Parler d’argent, en France, c’est encore tabou. Pourtant, c’est un sujet passionnant… et féministe, par certains aspects ! Dans Règlement de comptes, des personnes en tout genre épluchent leur budget, nous parlent de leur organisation financière en couple ou en solo, et de leur rapport à l’argent. Aujourd’hui, c’est Tania qui a accepté de décortiquer ses comptes pour nous.
- Prénom : Tania
- Âge : 22 ans
- Profession : étudiante et assistante d’éducation en préprofessionnalisation.
- Salaire net après prélèvement à la source : 1 400 €
- Bourse : 633,5 €
- Personnes (ou animaux) vivant sous le même toit : sa mère, sa soeur et deux chats
- Lieu de vie : Fort-de-France (Martinique)
La situation et les revenus de Tania
Tania a 22 ans et est étudiante en 3e année de licence de langues créoles (LLCER), elle est aussi assistante d’éducation (AED) en préprofessionnalisation. Il s’agit d’un contrat proposé à partir de la 2e année de licence (L2) aux étudiants désirant devenir enseignant, et qui leur permet une entrée progressive et rémunérée dans le métier.
« C’est intéressant. Il faut aimer les ados et savoir faire preuve d’une grande patience. Avant, je souhaitais être enseignante, c’est pourquoi j’ai commencé la formation d’AED en préprofessionnalisation en novembre 2020. Maintenant, avec le temps et l’expérience, ce métier est redescendu dans ma liste d’envie. On verra bien. »
Célibataire, elle vit avec sa mère, sa soeur et leurs deux chats dans un quartier urbain de Fort-de-France, le chef-lieu de la Martinique.
« Nous sommes locataires d’un appartement F4 depuis plusieurs années. »
Pour son contrat d’assistante d’éducation à mi-temps (8 heures par semaine), Tania touche un salaire net mensuel de 1 400 €, qui n’est pas soumis à l’impôt sur le revenu.
« En tant qu’AED en préprofessionnalisation, je suis payée plus que le SMIC et mon salaire et cumulable avec la bourse. Pour 8 heures par semaine, j’estime que je suis bien payée. Je pense qu’il est élevé pour redorer la profession d’enseignant et aider financièrement les étudiants pendant les 3 à 4 années de formation, surtout ceux qui ont des charges : appartement, factures, voiture et même billet d’avion ou ticket de bateau pour ceux qui sont hors de leur département ou région). »
Elle bénéficie aussi d’une bourse sur critères sociaux, d’un montant de 633,5 € par mois, à laquelle s’ajoutent 4,59 € d’intérêts versés par sa banque. Au total, Tania dispose donc de 2 038 € par mois pour vivre.
Le rapport à l’argent de Tania et son organisation financière
Issue d’une « famille modeste », Tania a appris de ses parents qu’il « faut épargner tant que l’on peut ».
« Je pense avoir acquis des bases solides grâce à mes parents et à mes recherches personnelles. »
Elle aimerait cependant acquérir une éducation financière et économique plus poussée, afin de mieux gérer son argent, soit pouvoir mettre de côté sans non plus se restreindre.
« Se faire plaisir est aussi utile, il ne faut pas se priver au point d’être frustrée. »
Réfléchie et peu dépensière, Tania reconnaît toutefois réfléchir longtemps avant de dépenser son argent et privilégier les « dépenses utiles ».
« Ma sœur dit qu’il faut se demander ‘Ai-je vraiment besoin de cet article ?’ »
Côté organisation financière, Tania dispose d’un compte épargne et d’un compte courant, avec lequel elle règle seule ses dépenses liées à ses études (contribution de vie étudiante et de campus ou CVEC, frais de scolarité, restaurant universitaire, transports, matériel…), ainsi que ses dépenses personnelles comme les vêtements, les soins capillaires et corporels.
« Ma soeur et moi pouvons aider ma mère pour les factures mais en règle générale, c’est elle qui s’en charge. »
Elles font toutes les trois les courses alimentaires et se partagent la note.
