La presse et le public n’étaient déjà pas tendres avec Tristane Banon. Accusée de ne pas en donner assez aux médias quand elle ne s’exprimait pas, elle est maintenant accusée d’en donner trop : remarquez, c’est pratique, quoi qu’elle fasse Tristane a toujours tort. La situation ne s’arrangera pas puisque jeudi, elle publie Le Bal des Hypocrites… et depuis cette annonce, le Tristane-bashing prend des dimensions absolument hallucinantes.
« Pauvre fille », « femme éthérée » qui donne envie de « vomir »
, « comédienne », « pas crédible », « pute », « rockstar »… Trois minutes sur Internet donnent une bonne idée de ce qu’on affronte quand on est une femme qui touche à un monstre sacré – un tour d’horizon de la haine qui justifie parfaitement la trouille que Tristane Banon pouvait avoir à porter plainte. Elle savait qu’elle s’en prendrait plein la tête et c’est exactement ce qui arrive. Pour les droits des femmes, ce n’est pas une bonne nouvelle.
Essentiellement, ce qui lui est reproché est d’avoir gardé un relatif silence sur la tentative de viol de DSK, pour soudain bondir sous les feux de l’actualité. Il paraît que c’est incompréhensible. Mais personnellement, dans sa situation, j’aurais fait exactement pareil. Des tentatives de viol, j’en ai essuyé deux, je suis féministe et je n’ai pas porté plainte. Parce que c’étaient des tentatives, dont je me suis tirée sans aucune peine, et que les mecs n’étaient pas dans leur état normal (l’un drogué, l’autre bourré… c’est pas une excuse mais bon). Je n’ai pas voulu aller voir la police pour ne pas me retrouver fichée comme victime, pour ne pas me victimiser moi-même, pour m’épargner les questions des flics, par flemme, parce que je pensais que de toute façon on ne les retrouverait pas. Ce n’est pas un service que j’ai rendu à la société et j’en suis bien consciente.
Mais si aujourd’hui, mille cinq cents ans plus tard, je revoyais un de ces mecs accusés d’une autre affaire de viol – c’est-à-dire que leur comportement n’est plus une erreur mais une habitude – et surtout, si je constatais par les médias que le coupable puisse s’en tirer… et bien comme Tristane je courrais déposer plainte. Et si la personne que j’accusais était médiatiquement bien installée (genre son épouse serait Anne Sinclair), je jouerais les cartes dont je dispose. Comme Tristane, j’écris, et comme elle, je sortirais un bouquin, parce qu’il ne faut pas rêver, on n’établit pas un état des lieux complet en donnant des interviews dont les journalistes retiendront trois phrases ou 20 secondes.
Je ne demande à personne d’aimer Tristane Banon. Elle n’est pas spécialement sympathique – mais hé, depuis quand il faut être sympa pour avoir un minimum droit au respect ? Je ne sais même pas si DSK est coupable ou pas. Mais en revanche, se retenir de déverser des flots de violence sur une présumée victime de tentative de viol, ne pas laisser dire cette violence autour de nous, ce serait la moindre des choses, et une bonne manière d’aider toutes les autres femmes. Parce que le Tristane-bashing c’est un message envoyé à toutes les femmes violées et présumées violées : fermez votre gueule.
Message parfaitement inacceptable.
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Les Commentaires
Je me considère comme faisant partie du grand public et je connais Tristane Banon depuis 2004 au moins . Ce n'est clairement pas une affaire de "médiatisation".
J'arrive après la bataille mais je voudrais revenir sur les commentaires qui disent qu'il y a une "hiérarchie des viols", rapport à ladite médiatisation.
Banon est écrivain, DSK politique, comment voulez-vous que l'affaire ne soit pas médiatisée? Qui plus est, un combo sexe + people ne peut être que médiatisé car les gens aiment ça.
Je voudrais finir sur un truc: quand Banon refusait de parler aux journalistes, elle s'est fait traiter de tous les noms et maintenant qu'elle parle, elle se fait aussi insulter. Certes, je suis sûre que certains lui diraient de trouver le juste milieu mais c'est quoi le juste milieu? Et franchement, dans la société actuelle sur-médiatisée, je trouve qu'elle n'est pas allée si loin que ça.