Le 20 mars, le Sénat du Texas aux États-Unis examinait plusieurs textes de lois qui, une fois n’est pas coutume (quoi qu’on commence à se demander), pourraient porter atteinte au droit à l’avortement.
L’interdiction de la méthode « dilatation-extraction »
L’une des propositions de lois visait à interdire la méthode de « dilatation-extraction ». La technique consiste à retirer à l’aide d’instruments chirurgicaux des fragments de tissus fœtaux et est qualifiée par ses opposants de « barbare ».
C’est pourtant la méthode la plus communément utilisée aux États-Unis pour les avortements entre 14 et 20 semaines, et aussi celle qui est qualifiée de plus sûre.
L’Arkansas notamment avait déjà adopté ce type de lois en janvier, comme je l’expliquais dans l’article qui faisait le point sur l’IVG aux États-Unis sous Trump.
Les médecins autorisés à mentir ?
La seconde proposition ne visait pas à proprement parler d’interdire l’avortement, comme beaucoup de textes ces dernières années, mais à le restreindre en passant par des moyens détournés.
Le principe de base annoncé est d’éviter à des médecins d’être poursuivis au cas où un enfant viendrait à naître avec de graves problèmes de santé.
La Senate Bill 25 (c’est son petit nom) est formulée comme suit :
« Il n’est pas possible de poursuivre ou de demander des dommages et intérêts, au nom de toute personne, en se basant sur l’assertion que selon l’action ou l’absence d’action [du médecin] une personne ne serait pas née mais aurait été avortée. »
C’est-à-dire que les parents d’un enfant né avec de graves malformations ne peuvent pas poursuivre le praticien de santé qui a médicalement suivi la grossesse.
Et ce que ce soit parce qu’il a fait ou parce qu’il a omis de faire quoi que ce soit qui les aurait conduits à choisir un avortement plutôt qu’une poursuite de la grossesse
.
Mentir à une femme enceinte lorsque l’on est médecin, ce sera désormais possible au Texas.
De cette manière, si un médecin choisit de cacher à une femme que le fœtus qu’elle porte est atteint d’une grave malformation par exemple, il ne peut pas être poursuivi.
Selon le sénateur à l’origine du texte, Brandon Creighton, cité par The Texas Tribune, cela vise à « promouvoir un environnement dans lequel les meilleurs médecins des États-Unis voudront pratiquer au Texas ».
Car dans l’état actuel de la loi, selon le sénateur, ils pourraient en effet se sentir contraints d’encourager l’avortement afin d’éviter toute crainte de poursuites… et « les meilleurs » docteurs chercheraient donc à se soustraire à ces risques pour soulager leur conscience.
Pour ma part, je pense qu’on peut remplacer « meilleurs médecins » par « médecins anti-choix », et je doute que ce soit une bonne nouvelle.
The Handmaid’s Tale : quand la réalité prend des airs de futur dystopique
Pour protester contre ces propositions de lois qui étaient discutées le 20 mars, des militantes se sont rendues au Sénat… déguisées en « servantes écarlates », comme dans la dystopie The Handmaid’s Tale, rapporte Slate US.
Pour celles et ceux qui ne connaissent pas, cette série Hulu qui sortira en avril se base sur la nouvelle de Margaret Atwood, La Servante écarlate. L’action se déroule dans un monde — celui d’aujourd’hui — où l’on aurait laissé l’inimaginable se produire.
Les droits des femmes y ont tellement régressé qu’elles se retrouvent divisées en trois castes : les épouses, en haut d’une échelle sociale où elles restent dominées par les maîtres de maison, les Marthas qui s’occupent des tâches ménagères, et les Servantes écarlates qui doivent porter les futurs enfants.
Mais Aki vous a déjà chroniqué la bande-annonce, qui rend compte de cette ambiance bien mieux que ces quelques mots.
Toujours est-il que malgré la pertinence et la force de l’image que renvoie cet acte militant, il n’a pas suffi à empêcher l’adoption de ces deux textes, par 21 voix contre 9.
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires