En partenariat avec UGC Distribution (notre Manifeste)
Mymy est tombée amoureuse du film Bonhomme, en salles ce 29 août, avec Nicolas Duvauchelle et Ana Girardot.
Le héros, Piotr, a un accident et se retrouve incapable d’être autonome. Sa compagne, Marilyn, décide de se consacrer entièrement à lui… devenant, par la force des choses, une sorte d’infirmière.
Mymy s’est donc appuyée sur le merveilleux article de Queen Camille, à lire ci-dessous, pour t’expliquer en vidéo ce qu’est le syndrome de l’infirmière !
Le 20 mars 2018
Il y a un truc qui a longtemps marché sur moi : le SOS beau gosse en détresse.
Tu es un beau gosse ? Tu as des soucis que tu ne comptes pas régler ? Pas de problème, mettons-nous en couple, je vais le faire à ta place !
Je gère tout toute seule et c’est épuisant
Ainsi, j’ai vécu dernièrement une belle relation co-dépendante en toute sérénité. Et puis un jour, je me suis réveillée, épuisée.
Quand j’ai rencontré ce mec, il n’avait pas d’appart, pas de compte en banque, pas de permis. Mais surtout il me plaisait beaucoup, il était drôle et gentil et toujours là pour moi. Bon, de fait il vivait chez moi, donc il était effectivement toujours là.
Au cours de cette chouette histoire (car tout n’était pas pourri tout de même), j’ai souvent eu la sensation de tout porter à bout de bras. En général, j’encaissais puis je pétais un câble, il prenait de bonnes résolutions et c’était reparti pour un tour.
Après plusieurs années à ce rythme, j’ai pris du recul, tout à coup. Comme si la saison 2 de ma relation venait de sortir et que je binge-watchais ça en une demi-seconde. Il n’y a pas eu d’élément déclencheur, juste une grande fatigue qui m’a poussé à faire un mini petit pas de côté dans ma tête.
Tout s’éclaire
J’ai vu les choses sous un tout angle. Notre relation était déséquilibrée et j’y jouais le rôle de la locomotive, de l’infirmière, de l’assistante sociale. Je donne à cette personne un soutien qui me coûte beaucoup, quand elle ne peut assurer le minimum de backup dont j’ai pourtant besoin.
La psychologue et psychothérapeute Jeanne Siaud-Facchin m’a expliqué comment je me suis retrouvée dans ce rôle :
« Ce qui est en jeu, c’est un triangle relationnel adulte/parent/enfant. Selon les moments de nos vies, on passe d’une position à une autre :
- Le parent qui aide, prend les décisions, accompagne et montre le chemin, soit l’équivalent du sauveur, de l’infirmière
- L’enfant qui a besoin de protection, d’aide, de se plaindre
- L’adulte, indépendant et autonome, là où nous sommes à notre place, dans les moments les plus sereins
Ces rôles peuvent être épousés par les hommes comme les femmes, mais cela ne s’exprime pas de la même façon.
Les femmes sont plus dans l’émotionnel, la tendresse, une protection de type maternel.
Les hommes se mettent plutôt dans un modèle de soutien familial, un rôle de protecteur aux épaules larges. C’est une autre façon de se placer dans une position de sauveur. »
Margot raconte comment elle endossait ponctuellement le rôle du parent dans sa relation amoureuse :
En vivant avec mon mec, je me suis rendu compte qu’il était clairement mal à l’aise avec l’idée de s’acheter des fringues. Il le vivait comme une véritable torture. Alors je suis rapidement devenue sa mère à ce niveau-là. Au début, ça me faisait plaisir de l’accompagner faire du shopping, même si je n’aime pas le shopping pour moi de base.
Mais comme il détestait ça, c’est vite devenu une obligation, un moment pas toujours cool, voire même désagréable… Pour autant, j’avais « une mission », encouragée par mes copines qui répétaient souvent que depuis que j’étais avec lui, il se sapait sacrément mieux.
J’ai un peu arrêté aujourd’hui parce qu’on vit moins ensemble, et aussi parce qu’il fait un peu plus attention à s’autogérer à ce sujet.
