Avoir un job à côté des études est malheureusement une obligation pour beaucoup d’étudiant•e•s. Mais même lorsqu’il s’agit simplement de se faire de l’argent de poche, de se rendre utile, ou d’avoir une activité à côté des cours, avoir un job étudiant peut être très agréable et gratifiant ! C’est pourquoi j’aimerais vous parler du soutien scolaire.
Lorsque j’ai commencé mes études à Sciences Po, avoir un job étudiant à côté des cours était complètement hors de question. Je n’en avais tout simplement pas le temps ni l’énergie. J’avais 24 heures de cours par semaine, beaucoup de boulot personnel, une activité de groupe (théâtre puis radio) obligatoire qui me prenait au moins trois à quatre heures par semaine, et une activité sportive de deux heures hebdomadaires. J’étais largement assez occupée, et heureusement, je parvenais à vivre correctement grâce aux bourses du CROUS et à l’aide occasionnelle de ma grand-mère.
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Tout est devenu financièrement beaucoup plus difficile
Et puis je suis arrivée à Paris pour mon master et tout est devenu financièrement beaucoup plus difficile. Mon loyer a doublé, j’ai dû souscrire à un prêt, et j’ai commencé à envisager de prendre un job étudiant en plus de mes cours (je n’avais plus ni activité de groupe ni activité sportive). Mais travailler dans la restauration, par exemple, était hors de question… j’avais déjà du mal à boucler mon travail pour Sciences Po et je ne me sentais pas non plus d’endurer le stress qui allait, je l’imaginais, avec un job de ce type.
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L’opportunité du soutien scolaire
Un jour, une amie a posté sur le groupe Facebook de Sciences Po une annonce de parents qui cherchaient un•e étudiant•e pour donner des cours particuliers de français, d’anglais et/ou d’allemand à leur fils de 15 ans. C’était mon rayon, je pouvais donner une ou deux heures de mon temps par semaine, et ça me ferait un peu d’argent en plus — sacrément bienvenu en ces temps difficiles. J’ai donc postulé. Et j’ai été choisie.
Je ne pensais pas que ce serait aussi cool
Franchement ? Je ne pensais pas que ce serait aussi cool ! Je m’attendais à avoir un élève récalcitrant, peu intéressé, et avec des difficultés telles que je ne saurais pas gérer. Et en fait… pas du tout. Mon élève avait parfaitement conscience de la nécessité pour lui de prendre des cours particuliers de français (j’avais laissé ma coloc assurer les cours d’allemand et d’anglais par manque de temps), il était motivé pour s’améliorer et travailler, et par-dessus le marché, poli et gentil, quoique facilement distrait. Bref, c’était un amour.
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Les cours, ça peut être très pipou
Une routine sympa
Le travail en lui-même restait plutôt agréable : j’arrivais, nous nous installions dans sa chambre, je commençais toujours par lui demander comment s’était passée sa semaine, et puis je lui proposais un sujet de rédaction, soit sorti de ma propre imagination, soit adapté d’un des exercices de son manuel. J’alternais entre les rédactions et les exercices de réécriture, pour ne pas qu’il s’ennuie et pour avoir l’occasion de pratiquer divers aspects de la langue française. Si mon sujet de rédaction ne l’inspirait pas, ou le laissait perplexe, je changeais ou l’aidais à trouver des idées en reformulant la consigne et en lui suggérant différents angles.
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J’avais la chance d’avoir un élève à l’imagination fertile ; ça devenait presque un souci car il avait tendance à se laisser emporter par son histoire et oublier de se concentrer sur la rigueur de son français ! Mais je ne me fâchais jamais (c’était plutôt mignon) : je lui rappelais simplement de se concentrer sur les temps à choisir pour ses verbes, les accords de ses participes et de ses adjectifs, et la concordance des temps. Je voyais bien qu’il faisait de son mieux, et même quand il me rendait une rédaction truffée de fautes d’inattention, j’essayais simplement de lui apprendre à se relire efficacement.
