A peine arrivée dans ton nouvel appart’, tu te sens libre comme le Che. Et même si t’as pas encore de vrai lit, tu t’en fous parce que tu possèdes l’essentiel : un poste CD et du vrai Coca Cola (si ça n’est pas le Coca qui te refile l’Orgasme alimentaire, raye la mention inappropriée et remplace-la par ton « chewing Tantra » à toi).
Le premier soir, étendue à même le sol, tu savoures un album de Nat King Cole, le jazz c’est un truc auquel il faut que tu te mettes, parce que ça fait vachement bien d’écouter du jazz la nuit dans SON appart. Tu kiffes ? Eh bien profites-en, parce que demain les problèmes commencent, chérie.
Réveil 8h25, pour téléphoner directo presto à Sainte CAF afin de quémander un peu de générosité chrétienne. Ensuite, il te faudra vêtir une armure de patience pour demander à EDF qu’ils viennent mettre le jus rapido, sans quoi tu devras apprendre à aimer le carpaccio et les douches froides. Bonne nuit.
Les APL au pied du sapin ?
Le lendemain, 11h (personne n’a cru au coup de 8h25 quand même, ou bien ?). En composant le numéro de la CAF, tu t’essaies à quelques « Allô, râââcle, allô », pour ne pas servir ta voix caverneuse de personne réveillée y’a pas assez longtemps à la dame au bout du fil. Tu retournes tout
pour retrouver ton numéro d’allocataire. La pression monte, sachant que tu disposes d’une minute pour le composer. Pendant ce temps, La Voix te stresse en disant « vous connaissez ce numéro, il figure sur le courrier d’acceptation de votre accréditation allocataire » (au secours). Motivée par les 0,45 cts la minutes depuis un poste fixe que coûte l’appel, tu retrouves ce numéro.– Adélaïde Blancart, je vous écoute (voix de crécelle, mais c’est pas grave, la bonne humeur emplit ma maison. Amen).
– (sourire au téléphone, Petite maison dans la prairie state of mind) Bonjour madame, blablabla, allocations, blabla, où en est mon dossier ?
– Alors on a bien réceptionné votre dossier, blablabla, retourné, blabla, signature du bailleur manquante, blablabla.
– (silence triste) Et vous me l’avez renvoyé quand ?
– Hier, donc ça arrivera courant de la semaine prochaine.
– (silence douloureux) La semaine prochaine ? Mais on est mercredi… Vous acheminez le courrier à dos de mule ou bien ?
– Pardon ?
– Non rien, bonne journée au revoir (la bise à ton fils).
Récapitulons : pour qu’un dossier CAF soit traité, il faut IM-PE-RA-TI-VE-MENT qu’il soit complété, signé par le demandeur et le bailleur, le chat de la voisine et ta mère. Ensuite, lorsque tu colles le timbre, surtout n’oublie pas de chanter l’Ave Maria et quand tu enfournes la lettre dûement affranchie dans la boîte aux lettres, rappelle-toi : un pas à droite, deux pas à gauche et tu cries « I lov’ la pizzaaaa »… Sinon, de manière sempiternelle ton dossier sera retourné et pendant ce temps les caisses sont vides.
Après avoir raccroché, tu traînes ton corps jusqu’à la cuisine, et te rends compte qu’être indépendante c’est être pauvre. Pas même un quignon racis ne t’accueille en croustillant, et pas de doux flip flop de lait qui s’apprête à bouillir. Donc tu fais ta Bar mitzvah de coca débullé au ptit déj’. Cheers. Ooh, et puis, tu peux prendre ton temps, parce que ton prochain coup de téléphone administratif ne peut être donné que dans les HDB, or il est midi, donc pas HDB. Vu que ton huiplex miniature est vide grandeur nature, tu vas devoir redoubler d’ingéniosité pour tuer le temps. Suggestion du chef : tu pourrais faire des pompes, comme un chanteur de Hip Hop incarcéré…
Faites que le courant passe mieux avec EDF !
14h45 : Après une sieste de derrière les fagots et par terre, il est temps de faire appel à un bel éphèbe électricien pour qu’il relève tes compteurs. Si tu veux, tu peux lire cette dernière phrase à voix haute pour t’émoustiller un peu. Merciiii, France Télécom. Contrairement à celui de la CAF, le numéro d’EDF est gratuit, free, kostenlos, ça fait plaisir à l’intérieur.
tuuuuut, tuuuuuut (ah, ça sonne !)
– Amélie Chombart à votre écoute.
– Bonjour madame, j’aurais besoin qu’un technicien spécialisé relevasse mes compteurs, étant nouvelle occupante de l’appartement depuis lequel je vous appelle.
– Oui, très bien vous avez la fichette tarifaire correspondant à l’offre en cours ?
– (silence « je lui dirai les mots bleus » state of mind. Pouvez-vous me rappeler à quel moment j’ai reçu le papier sus-cité ? (note : prononcer cette phrase avec emphase, un peu comme dans les fourberies de Scapin)
– euh…
– (je t’ai niquée-euh, je t’ai niquée-euh) Alors, je vous donne mes disponibilités, blablablabla.
Et encore, tu as de la chance. Il y a des filles qui ont renoncé sont devenues « gens du voyage » juste parce que c’était trop compliqué d’ouvrir une ligne de téléphone. D’autres encore ont fait des séjours de convalescence, après avoir vécu un burn out causé par la musique d’attente d’Orange. Pendant des jours, elles se réveillaient en chantant « ouah’pa, palala ouah’paa ». Donc résiste, prouve que tu existes, car une fois toutes ces douloureuses étapes derrière toi, tu vas hyprakiffer ton indépendance toute neuve. Et qui sait, un jour peut être, la CAF comprendra que ça serait bien de se magner, vu que le fait de demander une aide financière implique qu’on n’a PAS d’argent d’avance.
Moralité : C’est à la force de ses méninges que l’on défrichera la jungle administrative pour voir la clairière de la liberté.
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Les Commentaires
"D?autres encore ont fait des séjours de convalescence, après avoir vécu un burn out causé par la musique d?attente d?Orange. Pendant des jours, elles se réveillaient en chantant « ouah?pa, palala ouah?paa »."
Cette phrase m'a faite mourir de rire tellement elle est vraie ; j'explique : je suis technicienne réseaux chez un FAI, alors orange, c'est tous les jours que je les ai au téléphone, et vraiment cette musique va me rendre psychopathe ou je ne sais trop quoi d'autre!
*Phrase testée et approuvée par l'ensemble de mon service! *