— Article initialement publié le 19 octobre 2014
J’ai fait le calcul, l’autre jour : autour de moi, presque tout le monde est en couple. Mon entourage proche semble être une boule d’amour, de réveils câlins, de petits-déjeuners passés à sourire à quelqu’un au-dessus d’un mug fumant, de messages vocaux mignons laissés pendant la nuit, d’endormissements dans les bras l’un de l’autre dans la position de la cuillère…
Bon en fait, j’ai longtemps et souvent été en couple alors je sais que ça ne ressemble pas tous les jours à ça, mais je trouvais qu’une bonne vieille comparaison extrapolée, c’était pas mal pour introduire le sujet.
Il se trouve que, pour la première fois depuis l’adolescence, je suis une des seules personnes de mon entourage amical à ne pas être en couple. Quand j’ai réalisé ça, j’ai été prise de panique : à l’adolescence, ça ne se passait vraiment pas très bien. Parce que je le vivais mal.
J’ai paniqué en réalisant que je revenais dans un contexte vaguement identique : j’avais pas envie de me sentir à nouveau marginalisée. J’avais pas envie d’être mise de côté. J’ai eu le sentiment, pendant au moins dix minutes, que j’étais en train de mettre un doigt dans une spirale de la lose, et que j’allais redevenir timide et complexée comme je l’étais à l’époque.
Alors j’ai fait des recherches et je suis tombée sur ce genre d’articles totalement clivants, opposant d’un côté les gentils célibataires tristes mais épanouis et de l’autre les méchants couples qui font tout pour que leurs copains célibataires soient bien mal à l’aise. L’espace d’une seconde, j’ai cru que la fin de ma vie sentimentale et amicale était venue. Que je perdrais tout intérêt. Je lisais « Guide de survie à destinations des célibataires dans un océan de couples », et j’hyperventilais un peu. « Je dois survivre maintenant, et non plus vivre ? », ai-je chuchoté les yeux agrandis façon manga en regardant les étoiles, à genou.
EH ! J’déconne hein ! En vrai j’ai vaguement froncé les sourcils en me grattant l’oreille.
Et puis j’ai réfléchi et j’ai compris. En fait, j’étais pas triste : j’étais super énervée. Ce genre d’articles, ce n’est rien d’autre que des vraies grosses conneries, je te le dis. Laisse-moi te prouver comment, si tu es dans le même cas de figure, et relativisons ensemble : être la seule célibataire de tes amis proches, ce n’est pas grave, et voici pourquoi.
Tu n’as plus douze ans
Effectivement, à douze ans, il est bien difficile de ne pas ressentir un complexe à l’idée de tenir la chandelle, parce qu’à cet âge-là, on a davantage tendance à se juger les uns les autres, à se scruter aussi. Et puis, quand on connaît ses premiers émois, on passe son temps à se rouler des pelles sans intéragir avec le reste du monde – c’est ce que j’ai cru voir en tout cas, chez les autres, parce que moi niveau séduction j’ai tellement fait chou blanc au collège qu’il y avait de quoi faire de la choucroute pour mille.
Imagine-toi une fille assise, seule, d’un côté d’un banc dans la cour d’un collège, tandis que sa meilleure pote embrasse à pleine bouche un mec à l’autre extrémité. Le tout à l’époque où on n’avait pas encore de smartphone et donc, pas de quoi se donner une contenance. Imagine-toi cette même fille qui va au cinéma avec deux potes qui se chopent à pleine bouche pendant la séance. C’est pas forcément un truc très agréable à vivre. J’avais l’impression de respirer la tristesse et la solitude, de faire pitié à tout le monde. C’était le cas, et tu sais pourquoi ? Parce que je me disais que je valais moins bien que les autres, et que ce manque TOTAL de confiance en moi, je le dégueulais par tous les pores. Dans ma tête d’ado complexée, comment aurait-il été possible qu’il en soit autrement, sachant que personne ne voulait échanger sa salive avec moi ?
Maintenant que j’y pense, je souffrais de gêne pour rien, parce qu’avec le recul, je me dis qu’il aurait suffit que je prenne mes amies à part pour leur dire « en fait, si vous pouviez moins embrasser vos mecs quand je suis là, ce serait sympa. Pas que je sois jalouse, c’est juste que ça me met mal à l’aise et que j’ai rien à faire au milieu », et le problème aurait été réglé, je crois. Sérieusement, pourquoi on était plein à ne pas vouloir dire les choses à l’adolescence ?
La tristesse du laissé pour compte.
