Depuis maintenant presque dix ans, mes hivers sont rythmés par le réveil d’un phénomène fort sympathique (non), j’ai nommé le syndrome de Raynaud.
J’ai décidé de parler de ce syndrome parce qu’il est plus répandu chez les femmes et encore peu voire mal traité.
À lire aussi : J’ai 20 ans et la maladie de Crohn
Quand le syndrome de Raynaud s’installe en traître
Mon syndrome de Raynaud est apparu de manière très discrète : vers mes 15 ans, j’ai commencé à être plus sensible au froid qu’avant, plus que les autres aussi.
Rester un peu trop longtemps exposée au froid (une demi-heure dehors en hiver par exemple) faisait disparaître toute trace de couleur de mes mains et de mes pieds.
C’est en fait le sang qui cessait quasiment d’arriver jusque-là !
Rien de bien grave, ni de bien douloureux, juste un aspect esthétique très bof qui faisait marrer les copines, qui appelaient ça des « mains de morte »…
Bon, c’était pas la meilleure vanne qui soit.
Moi par -2°C.
Assez vite, ces mains et pieds tous blancs se sont parés de bosses rouges qui démangent très fort.
Mon médecin habituel les a identifiées comme des engelures (spoiler alert : c’était pas ça), et m’a prescrit une sorte de remède de grand-mère, du Vegebom, censé calmer les démangeaisons.
C’était gras, ça sentait fort les plantes… et l’efficacité était proche de zéro. Mais jusque-là, c’était quand même plutôt supportable.
La maladie de Raynaud et le syndrome de Raynaud sont deux pathologies différentes.
La maladie, la forme primaire de Raynaud, se résorbe généralement d’elle-même. Les raisons et les causes de la maladie sont encore inconnues.
Le syndrome de Raynaud, ou phénomène de Raynaud, est plus rare que la maladie mais susceptible d’être plus grave. Il peut être causé par des maladies qui touchent les vaisseaux sanguins.
Quand le syndrome de Raynaud empire
Ça aurait pu en rester là, car c’est souvent le cas pour le syndrome de Raynaud…
Mais pour moi, ça a plutôt empiré ! Après quelques années comme cela, ma sensibilité au froid s’est encore accrue.
Désormais, il me suffisait d’une dizaine de minutes exposée au « froid » (entre 10 et 15°C, ça suffit) pour que les symptômes ci-dessus apparaissent, malgré un équipement digne d’une ascension de l’Everest.
Dans les pires moments, en plein hiver, je ne pouvais quasiment plus marcher tant mes orteils et talons étaient douloureux…
À peu près ma tenue dès qu’on passe sous la barre des 15°C.
Me mettre au chaud ne résolvait pas le problème : trop dilatés par la chaleur, mes vaisseaux sanguins n’arrivaient pas à gérer l’afflux de sang, et provoquaient le problème inverse.
Mes doigts se retrouvaient alors gonflés, rouges, avec le sang battant douloureusement dedans…
Un peu comme quand tu joues dans la neige et que tu passes tes mains sous une eau à 30°C juste après — sauf que moi, c’était tout le temps, et peu importe la variation de température !
Au point que durant les pires « crises », je ne pouvais plus plier les doigts, ni rien toucher sans que ce ne soit très, très douloureux.
Pas hyper pratique pour une étudiante, qui a besoin de ses doigts pour, je sais pas, ÉCRIRE !!
Conclusion : dans le froid, j’avais mal car mes vaisseaux rétractés se vidaient de leur sang ; dans le chaud, j’avais mal car le sang arrivait trop fort.
Et ça, pendant quasiment 6 mois de l’année.
Est-ce que je craquais ? Oh oui.
En quête d’une solution contre le syndrome de Raynaud
J’ai donc fait le tour de plusieurs médecins généralistes, dermatologues, pharmaciens et même cardiologues, ce qui a permis d’identifier mon problème comme ce petit fourbe de syndrome de Raynaud.
En gros, le syndrome de Raynaud est bénin : il s’agit d’une réaction vasculaire au froid, qui fait que tu douilles sévère, tu souffres dès que tu es en contact avec celui-ci.
Au fil de ces consultations, j’ai essayé un certain nombre de crèmes (inefficaces) et traitements.
Enfin ça, c’était quand on voulait bien me prescrire quelque chose, car la plupart du temps, la réponse était : « Mais il faut mettre des gants, mademoiselle ! ».
Quelle bonne idée, moi qui sortais en maillot de bain en février !
Comment traiter le syndrome de Raynaud ?
Les traitements, parlons-en : beaucoup de praticiens m’ont répondu qu’il n’en existait tout simplement pas.
Une dermatologue a fini par me prescrire un vasodilatateur (une substance qui permet de dilater les vaisseaux sanguins) qui s’apparentait à un traitement de cheval.
Étant un petit gabarit, je n’ai absolument pas supporté : vertiges et palpitations ont été mon quotidien pendant deux semaines, puis j’ai dû arrêter et revenir à mes chers mains et pieds complètement bousillés.
Ç’a été la seule et unique proposition de traitement que l’on m’a faite avant longtemps…
Et soudain, une solution pour pallier le syndrome de Raynaud
Et puis, l’hiver dernier, mon Raynaud a été particulièrement violent.
Psychologiquement, je n’en pouvais juste plus : j’avais mal 24h/24, je ne pouvais rien toucher sans douleurs vraiment très fortes, je n’étais jamais bien, peu importe la température ambiante ou mes vêtements…
Quand les douleurs étaient trop fortes, ça finissait en crises de larmes d’épuisement (gros, gros big up d’ailleurs à mon petit ami, qui a supporté tout ça pendant plusieurs années et qui a toujours été adorable et compréhensif !).
