Je n’en ai pas encore beaucoup parlé sur Rockie, mais sache que je suis une immense fan de Stephen King. J’ai peut-être même un petit souci d’addiction à ses romans.
J’ai donc dévoré L’Outsider, qu’il a sorti en 2018, et je me suis précipitée sur l’adaptation en série télé signée HBO, une chaîne connue pour ses programmes originaux et ambitieux !
Après 3 épisodes diffusés (en France, ça se passe sur OCS), voici ce que je pense de The Outsider, une série qui a le mérite de dépoussiérer le genre bien éculé des enquêtes criminelles.
Pas de stress, je ne vais pas spoiler The Outsider ici ♥
The Outsider, ça parle de quoi ?
Comme beaucoup de séries criminelles, The Outsider commence avec un meurtre horrible. Celui d’un petit garçon kidnappé, violé, dont le corps est retrouvé lacéré, partiellement dévoré.
Ralph Anderson (Ben Mendelsohn) est inspecteur de police. Son enquête avance très rapidement, et le coupable est sans aucun doute possible Terry Maitland (Jason Bateman), prof d’anglais et coach de baseball pour les jeunes de la ville.
Des témoins l’ont formellement identifié, des caméras de vidéosurveillance montrent clairement son visage, l’ADN correspond, les empreintes digitales aussi, jusqu’au groupe sanguin assez rare (AB+) qui a été retrouvé sur le lieu du crime.
L’inspecteur n’hésite donc pas à arrêter le suspect au vu et au su de la ville entière, mû par un désir de justice mais aussi par sa colère personnelle : Terry a par le passé entraîné son propre fils, décédé à l’âge de 15 ans d’un cancer.
L’idée d’avoir laissé son enfant entre les mains d’un tel prédateur mène Ralph à frapper vite et fort, avec la certitude d’être dans le vrai.
Sauf que.
Sauf que Terry Maitland n’était pas en ville ce jour-là. Il était en déplacement pour un colloque professionnel, à plus de 100km de là. Colloque qui a été filmé. Et où on le voit clairement à l’image.
Comment un homme peut-il être à deux endroits en même temps ?! C’est le mystère de The Outsider…
https://www.youtube.com/watch?v=9ENgPU_6zbM
The Outsider, une série criminelle entre deux genres
Ce mystère est déjà assez original. En plus de se demander qui est coupable, on se demande plus largement comment toute cette situation est possible !
Et ça suffit déjà à différencier The Outsider de bien des séries criminelles.
Le projet est chapeauté par des spécialistes du genre : Richard Price, un grand auteur de romans policiers mais aussi de scénarios pour Martin Scorsese ou encore The Wire, est à la production, aux côtés de Jack Bender, qui a notamment bossé sur Les Soprano.
On doit aussi à Richard Price la mini-série de HBO The Night Of, qui explorait déjà les thèmes de la culpabilité, de la criminalité et du système judiciaire américain, souvent défaillant.
Mais The Outsider porte l’empreinte de Stephen King, plus habitué à l’horreur et au surnaturel qu’aux enquêtes classiques, même s’il s’y est essayé avec sa trilogie Mr Mercedes.
La frontière entre réalité et paranormal devient de plus en plus ténue au fil des épisodes. Y a-t-il une explication rationnelle à ce mystère insolvable ? Faut-il ouvrir son esprit à la possibilité de l’impossible ?
Autant de questions qui font de The Outsider une série à la frontière entre deux genres !
The Outsider, une série criminelle… pudique
Peut-être que, comme moi, tu es un peu lassée des séries criminelles parce qu’elles sont souvent un peu trop gore et semblent se complaire dans le fait de montrer ou décrire des actes affreux.
Je trouve que The Outsider évite clairement ces écueils, et fait preuve d’une pudeur salvatrice
malgré des thématiques très dures.
Le corps de l’enfant est montré dans quelques plans seulement ; ils sont certes crus, mais ça ne dure qu’une poignée de secondes, et c’est tout.
