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Stoya accuse son ex, James Deen, de viol… et moi, je la crois [Mise à jour]

Stoya a joué dans plusieurs films pornographiques aux côtés de James Deen, qui fut également son compagnon à la ville. Elle l’a accusé publiquement de viol sur Twitter.

Le 1er décembre 2015 — L’industrie du porno se mobilise après que plusieurs actrices ont accusé le célèbre acteur James Deen de viol et d’agression sexuelle (lire plus bas). L’immense studio spécialisé dans le BDSM Kink a notamment cessé de travailler avec l’accusé (qui y a tourné 237 films) et s’explique dans un communiqué paru chez BuzzFeed :

« Pour la communauté Kink, et plus largement pour l’ensemble de la communauté BDSM, le consentement et le respect sont sacrés. Kink coupe dès maintenant tous ses liens avec James Deen, en tant qu’acteur comme en tant que producteur.

Nos employé•e•s méritent de tourner en toute sécurité, sans craindre d’être agressé•e•s. Le viol, l’agression sexuelle, avec ou sans safeword, sur le tournage ou en-dehors, ne devrait jamais être un risque à prendre en compte quand on produit un film pour adultes. Bien des accusations envers James Deen sont récentes, mais on discerne un schéma alarmant. Dans les semaines et les mois à venir, nous allons revoir notre « Model Bill of Rights » pour renforcer les droits des acteurs et actrices en-dehors des tournages, et travailler avec le reste du milieu pour aider les victimes d’agression à prendre la parole plus facilement. »

John Stagliano, PDG du studio Evil Angel qui produit également des films X, s’est lui aussi exprimé, toujours chez BuzzFeed :

« Au vu des accusations récentes envers James Deen, Evil Angel a décidé de ne plus tourner de nouvelles productions avec lui. Notre entreprise met en avant du sexe, certes agressif et brutal, mais en mettant l’emphase sur le consentement et l’exploration. Ces accusations vont à l’encontre de nos valeurs et il nous semble nécessaire de suspendre les productions dans l’attente de nouvelles informations. »

Hier, le lundi 30 novembre, James Deen a démissionné de l’APAC, l’Adult Performer Advocacy Committee (Comité pour la défense des acteurs pour adultes), un syndicat dont il faisait partie en tant que membre du conseil de direction. La secrétaire de l’APAC, Ela Darling, a déclaré à Xbiz :

« L’APAC considère tout à fait sérieusement les déclarations des actrices, qui indiquent un conflit majeur entre un membre du conseil de direction et d’autres membres de l’organisation.

L’APAC va continuer à fournir conseils et soutien aux acteurs/actrices porno. Le conseil de direction tient à dire que nous soutenons les actrices, acteurs et autres travailleurs du sexe qui sont victimes d’agression sexuelle sous toutes ses formes. L’APAC est un endroit sûr pour les employé•e•s, et vise à rendre le milieu plus sain. »

Le 30 novembre 2015 — Il y a six mois, je publiais sur madmoiZelle un article sur James Deen, que j’appelais « l’acteur porno le plus cool du monde » ; c’était celui qui m’a pas mal réconciliée avec les films X, celui avec qui j’aurais bien brunché un dimanche sur deux. Je ressens également un amour sans bornes pour Stoya, qui a joué dans plusieurs métrages à ses côtés et que j’admire énormément, notamment pour ses réflexions féministes, les projets passionnants auxquels elle participe et globalement son attitude générale qui respire l’intelligence et la sympathie. Stoya et James Deen ont été en couple, comme elle l’a déclaré en 2013 au Huffington Post, mais sont à présent séparés.

Ce samedi 28 novembre, Stoya a posté deux tweets déplorant la popularité de James Deen et l’accusant de viol. Trigger warning : elle utilise des termes crus pour décrire l’agression.

https://twitter.com/stoya/status/670685987601825792

Ce moment où tu te connectes une seconde sur Internet et où tu vois des gens louer le féminisme du mec qui t’a violée. Ce moment de merde.

https://twitter.com/stoya/status/670689154498449413

James Deen m’a maintenue et baisée alors que je disais non, que je lui disais d’arrêter, que j’utilisais mon safeword. Impossible à présent d’acquiescer en souriant quand les gens parlent de lui.

