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Mode

Je travaille dans la mode, et les clichés me fatiguent

Le monde de la mode fait partie de ces univers professionnels qui souffrent encore de clichés bien tenaces. Et ça, Juliette en a marre.

Bon, je pense pouvoir assurer sans trop m’avancer qu’à peu près toutes les professions du monde souffrent de clichés plus ou moins gros. Mais il y a tout de même quelques corps de métier qui ont plutôt mauvaise réputation auprès du grand public.

Pour avoir évolué dans ce milieu et côtoyé des gens en faisant partie, je trouve que l’art est globalement un des mondes qui souffre le plus de clichés. Faisant moi-même partie de l’univers mode, c’est de lui dont je vais vous parler, même si je sais que l’architecture, l’illustration ou encore les Beaux Arts ne sont pas en reste concernant les idées reçues aussi nulles qu’un plat de frites accidentellement renversé !

En parlant à des personnes extérieures de ce que je faisais, j’ai très souvent été confrontée à des remarques, des commentaires désobligeants, remplis de raccourcis. Souvent dits, d’ailleurs, sans une once de méchanceté : extériorisés tout simplement parce que ces préjugés restent encore bien ancrés.

Aujourd’hui, je vous propose un petit tour d’horizon des pires clichés que j’ai pu entendre sur le monde de la mode et les gens qui le composent — avec, bien évidemment un démontage en règle de ceux-ci !

La mode, un monde pas si futile que ça

Je pense que c’est une des premières réactions auxquelles j’ai pu être confrontée face à certaines personnes à qui je disais que j’étais dans la mode. Même si ça n’est pas exprimé de façon agressive, j’ai pu remarquer plusieurs fois que les stylistes ou les journalistes de ce milieu avaient la réputation de ne pas être très… vifs d’esprit, pour dire les choses gentiment.

Je ne t’apprend rien si je te dis que l’industrie de la mode est souvent considérée comme la plus futile de toutes (avec la beauté) : c’est limite si s’intéresser aux tendances ne fait pas chuter le niveau intellectuel, pour certains esprits étriqués. Il suffit d’y porter un intérêt et de l’assumer pour déjà descendre dans l’estime de certains, alors dire que l’on travaille dedans… C’est un niveau au-dessus ! J’ai d’ailleurs souvent la vive impression que la mode est une passion que l’on doit plus ou moins cacher si l’on veut être totalement pris•e au sérieux.

Attention, spoiler alert : faire partie de ce milieu ne transforme pas en mollusque du cervelas. Comme beaucoup de gens, j’ai une passion (il s’avère que c’est la mode), mais je ne suis pas un cliché ambulant, et je m’intéresse à bien d’autres choses sans pour autant hiérarchiser mes hobbies. Je trouve aussi passionnant de lire La Bête Humaine de ce bon vieil Émile que de regarder le dernier défilé de ce cher Karl !

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Y a des mises en scène plutôt sympa en plus.

Et puis tant que j’y suis, j’ai envie de vous dire que non, la mode n’est pas un univers si futile que ça : c’est un art à part entière, avec ses codes, ses influences, ses expérimentations, ses inventions, ses messages. Mais aussi une industrie qui fait vivre des millions de personnes, qui permet à d’autres d’exprimer leur identité au quotidien. C’est un art fédérateur, facile à comprendre au premier abord ; un art qui vend du rêve, qui fait vibrer des milliers de gens.

La mode a eu et a encore un rôle sociétal, en permettant d’exprimer des opinions, des contestations. Le pantalon, la mini-jupe font par exemple partie intégrante du féminisme moderne, et ce sont pourtant de simples fringues !

À lire aussi : Le pantalon, symbole du féminisme

Alors pourquoi, pourquoi, admirer une robe d‘Iris Van Herpen serait-il plus stupide et superficiel que de s’extasier devant La Persistance de la Mémoire de Salvador Dali ? Les deux ont une histoire, un message à faire passer, une empreinte artistique, un savoir-faire, des influences.

