SWEAT raconte l’histoire de Sylwia, une coach fitness influenceuse suivie par 600 000 personnes sur son compte Instagram. Elle est adulée de ses abonnés et des marques. Mais malgré la célébrité, elle souffre d’une profonde solitude.
Si SWEAT donnait envie, c’est qu’on s’attendait à ce qu’il explore l’envers de nos feed Instagram, les coulisses des stories vues par des milliers de personnes et des meet-up géants.
Surtout, il apparaissait comme une belle occasion de questionner la complexité de la relation entre une influenceuse et ses abonnés. Malheureusement, on ne retrouve pas grand-chose de ce programme dans le film de Magnus Von Horn.
La solitude de l’influenceuse
Le récit se fixe sur trois jours dans la vie de Sylwia. Au tout début du film, on découvre une jeune femme remplie d’une énergie euphorisante. Rayonnante, elle saute, court et crie, animant à elle seule une séance de fitness à laquelle participe une foule d’abonnés venus s’entraîner avec leur idole.
Mais quand l’évènement se termine, c’est seule que la coach rentre en loge. À partir de ce moment et jusqu’à la fin, le film prend une tout autre tournure. Pendant 1h45, Silwya est presque toujours silencieuse et seule. On découvre qu’elle n’a absolument aucune relation, pas même des amis.
Au cœur de la trame du film, il y a une agression. Du fait de cette expérience, l’influenceuse va éprouver sa solitude de façon encore plus douloureuse. Elle est victime d’un stalker exhibitionniste. L’homme ne cesse de la suivre en restant dans sa voiture. Jour et nuit, il observe la jeune femme, garé en bas de chez elle.
Des stéréotypes et une artificialité qui gâchent ce portrait
Le film semble alors aborder la question, nécessaire, des violences sexistes et sexuelles, qui concerne aussi le monde de l’influence. Le problème, c’est que ce personnage masculin est un pur stéréotype. Il incarne le cliché du « gros dégoutant qui se cache dans une voiture pour sauter sur les femmes. »
Le recours à ce stéréotype évacue la dimension systémique des violences sexistes et sexuelles. Il en fait l’apanage de quelques hommes qui seraient détraqués et marginaux, ce qui est d’autant plus souligné que la manière de s’exprimer de l’agresseur laisse entendre qu’il souffre d’un retard mental.
Pour ne rien arranger, une (trop) longue séquence montre Sylwia face à l’incompréhension de son entourage, en l’occurrence celle de sa mère, à laquelle elle rend visite. Quand elle lui raconte cette agression bouleversante, celle-ci réplique, d’une façon totalement absurde et irréaliste : « Tu le juges trop vite. Il est peut-être gentil. »
Un film sur les « exhibitionnistes émotionnels » : OK boomer ?
On se demande donc quel est le message de ce film rempli de longueurs et qui, après sa scène d’ouverture, parle à peine de fitness ou d’influence. En dehors des moments où il ne se passe rien, son héroïne se fait malmener par des personnages tellement caricaturaux qu’on y croit peu.
On s’interroge d’autant plus que vers la fin de SWEAT, une relation fondée sur le syndrome de Stockholm se noue entre Sylwia et le stalker. Pour une raison difficile à saisir, la jeune femme semble soudain prise d’affection pour l’agresseur. C’est en lisant les mots du réalisateur à propos du personnage de l’influenceuse qu’on comprend les significations de ce choix douteux :
Les exhibitionnistes émotionnels me fascinent, sans doute parce que je suis à l’opposé d’eux. Je garde mes émotions pour moi, je ne les partage que rarement, de peur d’être jugé.
Le réalisateur dresse ainsi un parallèle entre l’agresseur exhibitionniste au sens propre, et l’influenceuse, qui serait une « exhibitionniste émotionnelle ». Il tombe alors dans un discours problématique qui réduit le métier d’influenceuse à une sorte de pathologie.
En définitive, malgré le talent immense de l’actrice Magdalena Koleśnik, SWEAT rate le coche et échoue sur les deux tableaux. Il ne parvient ni à parler avec pertinence de l’influence, ni à dresser le portrait d’une femme seule et confrontée à un harceleur.
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Crédit Image à la Une : © Lava films
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