Dimanche soir, TF1 (comme tant d’autres médias grand public) a encore prouvé son ignorance sur les questions LGBT. Un peu plus d’une semaine après « l’affaire » du clip transphobe Travelo de Florent Peyre, c’est dans le magazine hebdomadaire Sept à Huit que se sont illustrées la méconnaissance et la vulgarité de la première chaîne française.
« Comment vous vous débrouillez avec vos pulsions homosexuelles ? »
Gareth Thomas, rugbyman gay sorti publiquement du placard en 2009, a été le sujet d’une série de questions lors d’une interview de dix minutes. Il en est ressorti des mots touchants et intimes sur l’histoire du mal-être d’un homme face à une homophobie ordinaire où il est normal d’insulter les gens à coups de « pédés » et de « tapettes ». Histoire qui heureusement se termine bien et lance un rassurant message d’espoir et de tolérance.
Apparemment, ça n’aura pas suffit au journaliste (Thierry Demaizière) qui en a au passage profité pour poser une question qui intéresse (il paraît) la Terre entière :
« Le rugby est un sport de contact, il y a des vestiaires, il y a des douches, comment vous vous débrouillez avec vos pulsions homosexuelles ? »
En voilà une question croustillante. À titre tout à fait personnel, quand je lis cette question j’ai l’impression d’entendre un gros lourd de fin de soirée qui demanderait « Et quoi alors t’as bandé ? » en faisant des pets sous ses bras.
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Thierry Demaizière a d’ailleurs répondu à la polémique qu’a suscité cette question sur les réseaux sociaux en assurant qu’il faisait « allusion à une période où le rugbyman n’assumait pas son homosexualité et la réfrénait ». Seulement voilà, le contexte n’a rien à voir. Cette question est simplement déplacée, à côté de la plaque. Elle sous-entend qu’un•e homo ne peut pas se maîtriser face à une personne du même genre.
Le reflet d’un fantasme homophobe
Quand je n’assumais pas mon homosexualité au grand jour, que j’étais au collège ou au lycée, j’avais des cours de sport, et il y avait même des vestiaires avec des douches (folie). Aussi incroyable que cela puisse paraître, la vue de mes petits camarades sous le jet d’eau ne m’a jamais donné une érection. Il faut dire que j’étais bien trop occupé à flipper en entendant déblatérer des « petites pédales » et autres joyeusetés (Gareth Thomas a d’ailleurs parlé des insultes homophobes très fréquentes dans les vestiaires).
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La réponse de Gareth Thomas (qui a fait preuve d’un calme et d’un tact à toute épreuve) remettait les choses au clair : il a dit « C’est ma profession, je n’ai jamais franchi cette frontière… Mes coéquipiers étaient ma famille, mes frères, et il n’y a pas d’attraction sexuelle entre frères. » Et quand bien même l’un de ses collègues aurait pu lui plaire, sachez qu’on ne se met pas en mode « homo en rut » dès que l’on croise un garçon à notre goût (ce qui serait très problématique, et invivable) !
Non, en fait, on vit normalement, on va au boulot et on rentre chez nous sans avoir à lutter contre quelque pulsion que ce soit (à part l’envie furieuse de mettre un coup de boule à tou•te•s les ignorant•e•s qui se permettent de parler à la place des concerné•e•s).
Si la question est posée, c’est qu’elle est le reflet d’un fantasme complètement homophobe qui voudrait que nos vies soient faites exclusivement de sexe sauvage, de pulsions animales. Parce que ça dérange encore plus les consciences que l’homosexualité ne puisse pas se résumer à ça, qu’elle puisse aussi être de l’amour et de la tendresse.
C’est profondément insultant de voir que ces questions existent encore lorsqu’on s’adresse à une personne homosexuelle. Quand quelqu’un ne gère pas ses « pulsions sexuelles » (peu importe l’orientation de celles-ci), c’est qu’il peut potentiellement s’agir d’un agresseur. Cette question, on ne la pose pas à un hétérosexuel « lambda », non. Cette question, on la pose à des pervers sexuels, à des violeurs, à des pédophiles. On est en 2015, on a encore besoin de rappeler que l’homosexualité n’est pas une « maladie » de déviant•e•s ? Je ne le pensais pas jusqu’à dimanche.
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De l’importance de prendre ses responsabilités
Certes, la question était peut-être « mal dite », « maladroite », ça ne reflète pas forcément ce que le journaliste a « voulu dire »… et j’en passe. Seulement, quand on est TF1 et qu’on parle des pulsions sexuelles « ingérables » des personnes homos, c’est plusieurs millions de personnes qui l’entendent et se demandent :
« Ben oui tiens, comment il a fait pour résister à la tentation de faire tomber la savonnette alors qu’il est payday le monsieur ? »
Réponse : homosexuel•le n’est pas agresseu•r•se.
« Ces propos reposent sur les clichés qui donnent naissance et alimentent l’homophobie et la transphobie. Alors que notre dernier rapport annuel a montré un enracinement profond des LGBTphobies (lesbophobie, gayphobie, biphobie et transphobie) en France et que l’été a été marqué par une recrudescence des agressions physiques, il est particulièrement regrettable que la principale chaîne de télévision française permette la diffusion de tels propos. »
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Les Commentaires
@Laura_ : Je comprends ton point de vue mais je pense que tu perds de vue une chose : ce que tu dis est acceptable pour un hétéro (et ça ne devrait pas l'être, c'est un pur produit du patriarcat, de la culture de la femme-objet), mais est perçu comme déviant pour un homosexuel. Quand aux femmes, il est toujours majoritairement admis qu'elle n'ont de désir que dans le cadre de leur couple, par amour. Jamais on n'entendra "alors pas trop dur d'être entouré de bombes rh rh rh" balancé à une femme hétéro qui bosse avec des mannequins hommes/lesbienne avec des femmes. Non seulement on part du principe que les hommes pensent avec leur pénis, mais en plus on considère qu'il est anormal que ledit pénis se lève pour d'autres hommes. Donc, question inacceptable pour moi, point. Cela étant dit, TF1 = télé-poubelle, nous sommes d'accord (propos ineptes voire désinformation et entretien volontaire de la paranoïa ambiante, racisme, sexisme, etc).
Désolée pour le pavé !