Vous vous rappelez de cette époque où makeup rimait « ultra visible » ?
L’idée était de montrer à tout prix qu’on savait se maquiller. On y allait donc à grands coups de traits d’eyeliner chargés, d’anti-cernes (bien) plus clairs que sa peau, de rouge à lèvres mat et de highlighter qui se voyait même dans le noir.
Attention, il n’y a pas de bonne ou mauvaise manière de se maquiller, chacun.e fait comme il.elle sent, mais il faut dire qu’en une décennie les pratiques ont bien changé.
Une évolution marquée par les YouTube et les célébrités
De nouvelles marques sont apparues et les réseaux sociaux se sont développés, amenant l’avènement des youtubeuses beauté et des nombreux tutos. On y trouvait de tout pour apprendre à se maquiller, à mieux choisir son fond de teint, à ne pas ressembler à du pain qui sort du four plein de farine…
La famille Kardashian est aussi passée par là avec les tendances du contouring et du rouge à lèvres nude à toutes les sauces. Les makeup artists, quant à eux, sont sortis de l’ombre, lançant plusieurs marques devenues incontournables, comme Pat McGrath.
Alors, en cette fin de décennie, la tendance est à la nostalgie.
On le voit avec des youtubeuses extrêmement connues comme Jackie Aina qui s’amusent à revenir sur leur évolution personnelle en termes de maquillage, ce qu’elles ne font plus, ce qu’elles continuent de faire et ce qui a globalement changé.
Verdict : dans l’ensemble, par rapport à 2010, le maquillage tendance est devenu plus « naturel », avec tout ce que la définition peut comprendre de nuances…
L’idée n’est plus uniquement de camoufler, mais de se sublimer selon les particularités de son visage. Et c’est la beauté tout entière qui s’acoquine au lifestyle et au bien-être.
Comme pour tout, les tendances makeup semblent relever de l’éternel recommencement — qui aurait cru qu’on porterait encore du gloss en 2020 ?
Retour sur dix années non exhaustives d’évolution en matière de beauté, sur YouTube et ailleurs.
2010, le maquillage exubérant qui copie les stars et les films
Il suffit de remonter dans les vidéos d’il y a dix ans (!!!) de certaines youtubeuses pour avoir l’impression d’entrer dans un autre monde.
À cette époque, Michelle Phan, par exemple, partage beaucoup de vidéos pour « reproduire » des makeups de films, de personnages ou de tendances gothiques emo.
2010, c’est vraiment l’année des yeux de chat, où le trait d’eyeliner s’impose en journée comme en soirée, avec l’art de manier le trait pour qu’il ne soit ni trop gros, ni trop fin.
Le maquillage est fun et brillant, c’est le moins que l’on puisse dire, avec beaucoup de poudre à bronzer et des couleurs pailletées. La marque phare, c’est bien évidemment la chouchoute des makeup artists : Mac Cosmetics.
Tout est chargé : le teint, les yeux, le rouge à lèvres, le mascara effets faux cils, voire les faux cils eux-mêmes.
Les youtubeuses américaines, australiennes ou anglaises ont le vent en poupe, et sont les premières à propulser la beauté comme un mouvement à part entière, comme Bethany Mota, Zoella, Chloe Morello ou encore Jackie Aina.
2011, l’avènement des hauls et des tutos
En 2011, les youtubeuses Françaises commencent à entrer dans la conversation médiatique.
C’est cette année-là que la plupart, aujourd’hui encore actives, sont arrivées sur la plateforme : EnjoyPhoenix, Horia notamment ou encore Shera.
Le mot d’ordre : apprendre à se maquiller. Le terme « tutoriel » rentre d’ailleurs officiellement dans le langage courant.
Le mélange des genres, lui, est joyeux : sur les chaînes des youtubeuses beauté, c’est un jour tuto coiffure, un jour look fringues, un jour maquillage… Bref, une ligne éditoriale un peu floue où les collaborations avec les marques sont encore quasi inexistantes.
En revanche, beaucoup de youtubeuses afro francophones évoquent dès cette époque la beauté en général, notamment par le prisme du soin des cheveux crépus et du maquillage adapté aux peaux noires et métissées, à un moment où l’industrie grand public ne les prend pas encore en compte.
C’est aussi à cette période que les palettes d’ombres à paupières comme celles de Urban Decay ou Too Faced deviennent incontournables, chamboulant l’industrie : la palette Naked, notamment, change le game avec ses 12 fards neutres que tout le monde s’arrache.
Le Brow Bar de Benefit fait également un carton. Pourtant, la mode n’est pas encore aux sourcils très épais ; ils apparaissent surtout plus marqués et bien dessinés.
2012-2013, tout le monde sur Instagram
Cette période est intéressante, parce que les magazines féminins commencent à s’intéresser à d’autres types de beautés : on propose comment se maquiller si on est « mate de peau » ou si on a les yeux « en amande ».
C’est aussi pendant cette ère que beaucoup de youtubeuses migrent sur un tout nouveau réseau social… appelé Instagram. Si YouTube reste pourtant leur principal terrain de jeu, Instagram prend petit à petit une ampleur non négligeable dans la stratégie globale de ces influenceuses, rendant notamment les relations avec les marques plus évidentes.
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Ces années-là, MAC Cosmetics est toujours sur toutes les lèvres, littéralement, puisque c’est aussi à cette période que le rouge à lèvres Ruby Woo devient un indispensable.
Plus généralement, on voit fleurir les rouge à lèvres mats, portés bien marqués à la bouche, dans des couleurs prononcées, comme le dark red ou le prune.
https://www.youtube.com/watch?v=iZBlZIQK5bs
2014 – 2015, les sourcils broussailleux et la bouche pulpeuse
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La modèle Cara Delevingne devient en 2014 la reine incontestée des sourcils bien épais et extrêmement bien dessinés : tout le monde veut les mêmes.
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C’est ce qui aurait même inspiré le fameux Boy Brow de la marque Glossier, qui s’est officiellement lancée cette année-là.
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Impossible d’oublier le contouring, qui fait sa grande entrée dans le milieu cosmétique par le biais de Kim Kardashian, qui en fait sa signature makeup jusqu’à aujourd’hui.
La technique, qui date des années 1920, est fortement utilisée dans le milieu du cabaret et des drag queens, pour ensuite être remise au goût du jour en version filtrée par le maquilleur de Kim K. pour affiner le nez et sculpter le visage, afin d’obtenir un résultat graphique trompe-l’œil.
En 2015, c’est au tour de Kylie Jenner de populariser à grande échelle une tendance : celle du rouge à lèvres liquide nude avec le crayon qui va avec, pour donner l’impression d’avoir des lèvres plus épaisses.
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En réalité, l’entrepreneuse subit en parallèle des injections de ses lèvres, ce qui devient également une mode, toujours très demandée aujourd’hui en médecine esthétique.
C’est ainsi que naît en 2015 Kylie Cosmetics, dont l’égérie n’est autre que Kylie Jenner, qui invite en toute simplicité sa communauté à obtenir la même bouche qu’elle.
En France, la youtubeuse Sananas est souvent comparée aux femmes du clan Kardashian pour ces tendances qu’elle a aussi adoptées (et pour une légère ressemblance également ?). Comme un peu tout le monde d’ailleurs, qui veut faire de même et ressembler aux sœurs.
C’est à ce moment-là que le terme d’« Instagram beauty » fait son apparition, définissant une beauté propre aux réseaux sociaux que les Kardashian-Jenner ont impulsée à travers leur plateforme respective.
2016, entre full face et no makeup
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En 2016, le maquillage se veut plus audacieux. On se maquille les yeux ET la bouche, on se fait des smoky eyes en journée, on met du highlighter en plein été et de l’eyeliner coloré ou glitter, pas qu’en soirée. Il n’y a plus vraiment de règles, le maquillage devient accessible à tous et toutes.
On assiste aussi à l’avènement des youtubeurs beauté masculins, comme l’extravagant James Charles qui devient dès 2016 le premier ambassadeur masculin d’une marque de cosmétiques américaine, CoverGirl.
Paradoxalement, c’est aussi l’année où le no-makeup devient un phénomène, notamment lorsqu’Alicia Keys annonce arrêter de se maquiller, dénonçant la pression d’une industrie qui l’a poussée à ne plus être elle-même.