Bref, il était plus que temps de trouver une solution.
Sur les conseils de mon cher papa, j’ai alors demandé de l’aide à l’association des sclérodermiques de France.
En effet, à ce moment-là, mon Raynaud était si fort qu’on se demandait si cela ne cachait pas finalement une autre maladie…
L’association m’a conseillé de consulter en médecine interne des Hôpitaux de Paris, spécialisés dans la question.
Un rendez-vous chez un nouveau médecin généraliste plus tard, j’avais ma lettre de demande de consultation, et bientôt mon rendez-vous.
Bien sûr, les délais étant ce qu’ils sont, j’ai dû attendre le mois de juillet pour cette consultation, et j’ai donc quand même bien morflé tout l’hiver…
Le tant attendu rendez-vous chez le médecin
Lors de ce rendez-vous, le médecin a réalisé plusieurs examens, dont une capillaroscopie (un examen médical visant à examiner au microscope les petits vaisseaux sanguins au niveau des ongles et des cuticules).
C’était une procédure apparemment déterminante pour savoir s’il s’agissait d’une maladie comme la sclérodermie ou non.
N’étant pas du tout dans le milieu médical, je ne développe pas plus pour ne pas écrire d’énormités !
Quoi qu’il en soit, l’hypothèse d’une quelconque maladie vasculaire a très vite été écartée.
Ce que j’avais, c’était bien un syndrome de Raynaud, mais un Raynaud « cogné » (je ne sais toujours pas si ce terme est vraiment médical ou si c’est juste une expression de ce médecin, merci de ne pas se moquer).
Ce que ça voulait dire, très concrètement, c’était :
- Que bien que bénin, mon Raynaud était en effet très violent, et donc enfin reconnu comme handicapant. C’est peut-être rien aux yeux de beaucoup, mais enfin s’entendre dire qu’on a raison de se plaindre parce que c’est effectivement très douloureux, et qu’on est pas juste une « chochotte », et bien ça fait du bien.
- Qu’il existait bien des traitements ! Ce fameux vasodilatateur que j’avais essayé n’était simplement pas adapté à ma morphologie, mais c’était loin d’être la seule solution.
Je suis donc repartie avec une ordonnance pour un nouveau traitement, à essayer l’hiver suivant, soit en ce moment même.
À lire aussi : J’ai la maladie de Takayasu, une maladie orpheline
Moi : 1, mon syndrome de Raynaud : 0
Aujourd’hui, cela fait un peu plus de deux mois que je suis ce traitement, l’Amlodipine, qui agit en faisant diminuer la tension.
Les contraintes sont très supportables : il suffit d’un comprimé par jour, et les effets indésirables (quelques vertiges et nausées) ne se font sentir que quand je suis vraiment fatiguée.
Pour les effets attendus… Je revis !
Alors que je suis habituellement déjà en PLS dès qu’il s’agit de mettre le nez dehors, je ne subis actuellement pas plus le froid que n’importe qui d’autre.
Mes pieds et mes mains gèlent un peu, mais cela ne fait pas mal, et cela disparaît toujours sans douleur dès que je reviens au chaud.
En terme de visuel, j’ai bien quelques-unes de ces fameuses bosses rouges qui tentent d’apparaître, mais elles semblent bloquées au stade d’un affleurement totalement indolore.
En ce moment, il gèle depuis 3 jours chez moi (enfin dehors, pas dans mon appart hein), et toujours aucun problème.
Autant vous dire que ma vision de l’hiver a radicalement changé : pouvoir sortir sans que cela ne soit une source de souffrance, ça change la vie !
Quand je me rends compte que je n’ai pas mal alors qu’il fait -2°C.
En conclusion, si je voulais partager avec vous cette histoire, c’est tout simplement parce que ça m’aurait sans doute aidée de lire ce genre de témoignage au moment où ça n’allait vraiment pas, l’année dernière ou celles qui ont précédé.
Le syndrome de Raynaud est assez fréquent, surtout chez les femmes à partir de la puberté, mais il n’est pas toujours identifié comme tel, et surtout, il peut être sous-estimé.
En effet, ce n’est pas parce que c’est une affection bénigne qu’elle n’est pas handicapante.
Toute douleur a le droit d’être reconnue, et des solutions existent souvent. Alors, espoir et amour sur vous !
À lire aussi : J’ai la drépanocytose, la maladie génétique la plus répandue et pourtant si mal connue
Pour témoigner sur Madmoizelle, écrivez-nous à :
[email protected]
On a hâte de vous lire !
Vous aimez nos articles ? Vous adorerez nos newsletters ! Abonnez-vous gratuitement sur cette page.
Les Commentaires
Alors je sais pas bien pourquoi les gens font ça, mais je compatis à tout. Je compatis avec ceux et celles qui ont un Raynaud, primaire ou secondaire, ou une autre maladie, déjà diagnostiquée ou pas encore tout à fait, je compatis avec ceux et celles qui sont confrontés à leurs amis qui pensent qu'ils sont médecins, ou qui savent, et avec ceux et celles qui sont confrontés à des gens qui ne comprennent pas que parfois, quand quelqu'un vous donne une réponse évasive, c'est que peut-être l'individu n'a pas envie d'étaler son dossier médical ou recevoir des conseils de grand-mère.