— Publié initialement le 16 juillet 2012
Le slut-shaming, que l’on pourrait traduire par « stigmatisation des salopes », consiste à rabaisser ou culpabiliser une femme à cause de son comportement sexuel (pratiques, nombre de partenaires, vêtements « provocants »…).
Concrètement, c’est votre camarade de classe qui raconte à tout le monde qu’unetelle est « une vraie salope » parce que c’est elle qui l’a dragué pour qu’il finisse dans son lit. C’est votre copine qui dit que cette fille est une pute parce qu’elle coucherait avec n’importe qui.
C’est cette nana de Tumblr qui a ressenti le besoin de signaler à toutes les femmes que leurs poitrines doivent rester à l’intérieur de leur haut :
Réaction de Laci Green (Laci, on t’aime) :
Il y a aussi ces groupes Facebook du type Certaines devraient apprendre à fermer leurs jambes avant d’ouvrir leur bouche, ou ces « blagues » visant à humilier une femme en extrapolant sur sa sexualité – je pense aux photomontages de Marion Maréchal-Le Pen avec un pénis noir dans la bouche.
Le problème, c’est que ce type d’humour entretient l’idée que le sexe est dégradant pour les femmes.
Les méfaits du slut-shaming
Commençons par les dommages les plus évidents : le slut-shaming blesse les personnes qui en sont victimes. Il peut même faire des morts, comme cette jeune américaine de treize ans qui s’est suicidée en mai dernier après des mois de harcèlement. Des filles avaient écrit « slut » sur son casier, et elle avait reçu des menaces de viol.
Le rapport avec « Your boobs go inside your shirt » ? Une culture qui considère les filles sexuellement actives comme des salopes – en l’occurrence cette collégienne n’avait même jamais embrassé un garçon, mais les « réputations » n’ont jamais attendu la réalité.
À un niveau plus global, le slut-shaming encourage le viol : si une femme a certains vêtements ou comportements, cela signifierait qu’elle ne peut pas dire non
(puisqu’elle aime ça, puisqu’elle le cherche…).
Du coup, les filles veulent éviter d’avoir une réputation de salope de peur de se faire agresser ; du coup, ces comportements deviennent de plus en plus stigmatisés – et la liste de ce qui est provoquant s’agrandit de plus en plus.
Cercle vicieux.
Pour être sûre de ne pas être victime de slutshaming, certaines filles le pratiquent sur d’autres. Le point commun de ces oppressions nulles : convenir aux normes sociales de la meuf «respectable » opposée au mec qui peut se la donner autant qu’il veut sans qu’on ne juge sa personnalité entière pour ça.
Pour se remonter un peu le moral, voici une vidéo d’une jeune fille qui dénonce le slut-shaming. 13 ans et déjà le cerveau bien en place, ça fait plaisir (en anglais) :
Au début la demoiselle explique que pour fêter ses deux ans sur YouTube, elle va participer à un défi Sept jours, sept sujets. Elle explique ensuite qu’on peut ne pas être d’accord avec elle tant que c’est fait avec respect. Elle a choisi comme premier sujet qui lui tient à cœur le slut-shaming et pourquoi c’est mal.
Elle commence par définir le slut-shaming comme le fait de stigmatiser une femme à cause de ses vêtements ou de sa sexualité. Le message que cela renvoie est que le sexe est mal, que tout le monde va vous détester si vous avez des relations sexuelles.
« Oui, j’ai treize ans et je parle de slut-shaming. Faites avec. »
Puis elle précise que le sexe est quelque chose de bien si vous en avez envie. Elle parle ensuite du rapport entre slut-shaming et viol, en précisant que le viol est dû aux violeurs et à une culture violente mais pas du tout « parce que c’est une salope ».
Enfin, elle déplore que des filles de son âge commencent à pratiquer le slut-shaming, et propose de leur montrer cette vidéo en espérant (sait-on jamais) que cela puisse les faire évoluer.
Combattre le slut-shaming
Nous avons tous intérêt à combattre le slut-shaming : les femmes, pour avoir la liberté de s’habiller et de se comporter comme elles l’entendent ; mais aussi les hommes hétérosexuels, puisque ce n’est pas franchement productif d’insulter les filles avec qui on couche si on a envie de recoucher avec elles, et parce que c’est plus marrant de coucher avec quelqu’un qui s’éclate plutôt qu’avec quelqu’un qui a peur d’être mal considérée si elle se lâche.
Alors, que faire pour combattre le slut-shaming ? Dans les initiatives collectives il y a les SlutWalks, qui sont spécialement dirigées contre le viol. On peut choisir de récupérer le terme, et de participer à Sluts Unite. On peut surtout continuer à se comporter comme on l’entend – même s’il y a toujours un débat sur les risques de la mini-jupe à une heure du matin dans la forêt (je vous vois venir).
À notre petite échelle je propose déjà d’arrêter de le pratiquer – comme j’essaie depuis quelques temps d’utiliser un langage non-sexiste. J’imagine bien que vous ne culpabiliseriez jamais une victime de viol, mais est-ce que cela ne vous arrive pas de traiter de salope une fille que vous trouvez vulgaire ?
Quelles que soient les motivations des filles qui portent des « fuck me shoes » (un nom inventé par des féministes – ô amertume – pour désigner les chaussures à talons très haut), des mini-jupes, ou qui couchent avec à peu près n’importe qui, gardez à l’esprit que vous n’êtes pas dans leur tête.
« Elle doit être mal dans sa peau pour se comporter comme ça » n’est pas une excuse pour leur cracher dessus, même discrètement.
Abstenons-nous de juger les gens sur leur sexualité et le monde tournera peut-être un peu plus rond – sur ce je vous laisse avant de me transformer en Hippie Jack.
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