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Mais ça, c’était avant que l’on apprenne le montant des produits composant sa routine pour une peau aussi belle : plus de 600 dollars au compteur et autant de rendez-vous chez une spécialiste de la peau.
Le no makeup devient populaire chez les stars qui usent du hashtag #nomakeupselfie pour se montrer version « nature ».
C’est sans doute cette injonction au « non maquillage » qui a fait fleurir le no-makeup-makeup ou le maquillage nude qui invite à se maquiller pour un effet bonne mine trompeur. Vous suivez toujours ?
2017, l’année Fenty Beauty
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En 2017, le teint devient essentiel au reste de l’équation beauté. On cherche à obtenir la teinte qui se rapproche le plus de sa carnation, les pinceaux se multiplient, correspondant à chaque partie du visage.
La beauté se veut également plus inclusive des visages et carnations de peau différentes de la peau blanche sur laquelle semblent uniquement se concentrer les marques.
Cette année-là, la marque Fenty Beauty, développée par Rihanna, fait son entrée dans tous les Sephora du monde, redonnant une impulsion à une industrie qui s’était un peu trop reposée sur ses lauriers.
Rihanna n’est pas la première à proposer une gamme de fonds de teint aussi large, mais c’est la première à en faire une marque de fabrique et une révolution, forçant ainsi les autres marques à se réinventer.
La nail art rentre aussi dans la course : on porte à présent autant d’intérêt aux ongles qu’au visage ou aux cheveux.
2018, le skincare débarque
En 2018, le skincare devient aussi désirable que le makeup. L’idée : mettre en avant le besoin d’avoir une belle peau pour obtenir un beau maquillage. La marque ultra accessible The Ordinary commence à s’implanter en France, ce qui change la donne : avec ses produits réduits à la formule scientifique, on a envie d’une expertise plus poussée sur les soins de la peau.
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Mais c’est véritablement le lancement en grandes pompes des shops Glossier, l’année d’avant, à travers une campagne dans les rues de New York puis en France qui va accélérer le processus.
Parler de makeup sans parler de sa routine beauté skincare devient impossible. « La peau avant tout, le maquillage après », avance la marque qui devient la chouchou des influenceuses lifestyle, ces anti-Kim Kardashian qui se maquillent à peine d’un coup de blush avant de sortir de chez elles.
Dans le même temps, les vidéos de Vogue où les stars décryptent leur routine beauté maximalistes deviennent virales.
Côté youtubeuses, on constate différentes écoles, différentes approches : celles qui continuent d’user de la baking powder, celles qui se maquillent moins, et celles qui osent tout.
Plus de mode, plus de lifestyle, plus de skincare : la beauté devient un ensemble pour beaucoup d’entre elles.
2019, le retour aux sources avant le changement
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La nostalgie s’empare de l’industrie avec le gloss qui a officiellement fait son retour grâce à Fenty Beauty notamment.
Mais c’est aussi le combeack de certaines palettes qui sont rééditées, des paillettes, des mascaras colorés et des couleurs lollipop qui rappellent les années 2000 ou encore plus loin, les années 1960, avec un look un peu diva.
À l’approche d’une nouvelle décennie et dans un climat chaotique, retourner aux valeurs sûres fonctionne.
D’un autre côté, le maquillage devient plus neutre, avec des palettes nude adaptées à toutes les carnations. On en fait moins mais mieux avec des vidéos qui pullulent sur YouTube sur les erreurs à ne plus commettre, ou les bases à connaître.
Place également aux faux cils naturels et au make up glossy avec du highlighter qui remplace le fard à paupières et le blush.
2020, se maquiller en temps de pandémie, vraiment ?
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Qui aurait pu prévoir une pandémie mondiale meurtrière, des confinements à répétition et l’arrivée des masques dans nos vies ? Tout cela a évidemment changé la donne pour un temps indéterminé. 2020 reste encore un point d’interrogation pour l’avenir de l’industrie cosmétique, les ventes ayant chuté de 16,9%.
Cette année-là, on a surtout appris à comment se maquiller sous le masque, si vraiment on en avait besoin…
Une chose est sûre : cette nouvelle réalité voit naître la remise en question d’une industrie qui paraît tout à coup moins essentielle en période de crise sanitaire globale.
Reste à savoir comment les influenceurs et influenceuses beauté vont se positionner face à ce changement de paradigme…
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