Depuis 2010, le Festival Séries Mania et sa talentueuse équipe – menée par la directrice générale Laurence Herszberg et le directeur artistique Frédéric Lavigne – sélectionne chaque année la crème de la crème des séries dénichées aux quatre coins du monde. L’événement nous permet de prendre le pouls des tendances mondiales. Vous verrez à travers notre sélection, qui vous fera voyager de La Lettonie à l’Australie, que les sujets féminins et féministes ne manquent pas.
1. After the party : vivre avec un agresseur dans sa famille
Créée par Diane Taylor et Robyn Malcolm, After the party est un drame familial néo-zélandais en huit épisodes, qui nous plonge dans la vie de Penny, une mère de famille et professeure dont la vie bascule quand elle accuse son mari, Phil, d’agression sexuelle sur un mineur. Personne ne la croit. Cinq ans plus tard, Phil est de retour dans sa vie. Il emménage dans la maison de leur fille, Grace, qui a eu un enfant, et reprend un poste de professeur.
Comment vit-on en ayant l’intime conviction qu’une personne de sa famille est pédocriminelle ? Racontée du point de vue de celle qui accuse, After the party prend aux tripes avec ce sujet post Me Too très actuel. Penny se retrouve dans une situation où se battre pour la vérité lui fait perdre tous ses proches, dont sa propre fille. Robyn Malcolm impressionne dans le rôle de Penny, une femme têtue et attachante, confrontée au gaslighting. En face, Peter Mullan est glaçant de justesse dans la peau de ce “bon père de famille” que personne ne veut croire agresseur sexuel. After the party brosse un portrait de femme puissant et nous montre comment les vies des personnes qui osent parler volent en éclats. On espère que cette excellente série trouvera un diffuseur en France.
2. Boarders : bienvenue chez les aristos
A la suite d’un scandale impliquant des élèves d’une école privée d’élite, cinq ados noirs issus de quartiers défavorisés se voient offrir une bourse pour étudier au lycée St Gilbert’s. Jaheim, Leah, Omar, Toby et Femi vont devoir redoubler de vigilance pour s’intégrer dans l’une des plus anciennes et prestigieuses écoles anglaises, qui a clairement fait appel à eux pour redorer son image. Caustique et réjouissante, Boarders joue habilement avec les clichés classistes et racistes pour mieux les renverser.
Il faut saluer le casting de jeunes acteur·ices brillants, composé entre autres des prometteurs Jodie Campbell, Josh Tedeku et Aruna Jalloh. Moins didactique qu’un Sex Education mais tout aussi drôle et politique, cette comédie en six épisodes, signée Daniel Lawrence Taylor, se déguste sans modération.
3. Videoland : être lesbienne dans les années 90
Cette comédie australienne en format court (les épisodes durent moins de 10 minutes) ravira les nostalgiques des nineties et des colliers ras-du-cou ! Écrite par Jessica Smith, Videoland suit le quotidien de Hayley, une adolescente un peu paumée, qui travaille dans un vidéoclub. Elle tente désespérément de séduire la fille de ses rêves, Jessica. Mais la jeune cinéphile peine à trouver des représentations satisfaisantes dans les films qu’elle consomme. Heureusement, sa BFF est là pour lui donner les … pires conseils !
Videoland évoque immanquablement la première saison de la série Dawson, dans laquelle les deux amis Pacey et Dawson travaillent dans un vidéoclub. Bourrée de références cinéphiles (big up à l’épisode 2, centré sur l’arrivée de Titanic en location DVD !) et portée par l’énergie awkward de son héroïne attachante, incarnée par Emmanuelle Mattana, Videoland est un bonbon de pop culture, à l’esthétique pastel et au message bien senti sur l’importance de la représentation LGBTQ+ à un âge, l’adolescence, où l’on se construit et où l’on cherche des modèles.
4. Show Yourself : une délicieuse comédie sur la confiance en soi
Créée par Alvaro Carmona, dont la série courte People Talking avait remporté un prix à Séries Mania en 2019, cette pépite espagnole suit la crise existentielle d’Ana, assistante d’un artiste mondialement reconnu à la Banksy. Un beau jour, elle se rend compte qu’elle commence littéralement à disparaître ! Face à cette inquiétante maladie psychosomatique, Ana retourne dans la ville de son enfance, reprend des liens avec son frère et poursuit son rêve de devenir peintre.