Les dépenses de Tania
Comme Tania vit toujours avec sa mère et sa sœur et est encore étudiante, elle ne s’acquitte pas du loyer, et a des dépenses principalement liées à ses études. Par exemple, elle a acheté en fin d’année un ordinateur par ses propres moyens, sans crédit, qu’elle règle en plusieurs fois, soit 119, 90 € par mois.
« Tout payer d’un coup aurait été trop lourd pour moi. À l’avenir, si un paiement dépasse 60 euros et en plus de quatre ou cinq fois, je me passerai du produit. Je n’en aurai probablement pas besoin. »
C’est aussi la jeune femme qui paye son abonnement téléphonique (24,99 € par mois) et ses frais de transport.
« Pour utiliser les transports en commun (bus et tramway) dans le centre de la Martinique, cela revient à 30 € pour les étudiants. C’est ceux-là que j’utilise pour me rendre au campus et au travail. Cependant, avec les grèves à répétition, j’ai payé le mois de septembre uniquement depuis la rentrée. »
Pour le mois de décembre 2023, elle a réglé 9,18 € de frais bancaires et rembourse actuellement 41,50 € pour l’achat de lunettes de soleil, réalisées lors d’une visite médicale gratuite à l’université.
« Comme faire faire mes lunettes de vue ne m’a rien coûté et que l’expérience m’a plu, j’ai demandé des lunettes de soleil avec ma correction, cette fois-ci, elles étaient payantes et ne m’ont coûtées que 166 €, soit 41,50 € en quatre fois. »
« Je ne suis pas du genre à manger en extérieur »
Comme mentionné plus haut, Tania participe, tout comme sa soeur, aux dépenses alimentaires du foyer. Pour le mois de décembre, elle a réglé un peu plus de 400 €.
« En général, je fais mes courses en grande surface car c’est souvent beaucoup moins cher qu’ailleurs.
Pour moi, le rapport qualité/prix est important. Je veux privilégier la qualité mais ce n’est pas toujours facile pour diverses raisons (prix, disponibilité,…). »
Pour se nourrir lorsqu’elle est sur le campus, Tania se rend au resto U et quand elle travaille, elle apporte son repas ou mange dehors. Cela lui revient à 30 € par mois environ.
« Je ne suis pas du genre à manger en extérieur, je n’aime pas forcément le faire. À part de temps en temps pour le boulot. J’essaie de manger avant de sortir quelque part et/ou d’avoir de quoi manger sur moi et une bouteille d’eau pour éviter d’acheter quoi que ce soit. Ça peut arriver que j’achète quand même quelque chose à manger selon les circonstances, un sandwich ou un repas. Cela me revient, normalement, à moins de 50 €. »
Autre dépense prise en charge par Tania : les soins aux deux chats de la maison. Pour leur nourriture et la litière, elle paye environ 40 € par mois.
Ses dépenses dites « féminines » sont estimées à moins de 100 € mensuels et concernent principalement des protections hygiéniques (10 à 20 €), des soins corporels (pour le visage) et capillaires (shampoing, démêlant).
Enfin, dernière dépense pour Tania, mais pas la plus anecdotique : un don de 25,19 € à l’organisation missionnaire et humanitaire chrétienne indépendante GFA world (Gospel for Asia) pour parrainer un enfant à l’étranger.
Les loisirs de Tania
Tania avoue ne pas avoir beaucoup de loisirs payants, hormis l’achat occasionnel d’un livre et de feutres. Soit environ 30 € par mois maximum.
« Les loisirs ne sont pas importants, je n’en ai pas qui requiert des dépenses régulières. Je ne vais pas du tout au cinéma et je ne suis pas inscrite sur une plateforme de streaming type Netflix. Il m’est arrivé de regarder un film ou une série via un compte tiers mais j’essaie de m’en tenir aux grandes vacances car c’est une source de distraction. »
En revanche, il lui arrive d’acheter des vêtements même si, de son propre aveu, il est difficile pour elle d’en trouver qui correspondent à ses critères : confort, matière, prix, goûts personnels… Pour trouver son bonheur, elle se rend dans des magasins du centre-ville de Fort-de-France comme Pimkie, Safari way ou encore Platinium, plus rarement à la Galleria, un grand centre commercial situé au Lamentin.
