On était exaspérées par le fat suit (traduisez littéralement, « costume de gros ») de Sarah Paulson dans la série Impeachment : American Crime Story en 2021. En 2022, rebelote. Cette fois, c’est au tour du réalisateur Darren Aronofsky de valider cette pratique grossophobe avec son film The Whale (La Baleine en anglais).
« Jouer » un homme queer obèse
À la fin de la projection de The Whale à Venise plus tôt cette année, Brendan Fraser a reçu une standing ovation de 6 minutes. Le public a acclamé la performance de l’acteur qui, dans le nouveau film de Darren Aronofsky, joue Charlie, un homme gay de 272 kilos atteint de dépression et d’hyperphagie incontrôlée suite au décès de son amant. Or, Brendan Fraser est hétérosexuel et n’est pas obèse.
Malgré l’enthousiasme du public à Venise, plusieurs voix se sont élevées pour questionner le choix d’un acteur hétérosexuel et qui n’est pas obèse pour incarner le personnage de Charlie. Parmi elles, Daniel Franzese acteur obèse et gay, principalement connu pour son rôle dans Lolita Malgré Moi a réagi auprès de People :
« C’est un homme adorable. Et c’est super. Mais pourquoi ? Pourquoi porter un costume de gros pour jouer un homme queer de 180 kg ? Qui connaît mieux le fait d’être un homme queer obèse qu’un homme queer obèse ? »
De l’empathie… ou de la pitié ?
En dépit de la polémique, Darren Aronofsky a défendu son choix auprès d’EW :
« Les personnes obèses sont généralement écrites comme des méchants. Nous voulions créer un personnage travaillé qui a de bons et de mauvais aspects ; Charlie est très égoïste, mais il est aussi plein d’amour et cherche le pardon. Donc [la controverse] n’a aucun sens pour moi. Brendan Fraser est le bon acteur pour jouer ce rôle, et le film est un exercice d’empathie. »
Pourtant, les doutes exprimés par Daniel Franzese sont loins d’être isolés. Du côté de la presse américaine, de nombreuses critiques ont été émises à l’encontre du film. Ainsi, dans le Slant Magazine, on lit que Charlie est présenté « comme un objet de pitié disgracieux tout au long » et que, par conséquent, « il est difficile de nier la grossophobie du film ». Selon le New Yorker, le film créé « un effet de voyeurisme » , dans sa surenchère de prothèses et d’effets spéciaux ultraréalistes. «
« En « humanisant » Charlie, Aronofsky semble vouloir repousser le spectateur afin que nous puissions nous féliciter d’avoir trouvé l’homme dans le monstre. Mais est-ce de l’empathie ou de la pitié ?
Michael Schulman, The New Yorker
Si le film est sorti aux États-Unis le 9 décembre, en France il faudra attendre le 8 mars 2023 pour le découvrir en salles et se forger sa propre opinion sur la mise en scène et l’éthique de Darren Aronofsky.
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Crédit de l’image à la Une : © A24
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