Il est possible de passer d’un rôle à l’autre dans la même journée. C’est quand la situation est figée dans un modèle de fonctionnement que les choses se gâtent. mais l’exemple de Margot montre tout de même la difficulté à aider les autres contre leur volonté, malgré tout l’enthousiasme qui nous pousse à le faire.
Quand je me suis rendu compte que mon soutien maintenait mon mec dans la dépendance, j’ai aussi réalisé que ce mode de fonctionnement avait émoussé toute ma confiance en lui et ne l’aidait pas du tout à bâtir la sienne. J’ai mis fin à notre relation.
Pourquoi je ne tombe que sur des mecs à problèmes ?
Comme dans les histoires d’adultère, tout le monde est au courant, sauf l’intéressée. La situation sur laquelle je venais d’ouvrir les yeux était limpide depuis longtemps pour mon entourage.
C’est toujours mon moment préféré des ruptures, quand les langues se délient. Tu le largues ? Encore mieux. Pour tes potes et ta famille, c’est le top départ de la vraie honnêteté bien cash. Car ce n’est pas toujours possible de parler franchement à un proche aveuglé d’amour, mais nous y reviendrons dans un prochain article !
En réalité, mon entourage ne s’est pas lâché sur mon ex. Leurs remarques désolées ou outrées s’adressaient plutôt à moi : comment avais-je pu me retrouver dans un telle situation ?
Je suis indépendante, je suis cultivée… Je ne devrais pas être coincée dans une relation qui m’empêche d’avancer, voyons !
Pourtant, quand je me retourne sur l’historique de mes amours, le pattern crève les ieuz : j’aime jouer le rôle de l’infirmière. Je suis donc atteinte du syndrome de l’infirmière.
Me voiciiii
Perdu dans leur orientation professionnelle, phobique administratif, angoissé, dépendant financièrement… Ce n’est pas conscient,
j’ai rarement eu l’impression de choisir un partenaire sur son potentiel de cassos’ ou de fuckboy. Mais le fait est.
Le syndrome de l’infirmière, mais oui !
C’est un schéma que Mymy a vu se répéter dans sa vie amoureuse aussi :
Le syndrome de l’infirmière, c’est l’histoire de ma vie. J’ai toujours eu tendance à tomber amoureuse de mecs pétés, pas bien dans leur peau, en détresse…
Je pense que ça venait beaucoup de mes propres insécurités. Je ne me trouvais pas très jolie, clairement pas la star du lycée, j’étais timide, un peu bizarre. Jamais je n’aurais osé m’approcher des mecs super populaires, super mignons.
Alors je tombais amoureuse des autres, de ceux qui fument des roulées au fond du préau et qui lisent des romans russes plutôt que d’aller au foot.
En soi, pourquoi pas : un couple de « marginaux » (toutes proportions gardées) un peu atypiques et pas hyper sociables, ça peut être un truc qui marche !
Mais en réalité, la dynamique n’était pas « On est tous les deux chelou / cassés / fragiles / effrayés, autant le vivre pleinement ».
Je me retrouvais rapidement dans un rôle d’infirmière, de mentor, habitée par l’espoir de « réparer » ces garçons que j’aimais follement, et qui avaient simplement « besoin d’un petit coup de main ».
Comme Mymy, ce qui me manquait pour stopper l’engrenage, réagir, affirmer que ça ne convenait plus, je te le donne en mille : c’était la confiance en moi.
Et puis, la fragilité, c’est sexy. Un homme face à son destin, que tu pécho dans le creux de la vague de sa vie, qui va devoir faire des choix et se battre, ça fait un excellent héros aussi.
Ce n’est pas le jeune et maladroit Hercule d’avant son entraînement avec Philoctète qui me contredira. De zéro en héros, c’est ça le fantasme en filigrane sous le choix de ces partenaires dont personne ne voit le potentiel sauf moi.
La perspective d’un combat à mener et l’idée d’une transformation victorieuse à laquelle j’aurais participé, là ça me vend carrément du rêve. T’es plus que mon mec, t’es mon champion.