Ce sont TOUJOURS tes potes
Rappelle-toi de ce truc : ce sont toujours tes potes, que tu as choisi, ce sont toujours les mêmes personnes. Les gens ne changent plus vraiment quand ils se mettent en binôme amoureux, une fois qu’ils ont grandi (ou alors j’ai vraiment des amis absolument exceptionnels (ATTENDS, OUI C’EST VRAI)). Ils sont peut-être simplement plus heureux qu’avant, parce qu’ils partagent plein de trucs avec une personne qu’ils aiment et ça, c’est cool. Y a pire, comme changement.
Effectivement, comme ça, à vue de nez, tu te dis peut-être qu’ils sont un peu moins présents pour toi. Certes, ils ne sont pas chez toi quatre soirs sur sept parce que c’est normal qu’ils consacrent du temps à leur moitié, mais ça ne signifie pas que tu ne peux plus les appeler à n’importe quelle heure du jour et de la nuit si t’as besoin d’eux.
Ça je le sais, parce que j’ai fait partie du clan des gens en couple alors que des potes à moi restaient célibataires et jamais, JAMAIS je n’ai rechigné à décrocher le téléphone quand ils appelaient ou à partir de chez moi pour les retrouver avec la joie dans le coeur. Et à aucun moment je ne regrettais de ne pas pouvoir passer trois heures de plus dans ma vie avec les mecs pour qui mon palpitant palpitait à l’époque.
J’ai beau être fille unique, j’ai regardé des séries et des films alors je sais ce qu’un parent dit à un enfant qui s’apprête à avoir un petit frère ou une petite soeur : je vais pas diviser l’amour que j’ai en moi pour lui en donner à lui aussi, je vais le multiplier pour vous en donner autant à l’un et à l’autre. Ça fait très ambiance ouin-ouin niaiseux et cornichons magiques, mais il y a de ça. Bon, l’amour filial, c’est pas pareil que l’amour amoureux, et l’amour amoureux, c’est pas pareil que l’amour amical, mais il y a de ça.
Quand on rajoute une personne à aimer dans sa vie, c’est pareil : on divise pas pour moins aimer ceux qu’on aimait déjà.
Une démonstration d’affection pour autrui n’est pas une démonstration de haine pour toi
Je sais pas pourquoi, dans tous les trucs que j’ai lu ces derniers jours, j’ai vu des phrases pseudo humoristiques à base de « han lala, nous les célibataires, on est tellement gonflés quand nos potes se montrent trop d’affection en vrai ah ouais c’est dégueu ? ».
Effectivement, la pré-ado que j’étais acquiescerait à cette phrase nulle. Elle aimait pas trop voir ses potes s’explorer la gorge pendant deux heures non stop parce que du coup, elle avait personne avec qui faire des blagues et discuter et écrire des poèmes dignes de l’enfant illégitime de Kyo et Vitaa. Mais maintenant, MAINTENANT, c’est quand même pas pareil ! Beaucoup de couples continuent de se signifier physiquement leur affection pendant plusieurs heures sans s’arrêter, certes, mais la plupart du temps dans l’intimité. Alors oui, parfois, en société, il y a un baiser, une main dans le dos, des regards amoureux mais… Et alors ? Jamais je m’empêchais d’embrasser furtivement mes ex quand je passais du temps avec d’autres personnes, célibataires ou pas. Pourquoi je serai agacée de voir les autres le faire ? Je trouve que ça n’aurait pas de sens que quiconque s’empêche de faire un geste tendre comme un Malabar quand il en a envie, à qui il le souhaite.
Tous les dogmes disant que c’est gênant d’aller passer du temps avec des couples d’amis ont tort : c’est pas gênant, c’est pas awkward, ce sont deux individus à qui tu as des trucs à dire, à raconter… Des humains, quoi ! On n’est pas des bêtes, bordel.
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Ta vie n’a pas moins d’intérêt
C’est vrai qu’à certains stades du couple, y a un vrai contraste qui se crée entre amis. Imaginons, au moment où une de tes potes est en train d’acheter une maison avec sa moitié (y a des gens qui s’y prennent tôt), toi, tu es peut-être en train d’enchaîner et d’alterner trucs sans lendemain et soirées-glandouille-en-slip. Peut-être que tu te focalises là-dessus, en oubliant que ton quotidien est aussi blindé de rencontres, d’opportunités, de diplômes, d’orientations, de réflexions, et que sais-je encore.
