Si le géant chinois de l’ultra fast fashion SHEIN commence à être bien connu en France, un autre tente de s’imposer sur les marchés occidentaux : Temu. Aux États-Unis en particulier, leur concurrence s’intensifie, puisque le premier a déposé une action en justice contre le second en décembre 2022 qu’il accuse d’avoir « enfreint volontairement et de manière flagrante ses droits exclusifs et précieux de marque et de droit d’auteur. » Voilà que Temu répond en déposant maintenant plainte contre SHEIN à qui il reproche de « n’avoir pas choisi de rivaliser sur le fond en offrant de meilleurs prix, conditions, service ou qualité » mais d’avoir mis en place un « système d’exclusivité forcée, de menaces, d’initimidations et de sanctions financières directes ». Soit une conduite « à l’opposé d’une concurrence loyale et dans les limites de la loi applicable », rapporte le média spécialisé The Fashion Law.
SHEIN accusé par Temu d’abuser de sa position de monopole et d’user de moyens extra-légaux pour étouffer son concurrent
D’après le dossier, SHEIN domine clairement le créneau de la mode ultra-rapide aux États-Unis avec 75 % de part de marché en 2022. C’est l’année d’entrée sur le marché états-unien de Temu, qui a voulu encore plus casser les prix que son rival afin de s’imposer, devenant rapidement l’appli de shopping mode la plus téléchargée de l’App Store. De quoi déplaire à SHEIN qui a riposté par la menace et l’intimidation, dans le but d’entraver la chaîne d’approvisionnement de son concurrent et l’empêcher d’être plus compétitif.
Comme le résume également The Fashion Law, Temu détaille ainsi les quatre stratégies du mastodonte :
- Obliger les fabricants à conclure des accords d’adhésion qui créent effectivement des relations de fournisseur exclusif avec elle et menace les fabricants d’amendes et de pénalités onéreuses s’ils fournissent des produits à Temu.
- Obliger les fabricants à signer des serments de loyauté certifiant qu’ils ne feront pas affaire avec Temu, mais ne les force à rien concernent d’autres concurrents potentiels.
- Imposer des amendes extrajudiciaires aux fabricants désobéissants s’ils fournissent des produits à Temu.
- Envoyer de nombreux faux avis de violation du droit d’auteur à Temu afin de perturber les ventes de produits proposés à la vente sur Temu.
Concernant ce dernier point, plus de 10 000 produits auraient déjà été retirés du catalogue de Temu à cause du stratagème de SHEIN, entre octobre 2022 et aujourd’hui. Le mastodonte aurait déjà scellé des contrats d’exclusivité avec près de 80 % des fournisseurs chinois capables de produire au rythme de l’ultra fast fashion. Temu s’appuie donc sur des lois anti-monopoles et de protection des consommateurs pour intenter un procès à SHEIN.
L’hôpital qui se fout de la charité, but make it ultra fast fashion
Mais n’y voyons pas non plus une lutte à la David contre Goliath, puisque Temu reste un acteur important de l’ultra fast fashion, donc délétère pour les humains et le reste de la planète. Cette affaire judiciaire éclaire surtout les moyens parfois extra-légaux que ces poids lourds de l’industrie sont capables de déployer afin de parvenir à leurs fins. Quand SHEIN porte plainte contre son concurrent, c’est donc vraiment l’hopital qui se fout de la charité. Et entre la peste et le choléra, on préfère aller se rhabiller avec ce qu’on a déjà chez soi.
À noter qu’en parallèle, un autre procès vise SHEIN (comme tous les jours, vous me direz) depuis le 11 juillet 2023 pour ses années de plagiats et contrefaçons, intenté par des dizaines de marques et d’artistes aux États-Unis, comme le relaie un autre média spécialisé, The Good Goods. Mais même si l’entreprise risque de lourdes amendes et de fortes pénalités, ses moyens financiers colossaux, pourront aisément éponger ses éventuelles pertes. Ce géant reste loin d’avoir des pieds d’argile.
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