« Par exemple, j’ai trouvé deux belles robes pendant les soldes en novembre dernier, 7 € chacune, totalement mon style. J’aurais pu m’en tenir à cela mais j’ai également acheté des petits hauts plutôt sympas et 3 pantalons à 25 € la pièce et un autre en solde à 7 €, mais j’avoue que je n’aime pas ces pantalons. J’ai voulu varier mais j’aurais dû m’en tenir à mon ‘confort, matière, prix et goûts personnels’. En novembre, j’ai donc dépensé approximativement 130 € en vêtements. »
L’épargne de Tania et ses projets d’avenir
Tania dispose d’un compte épargne sur lequel elle met de côté la totalité de sa bourse étudiante (633 € par mois) et environ 400 € de son salaire.
« J’essaye de m’y tenir mais il arrive qu’il y ait des imprévus (médecin, dépassement des sommes envisagées…). S’il me reste de l’argent sur mon compte en fin de mois quand je reçois mon nouveau salaire, je l’économise aussi, je ne le laisse pas sur mon compte. »
Pour la jeune femme, c’est important de pouvoir épargner chaque mois, aussi essaye-t-elle de « le faire correctement ».
« Le fait d’avoir peu de charges n’est pas une raison pour dépenser sans compter. Il faut penser à plus tard (imprévus plus ou moins importants, projets potentiels …). De plus, faire des économies n’est pas exclusivement une question d’argent, mais également un moyen d’apprendre la discipline, la sagesse. La gestion ne s’arrête pas à l’argent. »
Malgré sa belle épargne, Tania aimerait pourtant dépenser encore moins.
« Je regarde mes relevés de comptes et, que ce soit pour des dépenses quotidiennes ou occasionnelles, je pense que je peux les réduire. Ce sont les petits détails qui, accumulés, finissent par devenir de grosses dépenses en fin de mois. Je pense que je dois être plus rigoureuse à ce niveau. »
Tania aimerait d’ailleurs « investir dans des protections périodiques réutilisables, faire pousser des plantes, des fruits etc. Cela serait bénéfique pour ma santé, mon budget et bien entendu pour la planète ».
Merci à Tania de nous avoir ouvert ses comptes !
Pour témoigner sur Madmoizelle, écrivez-nous à :
[email protected]
On a hâte de vous lire !
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires
@alice-louve L'EN est vraiment en galère de prof. Vraiment. Et l'EN ne veut vraiment pas augmenter les profs ou leur créer des conditions de travail plus acceptables (du genre 15 élèves et pas 30), ce qui pourtant pourrait contribuer à rendre le métier plus attractif.
Je suppose que l'EN a versé une enveloppe à chaque rectorat qui pourra l'utiliser à recruter ces étudiants via ce dispositif. Et quand il n'y a plus d'argent, il n'y a plus d'argent, d'où le fait qu'il faille donner sa candidature et que les profils les plus précaires seront favorisés.
Si ça marche trop bien et que l'état veut faire des économies, suffira juste de réduire sa dotation aux rectorats. (mais ça c'est de la supputation de ma part).
Par contre par rapport aux études de médecine ou polytechnique, la grosse différence c'est la date du concours: en médecine c'est en première année et une fois qu'on l'a eu, on est sur de finir médecin si on ne fait pas n'importe quoi (c'est juste la spécialité qui variera). Les mairies peuvent subventionner, elles savent que leur étudiant va finir par être médecin.
J'ai l'impression que pour polytech c'est pareil: le concours est à l'entrée.
Par contre pour le concours de prof il est tout à la fin des études et il est dur à obtenir (en histoire géo c'est 17%, aka le même pourcentage qu'en médecine quand on a un bac S mention très bien). Ca serait dégueulasse de dire à ces jeunes: si vous n'avez pas votre concours vous devez tout rembourser. Vla la pression.