Oui, je m’intéresse à la mode, et non, je ne suis pas bête. D’ailleurs… qui est le plus bête entre celui qui assume sa passion (jugée futile) et celui qui hiérarchise les intérêts des autres ?

À lire aussi : Le snobisme musical, cette plaie de la vie en société

J’exerce un vrai métier

Cette partie de l’article fait écho à une remarque à laquelle j’ai eu droit lorsque je parlais de mon travail actuel, c’est-à-dire rédactrice mode chez madmoiZelle.com. Un charmant jeune homme curieux auquel j’avais précisé ma spécialité m’a répondu « Ah, t’es pas vraiment journaliste, alors ».

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En plus de faire face à l’habituel raccourci disant que webmagazine = blog (non), j’ai eu le droit à la hiérarchisation (on la retrouve) de la compétence. Je ne pense pas que mes collègues traitant de culture aient droit à la même remarque, mais je pense que les autres rédacteurs, pigistes ou chroniqueurs des rubriques mode ou beauté de magazine imprimés (considérés, eux, comme de « vrais » magazines) (constat paradoxal, d’ailleurs de la part d’une génération qui a grandit avec Internet, m’enfin bon) la connaissent…

Je répondrais donc à ce cher monsieur que je fais un vrai travail, en fait. J’ai été formée pour, j’ai un diplôme — et quand bien même je n’en n’aurais pas, ce poste n’est pas simplement là pour décorer. Je ne fais pas semblant de taper sur mon clavier toute la journée en attendant que le temps passe jusqu’à 18h !

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Une de mes journées typiques chez madmoiZelle.

Mais je crois que c’est inhérent à tous les corps de métier de la mode, et même de l’art. Un styliste photo, un créateur ou un modéliste pourra sûrement entendre plusieurs fois qu’il ne fait pas quelque chose de concret, et qu’un jour, il faudra bien se prendre en main et trouver une profession convenable.

Les études d’art et de mode sont de vraies études, difficile à finir, voire éprouvantes, et les professions qui en découlent ne sont pas une invention d’un vaste complot des lézards humanoïdes Illuminatis habillés en Saint Laurent. Ou en tout cas, c’est ce que j’ai juré de dire en faisant un pacte de sang.

À lire aussi : J’ai testé pour vous… être étudiante en stylisme

Je ne passe pas mon temps à juger les gens, ni leurs habits

Autre grand cliché auquel je fais face très souvent lorsque je parle de mon travail. Cela s’exprime soit par des phrases telles que « Ah, tu es dans la mode ? Alors, est-ce que je suis tendance ? » ou encore « Ah merde, tu dois me trouver super mal habillé-e », soit par des regards inquiets, jetés à sa tenue puis à moi.

Le sachiez-tu ? Tu as le droit de t’habiller comme. Tu. Le. Veux.

Je me fiche de savoir que tu as acheté ton pantalon il y a quatre ans, que ça fait trois fois que tu portes le même t-shirt dans la semaine ou que tu n’as pas assez d’argent pour t’acheter le dernier sweat Kenzo hyper tendance. Si tu ne me l’avais pas fait remarquer, d’ailleurs, je ne l’aurais probablement jamais deviné !

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« Ne me pointe pas avec tes Prada de l’année dernière, chérie »

Même si j’ai remarqué que, depuis plusieurs années, je fais face à une déformation professionnelle (je regarde toujours comment les gens sont habillés), ce n’est pas pour autant que je juge ! Tant que tu te sens bien dans tes fringues, moi ça me va. Un cuisinier ne va pas se soucier de l’état de ton frigo ou de la cuisson de tes pâtes constamment, eh bien là c’est pareil : que tu sois en slip Tati ou que tu aimes porter du rose et du rouge ensemble, je m’en tamponne franchement le coquillard.