Le safeword évoqué par Stoya, comme une madmoiZelle l’expliquait dans J’ai testé pour vous… le sado-masochisme, c’est ce terme-clef qui permet de séparer le « non » inclus dans un jeu et le « non » réel, qui veut vraiment dire « arrête, sérieusement ». Il est notamment utile dans les activités BDSM basées sur le contrôle (ou la perte de contrôle, justement). En temps normal, le safeword met immédiatement fin à la relation sexuelle. Continuer un rapport avec quelqu’un qui utilise son safeword, c’est du viol : le consentement n’est plus là, le refus est ignoré.

Aux dernières nouvelles, Stoya n’a pas porté plainte contre James Deen. Mais moi, malgré mon affection pour ce dernier, je la crois. Voici pourquoi.

Pourquoi ne pas porter plainte ?

À lire aussi : #Jenaipasportéplainte, le hashtag poignant sur Twitter

Rien n’indique que Stoya a porté plainte — ce que des individus peu polis ont tenu à lui signifier sur Twitter, en accompagnant généralement leur bon conseil juridique (non) d’insultes à son égard. Mais je peux comprendre pourquoi elle ne tient pas forcément à traîner James Deen en justice.

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Interlude tendresse.

Le viol conjugal est encore mal (re)connu. Il est souvent difficile de fournir des preuves (contrairement par exemple à un viol commis avec une personne qu’on ne fréquente pas de façon intime, et dont on peut retrouver des traces physiques via un examen médico-légal) ; on en arrive à une situation de « parole contre parole ». Le cas ici est particulièrement complexe puisque James Deen et Stoya avaient des relations sexuelles à la fois dans leur vie privée et dans un cadre professionnel.

À lire aussi : Agression sexuelle et dépôt de plainte : les conseils d’un policier

Quand on sait que de nombreuses plaintes pour viol sont reçues par l’indifférence, voire l’irrespect de la police, je peux comprendre que Stoya ne désire pas forcément se confronter à cette éventualité. Être actrice porno, c’est encore, en 2015, être en butte aux clichés, aux jugements gratuits de ceux et celles qui déprécient ce choix de carrière — qui n’a pourtant rien de honteux. C’est déjà difficile au quotidien, alors quand il s’agit d’une plainte pour viol…

À lire aussi : Une étudiante et actrice porno répond à ceux qui la harcèlent

En 2014 s’est tenu le procès de Jonathan Koppenhaver, un combattant de MMA (Mixed Martial Arts) accusé de viol et de tentative de meurtre par son ex-compagne, Christy Mack, qui était aussi actrice X. L’avocat de l’accusé a tenté de le défendre en arguant que la victime avait « un désir, une préférence, une acceptation de certaines activités sexuelles hors-normes ». Victime qui a frôlé la mort et s’est retrouvée à l’hôpital avec dix-huit os brisés, le nez cassé, une dent en moins, une côte fêlée et une grave blessure au foie… Preuve que quand on vit de sa sexualité, on est encore considéré•e trop souvent comme un•e sous-citoyen•ne.

Pourquoi Stoya mentirait-elle ?

James Deen est l’acteur porno le plus en vogue du moment, de loin. S’attaquer publiquement à lui, en le nommant et sans forcément aller jusqu’au tribunal, peut sonner le glas de la carrière de Stoya — en plus d’attirer beaucoup de haine venant de personnes qui feraient mieux de couper Internet jusqu’à environ la fin de leurs jours.

L’accusé a lui aussi utilisé Twitter pour répondre à l’actrice.

https://twitter.com/JamesDeen/status/671131836794331137

Des accusations monstrueuses ont été proférées à mon encontre sur les réseaux sociaux

https://twitter.com/JamesDeen/status/671131915773022209

Mes ami•e•s, mes fans, mes collègues : je vous assure que ces allégations sont fausses et constituent de la diffamation

https://twitter.com/JamesDeen/status/671131998535090176

Je respecte les femmes, je connais et respecte les limites, à la fois dans un cadre professionnel et dans ma vie privée

Il est peu probable que la carrière de James Deen s’interrompe alors qu’il est au top de la popularité et sort même du cadre « films pornographiques » — on l’a notamment vu dans The Canyons aux côtés de Lindsay Lohan. Stoya a potentiellement beaucoup à perdre dans cette affaire, et c’est pourquoi je ne partage pas l’avis de ceux et celles qui estiment qu’elle ment pour « faire les pieds à son ex ». Elle me semble être une personne bien trop intelligente pour mettre en péril tout ce qu’elle a construit simplement pour blesser un mec avec lequel elle a été en couple.

