (merci à Jack Parker)
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Les Commentaires
Ah autant pour moi, je n'avais pas compris que c'était une citation de son personnage dans la série. Merci de me l'avoir signalé !!!