« Les femmes peuvent-elles avoir des relations sexuelles comme les hommes ? », c’est la question que posait Carrie Bradshaw (interprétée par Sarah Jessica Parker) autrice d’une chronique sur la sexualité à New York et personnage principal de Sex and the City.
C’était en juin 1998 dans l’épisode pilote de la série adaptée par Darren Star (Melrose Place, Beverly Hills, Emily in Paris) à partir du roman éponyme de Candace Bushnell. Le public découvrait son univers et celui de ses meilleures amies Miranda (Cynthia Nixon), Charlotte (Kristin Davis) et Samantha (Kim Cattrall). Les héroïnes, toutes célibataires au début de l’intrigue, jonglent entre leurs carrières, leurs questions existentielles et leurs relations sexuelles et sentimentales qu’elles se racontent vêtues de vêtements haute couture autour d’un Cosmopolitain dans les bars branchés de New York.
Influence sur la pop culture
« C’était révolutionnaire », affirme Anne Sweet, Docteure de l’université Sorbonne Nouvelle spécialisée en sociologie des médias. « Quatre femmes vulgaires, trentenaires, pas mariées…» d’après elle, la chaîne câblée HBO, dont ce fut la première série à succès offrait un espace propice à plus de liberté :
Comme le contenu était réservé aux abonnés, il pouvait plus facilement oser que les chaînes publiques.
En effet de l’avortement à la ménopause en passant par les infections sexuellement transmissibles, les six saisons de Sex and the City ont mis en scène des sujets tabous et très peu représentés à la télévision auparavant.
« Ça a eu une influence sur la pop culture, beaucoup de séries en découlent, la plus évidente est Girls », soutient Anaïs Bordages, journaliste indépendante qui participe au podcast Peak TV dédié aux séries. Elle explique :
Sex and the City a permis aux femmes de parler de désir et de masturbation sans honte et de manière ludique. Personnellement j’ai découvert la série avant de découvrir la sexualité et ça a été très formateur de voir un personnage comme Samantha revendiquer le droit de coucher sans sentiment; en tant que femmes on nous enjoint à tout le contraire.
Le flop And Just like that
Pour autant, 25 ans plus tard, la donne a changé. La série originale s’est alourdie de deux films qui n’ont pas fait l’unanimité tant auprès des fans que de la critique. Et And Just like that, le reboot dont la première saison a été diffusée sur HBO max, n’a pas arrangé les choses.
Après avoir enregistré la meilleure audience pour un premier épisode, il a perdu son public. Diffusé en deuxième partie de soirée en janvier 2023 sur TF1 les épisodes n’ont pas trouvé leur public si bien que la chaîne a modifié leur créneau de diffusion pour amortir la casse.
« Quand je repense à certains épisodes je suis aujourd’hui écœurée »
Ce décalage avec les attentes du public concerne aussi la version initiale qui peut paraître désuète voire complètement à côté de la plaque sur certains aspects : pas de référence aux violences sexuelles, un casting presque exclusivement blanc dans une ville cosmopolite comme New York. Sans parler du traitement caricatural des questions d’orientation sexuelle. Si elle reconnaît que certains moments, voire certains épisodes, comme celui où Carrie entretient une relation avec un homme bisexuel peuvent être offensants, Anaïs Bordages appelle à la clémence.
Ça a enfoncé tellement de portes. Encore aujourd’hui certains épisodes sont frappants de modernité sur la question de l’amitié entre femmes par exemple. C’est une représentation imparfaite, et il ne faut pas oublier que les programmes destinés aux femmes ont tendance à être plus facilement méprisés.
Pour Anne Sweet le bilan est beaucoup plus mitigé : « Quand je repense à certains épisodes je suis aujourd’hui écœurée », lance-t-elle.
Entre les pub pour les grandes marques et la valorisation de la relation de Carrie avec Big (interprété par Chris Noth qui a fait l’objet, en 2021, d’accusations de violences sexuelles par cinq femmes) qui la traite mal, c’est un féminisme capitaliste qui ne me parle pas”, tranche l’ancienne amatrice du programme. Elle reconnaît toutefois que son impact culturel perdure : « Sex and the city est une référence que l’on ne peut pas supprimer, un élément important de l’histoire de la télévision ».
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Les Commentaires
J'ai particulièrement aimé la façon dont la maternité était traitée avec le personnage de Miranda, très en avance je trouve pour l'époque.