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- Précédemment : Reportage entre les murs de Mariama Bâ, internat d’excellence pour jeunes filles sénégalaises
Dimanche, 10h, j’émerge avec quelques difficultés. Je pourrais mettre ça sur le dos des moustiques qui m’ont piquée toute la nuit, mais je crois que c’est surtout dû à… la kizomba.
C’est elle qui m’a maintenue éveillée jusqu’à 4h du matin la veille. Retour sur une soirée de découverte.
La kizomba, qu’est-ce que c’est ?
La kizomba, « c’est une danse de salon africaine », m’explique un prof de kizomba rencontré ce soir-là.
« C’est un genre musical et de danse originaire d’Angola. Le terme provient de l’expression linguistique Kimbundu, qui signifie « fête ».
Dès les années 60 les grandes fêtes entre amis étaient déjà appelées « kizombadas » même si la kizomba en tant que danse n’existait pas encore.
Elle est née dans les années 80, à Luanda, après de grandes influences musicales du zouk des Antilles et trouve son origine dans le semba. »
Moi, je n’ai entendu parler de cette danse qu’il y a un an ou deux par une amie sénégalaise, Mathilde, qui justement m’accompagne ce soir. Mais quand je lui explique il tombe des nues :
« Mais quoi ? Il y en a partout à Paris !
C’est arrivé là-bas grâce à des immigrés qui se sont appuyés là-dessus pour se créer une activité professionnelle.
Une danse de salon africaine, ça fait exotique, les gens aiment ça. Pour eux, c’est un savoir qu’ils pouvaient valoriser. »
Il est prof depuis des années, il a eu le temps de voir le genre évoluer, se diversifier. C’est comme ça qu’est apparu ce qu’il appelle « l’urban kiz ».
« À mon avis, c’est une simplification de ce qu’est vraiment la kizomba.
Il y a beaucoup de différences, celles qui sont le plus à signaler sont la posture et le guidage du corps. La kizomba se danse avec une connexion buste contre buste rapprochée et l’urban kiz non.
Avant j’enseignais la kizomba traditionnelle, mais depuis quelques temps on m’a demandé de faire de l’urban kiz car ça se pratique plus en soirée. »
La kizomba, une danse suave
Ce soir, on a payé notre entrée dans le restaurant qui fait office de piste de danse 1000 francs CFA, soit à peine 2€. Il paraît qu’on y retrouve souvent les mêmes têtes, un mélange entre expats et locaux.
L’avantage, c’est qu’ici « les gens viennent pour danser, pas pour draguer » me dit Mathilde.
Je suis entrée toute timide, en ne sachant même pas à quoi ça ressemblait.
Sur la piste, il y avait déjà des danseurs et des danseuses, enlacées sous les lumières tamisées.
Chaque mouvement semble très naturel, toutes ces paires dansent à merveille et j’en suis fort intimidée.
Pour une idée de ce à quoi ça ressemble, ce reportage de l’AFP sur les origines de la kizomba
Un premier cavalier vient chercher Mathilde, tandis que je refuse poliment l’invitation d’un second. Je ne le sens pas du tout, j’ai beau observer, je ne comprends toujours pas la logique des pas.
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Faire ses premiers pas de kizomba
La seconde d’après, je me sens à la fois soulagée de ne pas y être allée et idiote d’avoir refusé. C’est trop con, c’est la meilleure occasion pour apprendre.
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Personne ne va me juger, et si c’est le cas, ça signifie que ces gens ne sont pas dignes de mon attention, et puis il y a quantité de bons danseurs qui peuvent sans doute me donner des conseils.
Alors la fois suivante, après avoir discuté avec Mathilde, j’accepte, mais en prévenant :
« Je ne sais pas faire. »
Le jeune homme qui vient de m’inviter à danser me dit être débutant lui aussi, et je pense brièvement qu’on est mal embarqué·es… mais il me fait rapidement oublier mes doutes.
Il me montre les pas de base, compte les temps, m’indique quand changer de rythme (car je suis trop occupée à faire attention à mes mouvements pour penser à les aligner sur la musique, ce qui est absurde vous en conviendrez).
Il me quitte en me disant que pour une première fois c’est vraiment pas mal – moi en lui disant que pour un débutant c’est vraiment un bon prof, et il me promet un deuxième cours plus tard dans la soirée.
Quand je vous dit que j’ai commencé par rester les fesses sur ma chaise, je ne mens pas.
Comme promis, il vient me chercher quelques temps après, et j’ai même l’occasion de danser avec deux autres partenaires ensuite (mais je ne vous cache pas qu’ils étaient de piètres professeurs par rapport à mon premier cavalier).
Et puis, plus tard dans la soirée, je décide de lui proposer une troisième danse.
C’est vrai que c’est majoritairement des hommes qui invitent des femmes, mais j’ai vu certaines d’entre elles prendre l’initiative, il semble que ce soit permis, et d’ailleurs c’est toujours couronné de succès. Dans tes dents, le
code de séduction et le virilisme à deux balles.
Moi qui n’osais pas poser un pied sur la piste de danse en entrant, je fais finalement la fermeture. Les conseils de celui qui m’accompagne se font plus rares à mesure que je commence à maitriser la base, il me montre désormais de nouveaux pas.
La musique s’éteint sur une salve d’applaudissements et franchement, je suis assez fière des progrès accomplis en une soirée.
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Danser « la kiz » jusqu’au bout de la nuit ?
Mon dos est un peu moins ravi lui, il crie d’avoir été cambré toute la nuit, mais on m’explique qu’il faut simplement corriger ma posture :
« Il faut rester droite, c’est le bassin qui bouge, c’est comme si tu faisais un câlin à quelqu’un mais avec un peu de distance entre vous, pour se laisser la place de bouger ».
À la sortie, devant le restaurant, il y a un homme qui vend du thé dans de tous petits gobelets. La majorité des danseurs et des danseuses qui ont fait la fermeture se sont arrêtés ici pour terminer la soirée en discutant, avant que l’appel du lit (ou d’une autre soirée) ne se fasse trop fort.
Pour nous, c’est le lit. Et ce matin, en en sortant, je comprends que j’ai fait honneur à la piste en sentant le haut de mes mollets qui tire légèrement. Qui sait, avec la pratique, ce genre de désagréments finira par disparaître ?
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