On adore l’humour décalé de Show Yourself, qui tourne en dérision le monde de l’entreprise (Ana se retrouve un temps dans une boîte à la The Office) et de l’art contemporain et ses egos. La série regorge d’inventivité mais ne perd pas de vue son propos : nous montrer à quel point il est dur de savoir qui l’on est et comment se lier à l’autre, dans notre société capitaliste où le paraître est plus important que l’être. En apprenant à se faire confiance et à s’ouvrir aux autres, Ana connaît un parcours émancipateur inspirant.
5. Catch me a killer : l’histoire fascinante de la première profileuse
Dans la lignée d’un Mindhunter, la série anglaise Catch me a killer, créée par Amy Jephta, s’intéresse à Micki Pistorius, la première femme à être devenue profileuse, et à exercer cette profession en Afrique du Sud, où la série a été tournée. Elle a travaillé sur une trentaine de cas de tueurs en série et formé une centaine de détectives. La série débute au milieu des années 90, en Afrique du Sud, alors que Micki travaille sur son premier cas, “l’étrangleur de la gare”. Ce pédocriminel tue et viole de jeunes garçons noirs, alors que le régime de l’apartheid vient de prendre fin.
Signée Rene van Rooyen, la réalisation inspirée de Catch me a killer a le bon goût de ne pas verser dans le sensationnalisme. Dans le rôle principal, l’actrice Charlotte Hope livre une superbe prestation. Le mélange de détermination et de vulnérabilité de Micki, qui fait face au sexisme de cet univers très masculin, n’est pas sans rappeler la performance de Jodie Foster dans Le silence des agneaux. En plaçant son action en Afrique du Sud, Catch me a killer explore les enjeux raciaux dans le pays, même si on peut regretter que la majorité des personnages importants soient blancs (en tout cas dans les premiers épisodes).
6. Soviet Jeans : Sexe, parano et contrebande dans l’ex-URSS
Une romance politique, c’est possible ? Oui, répond la série lettonne Soviet Jeans ! Créée par Stanislas Tokalovs, cette dramédie unique en son genre nous plonge à la fin des années 70, alors que la Lettonie est sous la coupe de l’URSS et que les agents du KGB grouillent à chaque coin de rue à Riga. Un jeune costumier, anarchiste et fan de rock, se retrouve dans un asile psychiatrique après avoir vexé un fonctionnaire de l’État. Alors que son amante, la nouvelle directrice d’un théâtre, tente de le faire libérer, il développe un réseau souterrain de fabrication de jeans.
Soviet Jeans nous plonge dans des temps troublés et reconstitue à merveille une ambiance totalement paranoïaque, qui aurait pu la rendre austère. C’était sans compter la présence de ses personnages principaux – le duo Aamu Milonoff et Karlis Arnolds Avots – dont l’énergie et l’alchimie emportent tout. Ou comment nous parler de l’histoire compliquée d’un pays tout en gardant un ton léger, à mi-chemin entre la comédie romantique et Vol au-dessus d’un nid de coucou !
7. 30 Days of Lust : la sexualité dans tous ses états
Freddy et Zeno filent le parfait amour depuis leur adolescence, mais ils n’ont jamais connu autre chose que leur couple. Zeno encourage Freddy, plutôt réticent, à se lancer un défi : pendant 30 jours, ils peuvent coucher avec qui ils souhaitent. Les aventures sexuelles de Freddy et Zeno prennent des tournures auxquelles ils ne s’attendaient pas. Ce mois de non-exclusivité va-t-il renforcer leur amour ou au contraire briser leur relation ? That is the question !
En attendant, on est là pour suivre leur diverses rencontres, comme celle de Freddy qui en apprend plus sur l’orgasme de la prostate, tandis que Zeno réalise que certains fantasmes (comme coucher avec son ancien professeur) feraient mieux de le rester ! Cette comédie allemande “sex positive”, écrite par Bartosz Grudziecki, explore avec humour et justesse les challenges du couple moderne et la notion d’exclusivité.
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