Le Seul avis qui compte sur Sex Education 4
Cette semaine, Kalindi s’est retrouvée comme une poule devant un couteau en regardant une scène de Sex Education saison 4 où une femme s’applique de l’huile pimentée sur la vulve (ne faites surtout pas ça chez vous).
Parler d’éducation sexuelle avec pertinence et légèreté, ce n’est pas un défi pas
simple à relever sur un sujet aussi sensible dans le monde entier, régulièrement
récupéré par les conservateurs de tous poils (en ce moment, c’est en Belgique).
Lancée en 2019 sur Netflix, Sex Education a fait l’effet d’une grande bouffée d’air
frais.
Créée par Laurie Nunn, elle nous raconte sur un ton humoristique l’éveil à la
sexualité d’une bande d’adolescent·e·s dans une petite ville anglaise. Son approche
sex positive, inclusive et son pitch fun – Otis (Asa Butterfield), fils d’une sexologue
reconnue, prodigue des conseils à ses congénères, tout en souffrant lui-même d’un
dysfonctionnement érectile – avaient remporté l’adhésion. Auréolée d’un succès
public et critique, Sex Education s’attaque avec bonheur à des sujets tabou, fait
passer son message d’ouverture d’esprit et n’oublie pas surtout de nous passionner
pour les aventures de ses attachants personnages.
Une production compliquée
Dans le final de la saison 3, diffusé en 2021, le lycée de Moordale fermait ses portes.
En coulisses, le Covid puis le départ de plusieurs acteur·ices (en particulier Tanya
Reynolds, Patricia Allison et Simone Ashley, les interprètes de Lily, Ola et Olivia)
ont obligé Laurie Nunn à revoir sa copie. Il aura fallu deux ans pour que cette
ultime saison arrive sur Netflix.
Otis, Eric, Aimee, Jackson, Viv et les autres ont été réaffectés dans un nouveau lycée pour leur dernière année, celle du Bac. Eux qui ont lutté contre le conservatisme de Moordale sont tout étonnés de découvrir au lycée de Cavendish un environnement safe et très ouvert d’esprit. Place aux cours de yoga, à la pensée positive et aux initiatives écolos ! La série se moque gentiment des lycées nordiques, souvent acclamés pour leur environnement scolaire avant-gardiste. À Cavendish, Otis se découvre de la concurrence : une élève, O (Thaddea Graham), officie en tant que sexologue. Persuadé qu’elle lui a volé son idée, il part en croisade, ce qui donne lieu à maintes situations comiques. Loin du lycée, Adam cherche sa voie professionnelle à la campagne, tandis que Maeve débute son cursus d’écriture littéraire dans une prestigieuse université américaine, auprès d’un prof et écrivain à l’égo fragile (Dan Levy).
A Moordale, Jean (la merveilleuse Gillian Anderson) élève seule son nourrisson et tente de reprendre le travail, alors qu’elle affronte une dépression post-partum. Sa jeune sœur peu fiable débarque pour l’aider. Autant dire que beaucoup de choses ont changé dans Sex Education ! Et cette saison 4 ne manque pas de nouveaux protagonistes. Il y en aurait presque un peu trop.
Une saison 4 en demi-teinte
Fidèle à son ADN, Sex Education livre son regard sur des sujets comme la non-binarité (Cal poursuit sa trajectoire), le deuil, l’asexualité, le manque d’accessibilité pour les personnes handies, le harcèlement scolaire (l’histoire de Ruby et O) ou le rapport complexe entre queerness et religion vécu par Eric.
Pour compenser les départs, de nouveaux protagonistes LGBTQIA+ font leur apparition, en particulier un groupe très populaire, composé d’Abby et Roman, deux ados trans et Aisha, queer et malentendante. Le hic : on a peu de temps pour apprendre à les connaître. Les storylines se multiplient, mais le cœur n’y est pas complètement. Certaines situations sentent la redite, comme l’amitié de nouveau en péril entre Eric et Otis. Une grande partie de la saison est encore consacrée au will they / won’t they entre Otis et Maeve, mais il a tellement duré qu’on s’en fiche presque de les voir ensemble ! Et Maeve accumule une nouvelle fois un peu trop de galères pour une seule personne. Laurie Nunn se débat avec trop de personnages à gérer, et certains sont sous-développés ou réduits à leur spécificité. La série devient trop didactique et semble cocher des cases, là où avant, tout était plus fluide.
Une série déjà culte
Cette quatrième saison réserve tout de même quelques jolis moments et le final apporte une conclusion satisfaisante pour les personnages historiques (Otis, Maeve, Eric, Adam, Aimee, Jackson). Malgré les bémols, on est aux anges de retrouver ce cast fantastique, qui a explosé ces dernières années à Hollywood. Pour ne citer qu’eux, Emma Mackey, Ncuti Gatwa et Connor Swindells étaient à l’affiche de Barbie cet été.
Sex Education a toujours été une série sensible aux évolutions de notre société. Festives, les deux premières saisons célébraient la libération des corps et de la parole des femmes, dans le sillage du mouvement Me Too. Avec sa directrice conservatrice et ses mesures rétrogrades, la troisième saison se faisait le reflet du backlash face à la 4e vague féministe. Moins drôle et mordante que les précédentes, cette ultime saison est nostalgique d’une époque révolue.
Malgré tout, les personnages luttent pour trouver leur voie. Devenir soi-même, sans compromis et sans s’excuser, c’est le grand thème de Sex Education, qui aura marqué l’histoire des teen drama, en parlant comme aucune autre de sexualité dans toute sa diversité, avec bienveillance et humour.
Et si le film que vous alliez voir ce soir était une bouse ? Chaque semaine, Kalindi Ramphul vous offre son avis sur LE film à voir (ou pas) dans l’émission Le seul avis qui compte.
Les Commentaires
Mais j’avais déjà un peu ce sentiment à la saison précédente