Les difficultés (inattendues)
Je ne dirai pas que chaque cours était facile
Je ne dirai pas que chaque cours était facile. Le français étant pour moi une langue intuitive, car je suis une grande lectrice, je ne me suis jamais particulièrement fatiguée à apprendre les règles de grammaire. J’avais donc parfois du mal à expliquer à mon élève la logique qui se cachait derrière les mots et les accords (surtout que, soyons honnêtes, une fois sur trois le français n’est tout simplement pas logique).
Je me suis parfois également trouvée assez frustrée. J’avais envie d’aider ce garçon, mais je ne pouvais pas apprendre à sa place les mots de vocabulaire, je ne pouvais pas penser à sa place à utiliser des synonymes pour éviter les répétitions… je ne pouvais rien faire à sa place. C’était à lui de fournir la majorité du travail, et j’avais parfois l’impression de ne pas en faire assez.
Petite pause ?
Aujourd’hui, je donne des cours de français et d’anglais au petit frère de mon ancien élève, et je m’attelle avec lui à des problèmes différents. Il est légèrement dyslexique, s’efforce désespérément d’apprendre les règles de grammaire, et rien de tout cela n’est pour lui intuitif. Je le vois faire des efforts, et je mesure mon impuissance : lui seul peut apprendre à combattre son stylo qui écrit des lettres différentes de celles auxquelles il pense ou qu’il entend… Lui seul peut apprendre les verbes irréguliers en anglais, qui sonnent pour lui de manière si étrange et dont l’orthographe est parfois difficile à retenir. Lui seul peut comprendre la logique qui lui dicte d’employer un participe passé plutôt qu’un infinitif.
Je lui explique de mon mieux, j’invente des moyens mnémotechniques, je lui répète autant de fois qu’il le faut… mais au final, c’est pour lui que cela revêt de l’importance, car ses notes et son passage dans la classe final en dépendent. Moi ? Je suis payée de toute façon.
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L’élève qui aide sa tutrice
Mon élève compte sur moi
Mais chaque fois que je passe une mauvaise journée, que j’ai l’impression d’être inutile et que le syndrome de l’imposteur fait son retour en force dans ma tête (généralement en me chuchotant que n’importe qui pourrait écrire mes articles, mais en mieux), si c’est un jour où j’ai cours, cela finit par aller mieux après une heure de travail. Je me sens enfin utile ! Mon élève compte sur moi pour lui expliquer ces obscures règles de grammaire, pour lui dire que ce n’est pas sa faute s’il ne comprend pas parce que ce n’est simplement pas logique, pour l’encourager, avant tout, et lui dire qu’il peut y arriver.
C’est une petite satisfaction qui grossit de semaine en semaine, que de voir qu’il y a certaines fautes qu’il ne fait plus. De voir que même s’il fait encore la faute, il a appliqué la règle que je lui ai donnée et a réfléchi pour savoir quel temps employer. De constater qu’il fait moins de fautes, parce que j’insiste pour qu’il prenne son temps et que j’essaye de le rendre moins stressé. De l’écouter me dire merci, lorsqu’il a enfin la réponse à sa question. De le voir sourire, quand je lui dis que je suis contente de son travail, même s’il a encore fait beaucoup d’erreurs.
Pédagogie bof.
Je le vois doucement reprendre confiance en lui. Je l’écoute, parfois, me raconter ce qu’il s’est passé au collège. Je compatis lorsqu’il se plaint que sa prof d’anglais ne leur fait rien faire d’intéressant. Je suis moi-même contente, lorsque je constate que le livre en anglais que je lui ai choisi lui plaît.
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Avec mon élève je me sens utile et importante
Avec ces deux garçons, j’ai commencé à reprendre doucement goût à une vie normale. Je prépare mes cours, en cherchant des idées de rédactions, en googlant des livres qui pourraient intéresser mes élèves, en vérifiant les paroles de chansons en anglais qui donneraient du bon vocabulaire… Je m’occupe utilement pendant une heure, je transmets mon savoir qui, du coup, sert enfin à quelque chose, et en plus, je suis (très bien) payée pour. Que demander de plus ?
Avec mon élève, je me sens utile et importante. Et je ne l’en remercierai jamais assez.
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