Un nouveau cliché qui a la dent dure : je ne suis pas snob non plus dans la vie en général (pas que sur les fringues, s’entend). Je ne vais pas me désintéresser directement d’une personne qui étudie la comptabilité ou l’informatique parce « c’est des trucs de geek » ou que « elle doit tellement avoir une vie et une personnalité moins passionnante que la mienne ». Je ne prends pas les gens de haut parce que je suis dans la môôôde, et je ne suis pas non plus la condescendance faite femme, contrairement à ce que les gens veulent bien imaginer !

Je ne me prends pas pour une artiste

Faire de l’art et évoluer dans un milieu artistique ne fait pas automatiquement de moi la nouvelle Coco Chanel. D’ailleurs, même parmi les créateurs reconnus, certains sont plus des stylistes que des artistes à part entière, selon leur façon d’exercer leur métier ! Alexander McQueen était un artiste, Tom Ford est un styliste.  Mais ça, c’est un autre genre d’analyse.

Pour en revenir à nos moutons, exercer ce travail et faire ces études ne m’a pas fait péter un câble, et je ne me suis jamais considérée comme mieux que le « commun des mortels » parce que j’ai réalisé moi même des vêtements et des shootings, ou que je fais plus ou moins partie du monde de la mode. Même si on peut probablement compter plus de cas de mégalomanie chez les créateurs que chez les aide-soignants, il n’est pas bon, encore une fois, d’enfermer tout le monde dans le même sac.

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Berlioz, malgré son nom et sa dextérité, ne se prend pas non plus pour un grand pianiste.

De plus, je pense que le fait d’être « un-e artiste » tient plus du trait de personnalité que de la profession, et que beaucoup de personnes le sont au quotidien, sans pour autant exercer un métier en rapport avec leur sensibilité. Ironie du sport sort, j’ai souvent l’impression que plus on se prend pour un créateur… moins on en est un !

C’est pour l’instant tout ce qui me vient à l’esprit quand je pense à mon travail et aux clichés dont il pâtit, mais cette liste n’est pas exhaustive, bien sûr.

Et toi, quels sont les préjugés dont souffrent ta profession ?

À lire aussi : La « femme agressive », un cliché salement tenace

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Les Commentaires

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Avatar de Freehug
23 mai 2015 à 04h05
Freehug
Je trouve que cet article illustre bien une chose qui m'énerve au plus haut point, à savoir la tendance de certaines personnes à juger les goûts/opinions/métiers des autres. Je ne vais pas parler de mode parce que je n'y connais rien, mais, comment dire... Tenez une série d'exemples : les végétariens sont moralisateurs et fanas de sensiblerie. Les gens qui aiment la mode/les cosmétiques et/ou qui travaillent dans ce domaine sont superficiels. Ceux qui aiment les sciences (n'importe laquelle) et/ou qui travaillent dans ce domaine sont austères et ennuyeux. Les apprentis artistes, écrivains/acteurs/peintres/etc. sont naïfs, trop d'appelés pour peu d'élus (bon, ça c'est assez vrai certes), ils ne perceront jamais (faux : certains percent, bien sûr). Etc., etc., etc. Et ce sans compter les critiques liées aux opinions féministes, écologistes, de droite ou de gauche, les goûts en matière de loisirs (l'opéra c'est snob, la BD c'est immature,lke sport c'est beauf)...

Pourquoi juger sans cesse, tout le temps ? C'est si dur que ça de se dire "bon, Truc aime un truc qui me déplaît et/ou travaille dans un domaine qui ne m'intéresse pas, c'est pas grave, on peut en parler, discuter, peut-être même que ça finira par me plaire" ? C'est si dur que ça de vivre sereinement en sachant que les autres sont différents de moi, qu'on peut s'entendre quand même et que ce n'est pas la fin du monde si on n'a pas les mêmes centres d'intérêt ? Je n'ai sincèrement jamais compris cette attitude. Si quelqu'un peut m'expliquer, je suis toute ouïe. Pour tout dire, Madmoizelle est la seule communauté que je connaisse sur Internet où on peut parler de tout, dans le calme et le respect, sans se faire incendier et mépriser.
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