Ce qui fait de moi par la même occasion, une véritable dénicheuse de talent aux talents de coach insoupçonnés, capable de sculpter les pierres brutes pour révéler tout leur éclat. C’est valorisant.
Bref, j’ai tendance à voir mon partenaire pour ce qu’il pourrait être, et non ce qu’il est vraiment. Ça fonctionne jusqu’à ce que je réalise que non, c’est juste un mec en fait.
Un mec avec des problèmes, qui procrastine et qui galère à se prendre en main.
Je pourrais me tourner vers le modèle de l’homme viril, capitaine du bateau, qui ne s’embarrasse pas du doute et qui sait exactement où il va (car il sait lire une carte, lui). Mais ce genre de mecs accomplis, fiables, rassurants n’a pas besoin de moi… Peut-être que jouer l’infirmière, c’est surtout un moyen de flatter mon ego, de me sentir utile, voire indispensable ?
Peut-être est-ce aussi un moyen inconscient de travailler sur mes propres faiblesses ?
Pour Jeanne Siaud-Facchin, adopter la place du parent de manière récurrente nous renvoie à notre propre sentiment de vulnérabilité :
« On a l’impression que notre place est de soutenir les autres, de leur tenir la main.
On a l’illusion que ça aide les autres à vivre alors que ça les maintient dans la dépendance.
En même temps, on se donne aussi l’illusion que les autres ont besoin de nous. Cela crée des liens de subordination réciproque, c’est un cercle vicieux. »
La femme douce et attentive comme une infirmière, un must
Mais plutôt que de travailler sur moi-même, je préfère pointer les torts de notre bonne vieille société patriarcale.
Peut-être que je joue à l’infirmière dans mon couple parce que c’est tout ce qu’on m’a appris à faire ? M’occuper des autres, écouter leurs problèmes, arrondir les angles, être au service de la communauté, de la famille, bref m’oublier au profit du bien-être des autres : c’est pas la base de mon éducation genrée par hasard ?
Il existerait une vraie complaisance féminine à l’égard des faibles. Lois P. Frankel décrit cette tendance, qui s’immisce jusque dans le milieu professionnel, dans son livre « Ces filles sympas qui sabotent leur carrière » (Marabout) :
« Je ne sais quel phénomène étrange lie les femmes et les minables. Non seulement, nous les attirons davantage que les hommes, mais ils s’agglutinent à nous comme à du papier tue-mouches.
Dans notre propension à éviter de blesser autrui, nous nous laissons envahir par eux, nous prenons leurs erreurs à notre compte quand nous ne nous excusons pas de leur mauvaise conduite. »
Comment sortir de ces schémas ancrés au tréfonds de nous-mêmes ? Pourquoi pas revenir à la base et s’aimer un peu beaucoup, propose Jeanne Siaud-Facchin :
« C’est une erreur contre-intuitive de penser qu’il faut se sacrifier pour prendre soin des autres.
On s’enferme ensuite dans des relations en pensant qu’elles vont nourrir notre besoin d’amour. Mais c’est quand l’amour vient de nous-même, de l’intérieur, que l’on peut être en lien authentique avec les autres et les soutenir au mieux.
Plutôt que d’aller chercher à l’extérieur, il faut revenir à l’amour de soi : se faire confiance, croire en nos propres capacités, avoir la foi qu’il y a en nous les ressources nécessaires pour se confronter aux difficultés de la vie quelles qu’elles soient. »
Pour éviter le burn out qui plane au-dessus de ce rôle de mère courage épuisant, on peut donc se rappeler simplement qu’on mérite ce qu’il y a de mieux.
Mymy a réussi à briser le schéma grâce à son amoureux inattendu.
À force de me brûler les ailes et de m’épuiser à tenter de « guérir » mes mecs, j’ai appris plusieurs choses :
- Tu peux pas faire le bonheur des gens malgré eux. Il y a une immense différence entre un homme qui me dit « J’ai tel problème, tu peux me soutenir pendant que j’essaie de le résoudre ? » et un qui refuse de regarder ses problèmes en face.
