Déjà quatre ans depuis la sortie américaine du sixième et dernier tome de Scott Pilgrim. Si le personnage a pu continuer à occuper l’espace culturel avec l’adaptation cinéma et les rééditions luxe et couleur des livres, son auteur, lui, était resté plutôt discret. Il faut dire qu’après un tel succès, le canadien Brian Lee O’Malley était attendu au tournant.
Et c’est cet automne qu’il a fait son grand retour, autant en VO qu’en VF, avec la sortie du roman graphique Seconds. Cette fois-ci, pas de longue série imprimée en noir et blanc sur mauvais papier en taille manga : avec un nouvel éditeur et un nouveau format couleur et couverture cartonnée avec jaquette, ce Seconds se veut nouveau départ.
Exit Scott et ses dramas amoureux : la nouvelle héroïne imaginée par O’Malley se nomme Katie, et son principal problème, c’est son restaurant. La jeune chef gère le Seconds (comme dans demander des « seconds », se resservir, parce que c’est bon), mais a tout misé sur un nouvel emplacement en ville, dont elle serait la seule et unique gérante. C’est au moment où le projet commence à engloutir toutes les économies de Katie, qui doute déjà assez comme ça, que l’Ex, avec un E majuscule, refait surface.
Perdue dans sa vie pro, sa vie sentimentale, ses amitiés, Katie aimerait parfois pouvoir tout recommencer. Et grâce au mignon mais farouche esprit qui réside en secret chez Seconds, c’est possible. Faire un vœu, manger un champignon magique, aller se coucher, se réveiller… C’est aussi simple que cela, à condition de ne le faire qu’une fois. Une seule.
Bon. Peut-être deux. Trois ? Allez…
Seconds
est relativement classique, tant dans ses thèmes que sa construction. C’est une énième histoire mettant en garde contre ce que l’on souhaite, saupoudrée de drame en mode effet papillon où chaque correction du passé entraîne de nouvelles conséquences imprévues… jusqu’à ce que l’héroïne comprenne que certaines choses ne peuvent pas être changées et qu’il faut vivre et affronter ses choix passés.
L’histoire se résumant à cela et tenant en un volume, on peut facilement se laisser décevoir par Seconds. Mais ce serait passer à côté de tout le reste, tous les petits détails qui renouvellent cette suite de clichés. Si Katie est souvent pénible, le reste du casting est fabuleux et hétéroclite, mettant en scène plusieurs genres, sexualités et couleurs de peau sans jamais que cela ne soit ce qui définit les personnages. La plupart d’entre eux hérite d’ailleurs d’intrigues secondaires qui contribuent à donner de l’épaisseur au livre, à en faire plus que ce à quoi on pourrait s’attendre.
Surtout, le style ultra mignon et dynamique de Brian Lee O’Malley fait toujours aussi mouche. On se surprend à rire de l’enchaînement de quelques cases, quand on ne repère pas une petite référence discrète à Scott Pilgrim planquée par-ci par-là (oui, manger du pain rend gros). Par contre, les clins d’œil à la culture geek, aux jeux vidéo et à la pop culture ont quasiment disparu de ce Seconds, qui en devient plus accessible mais moins novateur, moins en avance sur son temps.
Plus classique mais plus cadré, mieux maîtrisé, ce Seconds mérite que l’on s’y attarde, que l’on se laisse toucher. Si Brian Lee O’Malley ne renouvelle pas l’exploit qu’était Scott Pilgrim, il livre là une nouvelle œuvre solide, qui dit de jolies choses de façon simple. De plus l’objet est très beau et se glissera sans peine mais avec beaucoup de swag sous le sapin !
Wink wink — idée cadeau pour tes parents tes potes ta moitié tout le monde — wink wink.
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