Même si quelques jalouses auront un peu plus de mal que les autres à le reconnaître, il est bien difficile de ne pas aimer Leslie Feist. Mets un instant de côté le jour où ton mec t’a dit, avec un peu de bave aux lèvres devant le clip de One Evening, combien il aimait la… hum… la fraîcheur de la chanson et la subtilité de ses arrangements. Oublie surtout le fait qu’il a rarement eu autant d’engouement pour quelque chose depuis, si ce n’est pour la Coupe du Monde de… enfin bref…
Il faut dire que la canadienne semble avoir tout pour elle. Sa voix est une sorte de croisement idéal entre Charlotte Gainsbourg et Dusty Springfield. Son CV d’ancienne hurleuse punk, de membre du collectif Broken Social Scene et son implication au sein de différents groupes lui offrent une crédibilité au sein de la scène rock indépendante pour laquelle Dido donnerait un bon paquet de dollars. Ajoutons à ça un soupçon d’humour qui montre que ce n’est pas du tout le genre de fille à se prendre au sérieux et on obtient une artiste tellement au delà de toute mode qu’on aurait envie de l’offrir à sa maman pour la fête des mères autant qu’à sa copine branchée pour la soirée de ses 20 ans.
Enregistré en pyjama, The Reminder est né en à peine deux semaines dans un petit village du Val d’Oise. Et ça s’entend. Le chien du voisin qui aboie, le chant des oiseaux… Une porte qui claque, une chaise qui grince… Chaque son ambiant a été capturé pour donner à l’album une atmosphère bucolique et renforcer le sentiment d’intimité mélancolique. Pour exemple The Park, ballade nostalgique enregistrée avec un magnétophone en plein air. Même chose dans The Water où sa voix, juste mesure entre le coffre et le murmure, sait monter à l’assaut pour se retenir aussitôt, se tendre et se détendre, rester à sa place là où beaucoup d’autres en auraient vite rajouté jusqu’à l’agacement. Les arrangements sont souvent minimaux mais particulièrement soignés. Ici une guitare électrique baryton croise des lignes de piano sautillantes et font de My Moon My man un tube imparable et un modèle de simplicité. Plus loin, un arpège de banjo motivé par des clappements de mains et c’est 1,2,3,4, une comptine amoureuse adolescente et lumineuse qui prend son envol sur un final de cordes et de cuivres.
Mais la véritable richesse de cet album est sans doute son éclectisme. Feist nous fait glisser avec aisance de réminiscences indie-pop (Past In present, I Feel It All) à une ballade electro-zen (Honey Honey) en passant par un mini gospel électrique (Sea-lion Woman), un folk hanté (Intuition) et une élégante sucrerie jazzy (Brandy Alexander). La voix tout-terrain de la canadienne se prête si bien à tous ces exercices de style qu’à aucun moment on ne se sent perdu dans toute cette diversité sonore. Un peu comme si on faisait un long voyage sans les contraintes du dépaysement ou du décalage horaire.
C’est un peu à ça que ça sert la musique dans le fond. Partir loin en restant restant chez soi. C’est en tout cas lorsqu’ elle se pose que Feist sait le mieux avancer.
Le clip de 1,2,3,4 :
https://www.youtube.com/watch?v=4PsWTxvOArs
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
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