Pas de flash-backs sanguinolents à chaque étape de l’enquête, pas de caméra qui s’attarde sur les plaies… les mots que m’inspirent les choix de réalisation sont « respect » et « dignité ».
Je salue d’ailleurs le talent de Jason Bateman, qui en plus de jouer Terry Maitland de façon très convaincante, a réalisé les deux premiers épisodes de The Outsider (dont il est le producteur exécutif) !
Logiquement, The Outsider aborde largement le sujet du deuil. Le héros a perdu son fils ; un autre enfant est décédé… pour « ceux qui restent », la peine est insoutenable.
Elle peut être très difficile à représenter, et très douloureuse à regarder.
Mais là encore, The Outsider choisit la pudeur. Tu ne verras pas de mère éplorée hurlant devant une tombe, de famille qui se déchire, de joues couvertes de larmes et lacérées par des ongles.
Pourtant, le deuil est là. Il est même parfois étouffant, tant il est puissant. Mais c’est montré avec subtilité, avec distance.
Les scènes les plus tragiques sont souvent muettes, filmées de loin, ou au ralenti. La musique, très belle, s’assure de transmettre les émotions sans que ce ne soit trop brutal, trop violent.
En cela, The Outsider me rappelle Broadchurch, une de mes séries criminelles préférées (avec David Tennant et Olivia Colman), un modèle d’équilibre et de pudeur selon moi, qu’il s’agisse de meurtre d’enfant ou de violences sexuelles.
The Outsider, une série criminelle humaine et moderne
Puisqu’on parle de deuil, j’aimerais m’appesantir sur un point qui m’a beaucoup touchée dans The Outsider.
Ralph Anderson, le héros, est un homme blanc quinquagénaire qui bosse depuis 20 ans dans les forces de l’ordre. Et pourtant, rien qu’en trois épisodes, on le voit aller deux fois… chez le psy !
C’est encore rare que la pop-culture mette en scène des hommes qui suivent une thérapie, surtout des mecs de cet âge-là, à la personnalité stoïque et réservée.
J’aurais tendance à comparer Ralph au Rust Cohle nihiliste incarné par Matthew McConaughey dans True Detective — une autre série criminelle applaudie par la critique, mais à laquelle je suis restée imperméable, pour le coup.
En partie parce que Rust Cohle, son pessimisme et son côté ultra-blasé m’avaient empêchée de rentrer en empathie avec lui.
Alors que Ralph est une boule d’émotions, de tristesse, d’espoir fragile. Il porte sa vulnérabilité dans ses yeux tristes, dans ses soupirs, dans ses silences.
Je suis contente que The Outsider donne sa place aux sentiments, à la difficulté de les gérer, et au fait que la thérapie, ce n’est pas magique, ce n’est pas facile, mais ça aide.
Car même s’il râle sur son psy, même s’il se sent « puni » de devoir consulter, Ralph est suivi. Il parle. Et c’est mieux que rien.
The Outsider, une série criminelle pour la nouvelle décennie
La dernière chose qui me plaît dans The Outsider (et qui m’avait déjà séduite dans The Night Of), c’est que l’intrigue s’intéresse davantage aux conséquences de la violence qu’à la violence en elle-même.
Là où d’autres fictions se fascinent pour la psyché du coupable, ses déviances, sa perversité, The Outsider pose un regard tendre et attentif sur « ceux qui restent ».
Car un crime ne fait jamais qu’une seule victime. Le deuil, la mort se répandent comme une contagion, d’autant plus lorsque la personne disparue est, comme ici, très jeune.
Tous ces éléments font à mon sens de The Outsider une création passionnante, qui reste assez classique pour séduire tout en dépoussiérant tranquillement un genre bien usé, celui des séries criminelles avec un inspecteur en personnage principal.
Quant au mystère… moi, j’en connais le secret, puisque j’ai lu L’Outsider. À toi de le découvrir en regardant l’adaptation sur OCS !
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