Stoya n’est pas seule

Quand la parole se libère, c’est un peu comme une brèche dans un barrage : souvent, d’autres suivent. C’est malheureusement le cas ici aussi, puisque plusieurs femmes ont témoigné à la suite du tweet de Stoya en disant avoir été agressées par James Deen.

C’est d’abord l’actrice porno Tori Lux qui a confié son histoire au Daily Beast, racontant que l’acteur l’a agressée pendant le tournage d’un film. En voici des extraits traduits (attention, là aussi c’est assez graphique).

« James ne tournait pas avec moi mais était présent sur le tournage. […] Je n’ai même pas eu le temps de me rhabiller qu’il m’a demandé, avec un rictus :

— Tori Lux, tu veux renifler mes testicules ?

J’ai répondu « non », gardant un visage neutre. […] Il m’a saisie par la gorge et m’a plaquée sur un matelas au sol. Il a enfourché ma poitrine en maintenant mes bras avec ses genoux. Puis il a levé sa main au-dessus de sa tête, l’a abattue et m’a frappée au visage et à la tête, paume ouverte. Il l’a fait cinq ou six fois, fort, avant de s’écarter enfin.

Désorientée, la mâchoire douloureuse, je me suis levée mais avant que je ne puisse reprendre mes esprits, il m’a attrapée par les cheveux et m’a mise à genoux, me forçant à coller mon visage à son entrejambe plusieurs fois avant de me repousser au sol. […]

On m’a demandé pourquoi je n’ai pas prévenu la police, pourquoi je n’en ai pas parlé en public. C’est parce que les gens, y compris la police, ont tendance à croire que les travailleuses du sexe ont choisi une filière dangereuse et qu’elles ne peuvent pas être victimes d’agressions. […] Même si le porno est une forme légale de travail sexuel, et se déroule dans un environnement contrôlé, la mentalité « c’est la faute de la victime » est toujours présente. »

Ashley Fires, elle aussi actrice X, s’est également confiée au Daily Beast. James Deen est le seul acteur avec lequel elle refuse catégoriquement de travailler : voilà pourquoi. (Je réitère l’avertissement, sautez à la fin de la citation si vous êtes sensibles aux descriptions détaillées.)

« Je sortais de la douche commune chez Kink [un studio de porno à San Francisco, NDLR], j’allais attraper ma serviette et il est arrivé derrière moi, pressant son érection contre mes fesses. Il m’a poussée contre le lavabo, a commencé à me peloter, j’ai dit « Non, non, non, James, non ». Il m’a libérée de son emprise et m’a dit « Tu sais, si tu veux baiser plus tard je suis dans telle chambre ». Je lui ai dit d’aller se faire foutre. Je le connais pas, ce mec, et il croit avoir tous les droit sur mon corps ! »

L’horreur ne s’arrête pas là : selon Ashley Fires, James Deen lui a plus tard demandé d’arrêter de parler de cet « incident » pour justifier son refus de travailler avec lui, en disant « Je sais pas, t’as qu’à dire autre chose, genre que je te fais penser à ton frère ».

D’instinct, je vous crois

À ma connaissance, aucune de ces trois actrices n’a engagé d’action en justice contre James Deen. Mais dans mes tripes et dans mon cœur, je les crois. Déjà parce qu’elles n’auraient rien à gagner à mentir, au contraire — ça peut être risqué pour leur carrière, pour leur image publique, pour leur réputation. Ça peut focaliser un torrent de haine sur elles, notamment via les réseaux sociaux.

C’est dur de faire reconnaître son viol, en général. C’est dur d’en parler, de nommer le coupable. C’est dur d’obtenir gain de cause au tribunal. Quand on est une femme plutôt jeune, quand on travaille dans le milieu du X, quand le mec en question est célèbre et riche, c’est courageux d’en parler. De briser la loi du silence.

Alors je sais pas vous, mais moi, Stoya, je la crois. Ça me rend triste pour elle, ça me rend un peu nauséeuse de lire tout ça… mais je la crois, je crois Tori Lux, et je crois Ashley Fires. Et je les trouve fichtrement courageuses.

À lire aussi : « Nous aurions pu être des violeurs » – de l’importance de l’éducation sexuelle


Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.

Les Commentaires

76
Avatar de EleanorRigby
12 décembre 2015 à 20h12
EleanorRigby
Je l'ai toujours trouvé malsain ce type...
0
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