Si tu es du genre à te concentrer sur les sujets où tu n’as « rien à dire » sans penser à toutes les autres choses que tu as à raconter, certes, présenté comme ça, ta vie peut te paraître nulle et superficielle. En tout cas comparée à l’impression que tu as peut-être qu’ils sont, contrairement à toi, en train de construire quelque chose à deux. Mais rappelle-toi d’un truc (que tu n’as peut-être pas oublié, mais on sait jamais) : toi aussi, tu construis. La construction de sa vie ne s’arrête pas quand le couple finit. Elle n’accélère pas quand le couple commence. La construction de ta vie, elle se fait tout le temps, tous les jours, avec des pics et des ralentissements, indépendamment de tout statut amoureux.
Ça ne sert à rien de se comparer
Comparer, ça amène à des trucs tout cons, ça entraîne potentiellement vers de la jalousie, voire l’oubli de se réjouir du bonheur de gens qu’on aime pourtant. Alors qu’il n’y a que ça a faire : se réjouir du bonheur des gens qu’on aime. On a chacun nos vies, et nos vies sont cool, et on doit en faire des trucs encore plus cool, indépendamment des personnes à qui on lèche les dents.
Bien sûr, le monde n’est pas que pipouterie et il existe des « ami-e-s » qui regardent leurs potes célibataires avec pitié quand eux sont en couple et engueulent ces mêmes potes quand la tendance s’inverse. J’ai connu des personnes comme ça, et j’ai décidé que ça valait franchement pas le coup d’entretenir ces relations toxiques. Après, c’est à toi de voir.
N’écoutons pas les neuneus qui veulent opposer sans cesse les gens selon tout un tas de critères. En fait, globalement, c’est une tendance qui me saute de plus en plus aux yeux, dans la vie ou sur Internet : la volonté de faire des blagues en soutenant une partie de la population sur un point de leur quotidien (une intention tout à fait louable), mais uniquement en écrasant les autres à coup de sarcasmes.
Alors ne donnons pas trop d’importance à notre statut amoureux, arrêtons de penser que passés 12 ans, la notion de « tenir la chandelle » existe encore, et vivons notre vie indépendamment des autres, sans avoir au fond de nous envie d’aller au même rythme qu’eux. Ce qui est important, qu’on soit célibataire, en couple ou autre, c’est nous, et c’est là-dessus qu’il faut se concentrer.
Enfin moi, c’est ce que j’en dis. J’ai été témoin d’amitiés qui se brisaient à cause de conflits résultant de ce genre de situations, et j’aimerais pas que ça vous arrive, parce que c’est vachement triste.
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Les Commentaires
Pour ma part (moderacontagedevieon !), je n'ai jamais eu de relations vraiment sérieuses, et la plupart de mon entourage est déjà "casé" (je n'aime pas ce mot...). Ma soeur vit avec son copain, deux amies proches ont mon âge et ont déjà deux enfants et l'une d'entre elle va se faire construire une maison, deux autres amies sont aussi dans une relation "sérieuse", disons... Aucunes ne mettent la pression volontairement, ni ma famille, mais pourtant je n'échappe pas aux petites questions "anodines" : et toi les amours ? Tu as un copain en ce moment ? Bah avant, j'avais l'habitude de me justifier plus ou moins, et maintenant je dis juste non en rigolant ou en leur lançant un regard noir, ça dépend de mon humeur.
Avant je me mettais la pression, mais est-ce que je suis normale, pourquoi je ne trouve pas de petit ami avec qui avoir une relation sérieuse, il faudrait que je m'habille/maquille mieux, il faudrait que je sorte plus... Et maintenant, je suis plus en mode HELL NO, et je rentre chez moi avec un livre, une série, et mon thé. GROSSE ASOCIALE, BONJOÛÛÛÛR ! Je n'ai jamais été quelqu'un de très portée sur les sorties, je peux compter mes amies sur mes mains, j'en peut-être pas beaucoup mais ce sont les meilleurs . Alors quand me dit qu'il faudrait que je rencontre plus de monde.... Pfff, ça me fatiiiigue ! J'aime voir mes amis, la famille, mais voilà j'aime la solitude. Ca fait presque 6 ans que j'habite seule à Paris, et franchement je kiffe ! Je n'ai pas de copain même si j'aimerais, histoire des fois de faire des câlins ou de parler à quelqu'un, mais ça me coûterait énormément, surtout au début je pense. Je pense surtout ne pas avoir le "bon état d'esprit" actuellement pour m'investir dans une relation, donc je le vis très bien !
(Désolée pour le pavé ^^)