- Tu peux pas décider que quelqu’un doit être « réparé ». Certains de mes mecs n’ont jamais changé, et le vivent très bien. C’est moi qui leur ai appliqué MON idée de ce qu’« être épanoui » voulait dire. J’avais tort.
- Tu peux pas être à la fois la meuf et la psy. Échanger, partager, c’est très important. Mais il y a des limites. Psy, c’est probablement pas ton métier, et si ça l’était, ton mec ne serait pas ton patient, car les lignes sont trop vite brouillées.
- Tes problèmes comptent, même s’ils te semblent « moins importants ». À force de m’échiner à « soigner » mon copain déprimé 24h/24, je n’osais même plus évoquer mes soucis. Ce qui n’est pas sain : la relation va à sens unique !
J’ai demandé à Jeanne Siaud-Facchin si je pouvais trouver mon salut en essayant d’être toujours dans le rôle de l’adulte, celui de l’indépendance et de l’autonomie. Comme ça je pourrais trouver quelqu’un qui joue aussi le rôle de l’adulte et nous serions ainsi deux adultes si équilibrés et heureux.
J’ai déchanté :
« Être deux adultes n’est pas forcément la solution. C’est important parfois d’être dans notre vulnérabilité d’enfant, et d’être celui qui protège à d’autres moments.
L’équilibre, c’est que la place adulte laisse aussi le parent et l’enfant jouer des partitions de nos vies. Sinon on s’emmerde, c’est comme un film sans rebondissements ! »
La psychothérapeute souligne aussi qu’il est possible d’aider les autres en dehors de la relation d’amour. Fallait y penser :
« On peut avoir besoin d’aider les autres au sens large, et le faire dans le domaine professionnel par exemple, en les aidant à mieux vivre. On est alors dans un engagement humain et non affectif, qui ne crée pas de dépendance. »
Donc j’espère que cet article vous aura aidé fort et qu’on deviendra pas trop accro, vous et moi… Je vais de ce pas prendre extrêmement bien prendre soin de moi-même, car ça je sais faire, ça marche et je me dis merci à la fin !
Et vous, vous avez déjà expérimenté le syndrome de l’infirmière en couple ou ailleurs ?
À lire aussi : Comment je suis devenue la mère de mon mec — Carnet de Rupture #2
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires
Je pense que c'est à partir du moment ou on s'oublie dans la relation qu'in y a un problème, quand on est plus capable d'exprimer ses propres besoins car on est trop préoccupé par l'autre voire qu'on minimise ses propre soucis tout en oubliant que l'autre est aussi capable de nous soutenir et de prendre soin de nous.
Cela m'est arrivé il y a peu de temps, dans un contexte particulier. Je suis en couple depuis longtemps et mon amoureux a du faire face à une maladie chronique invalidante et très douloureuse (il se remet). Les choses on empiré petit à petit car je voulais prendre soin de lui, il me semblai vulnérable et je voulais le protéger. Je ne m'en suis pas rendue compte, bien que mes amies on essayé de me faire prendre du recul.
Malgrés la situation, j'ai décidé de faire un stage Erasmus de trois mois (il m'y a beaucoup encouragé). Au début je m'inquiétais tout le temps à propos de mon compagnon et il m'a fallut bien un mois pour réailiser qu'il se débrouillais très bien seul et que j'avais inconscienment entretenu une situation de dépendance en étant trop "au petits soins" (lui a reconnu s'être laissé prendre au rôle du patient).
Cette sépration nous a finalement permis de nous rendre compte de la situation et de retrouver notre indépendance, de reprendre notre relation sur des bases saines. Et je ne sais pas si il y a un lien de cause à effet, mais depuis il va beaucoup mieux.
Depuis cet épisode je fait attention à mes besoins et les exprimer clairement. A ne pas faire passer les besoins de mon compagnon avant les miens et surtout je garde en tête que je doit le laisser se démerder sauf s'il me demande de l'aide.