Je vous parle d’une marque que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaîtreuh : Ed Hardy. Une griffe on ne peut plus polarisante qu’une des tiktokeuses les plus suivies au monde vient de remettre sous les feux des projecteurs.
Addison Rae, l’influenceuse reine de l’appropriation, singe désormais les années 2000
Connue notamment pour s’approprier des chorégraphies créées par des personnes minorisées sur TikTok et s’en attribuer tout le mérite, Addison Rae tente désormais de s’imposer en icône de mode auprès de ses 80 millions d’abonnés.
Née en 2000, l’Américaine vient ainsi de jeter son dévolu sur une robe-t-shirt à l’imprimé kitsch de la marqué fondée en 2002 Ed Hardy. Une tenue pile dans la tendance Y2K (comprendre : une réécriture caricaturale des années 2000) pour se rendre à la soirée d’anniversaire d’un collègue des réseaux sociaux, Carter Gregory, à West Hollywood, le 19 juin 2021.
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Alors peut-être que le thème de la soirée était les tendances les plus chelou des années 2000 ? Mais il pourrait tout aussi bien s’agir d’un placement de produit pour tenter de repositionner cette marque autrefois si décriée, qui regagne pourtant en popularité actuellement
— notamment sur les sites de seconde main — en particulier auprès des ados et jeunes adultes.
Et ce regain de vogue ne ferait que répéter l’histoire de la mode. En effet, Ed Hardy a été fondée par le défunt Christian Audigier, également à l’origine de la tout aussi clivante griffe Von Dutch, et fervent défenseur du marketing d’influence.
Ed Hardy et Von Dutch, le (pire du) marketing d’influence des années 2000
Ce proche de Johnny Hallyday a été condamné à dix ans de prison en 1999 pour possession de stupéfiants à Bali, mais n’a purgé que trois mois de sa peine grâce à de généreux pots-de-vin, avant de s’envoler illégalement aux États-Unis tenter de devenir créateur de mode.
Là, il rince les stars d’articles gratuits et paye des paparazzis pour les photographier portant ses vêtements afin de gagner en popularité. Ce qui illustre toute l’ambivalence du marketing d’influence au service de la mode : à force d’être exposé à un produit qu’on peut trouver laid de prime abord, mais porté par des stars qu’on adore (détester), il est possible de se surprendre à vouloir l’acquérir, afin de l’arborer avec ou sans ironie.
Les tendances mode s’achètent, et c’est nous qui le payons
C’est comme ça que la tendance improbable des casquettes Von Dutch et des t-shirts Ed Hardy a commencé dans les années 2000, et tente donc de recommencer en ce début des années 2020 sur le dos d’Addison Rae.
À cette dernière d’illustrer à nouveau comment on peut payer pour créer artificiellement une tendance que le grand public va trouver affreuse avant de potentiellement en faire un plaisir coupable (cf. les Ugg, les joggings peau de pêche Juicy Couture, et autres Crocs).
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Notons tout de même qu’il s’agit bien souvent du même genre d’opérations rémunérées du côté des marques de luxe. Bizarrement, les médias les traitent avec beaucoup moins de snobisme quand elles rincent des personnalités de sacs à main à quatre chiffres et autres vêtements impraticables qui peuvent finir par nous tenter à force d’y être exposées… Signe que la frontière floue entre le bon et le mauvais goût tient bien souvent d’une construction sociale de classe.
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