Il y a peu, j’ai organisé un saut à l’élastique avec un couple d’amis. L’inscription s’est faite facilement puisque nous n’avions pas de contre-indication médicale (ce n’est pas trop conseillé aux personnes qui ont des problèmes de coeur). Le saut a été fixé au mois suivant. Je suis passée par plusieurs stades pendant cette attente…
- L’excitation extrême : « Ouaaaah c’est trop cool, je vais enfin le faire ! J’en rêve depuis toute petite !! »
- La blasitude de l’impatience : « Bon, c’est loiiiiiiiin… »
- L’effroi : « Mais pourquoi j’ai accepté ? Je ne veux pas mourir ! J’ai encore rien fait de ma vie ! »
- Bon, j’ai plus le choix de toute façon : « Ça se rapproche ! Ça va être trop bien ! Et maintenant que je m’y suis engagée je ne reculerai pas ! Puis j’ai déjà envoyé le chèque quoi… »
- Petit souci dans l’organisation, la panique : « Quoi ?! On n’a plus de voiture pour y aller ? Naaaan je veux y alleeeeer ! J’en rêve depuuuuis si loooonngtemps ! »
- Je monte dans la voiture, c’est le grand jour !
L’angoisse…
Nous sommes partis tous les trois, avec une amie et son copain, au petit matin. Je ne ressentais que peu de stress, mais beaucoup d’excitation : j’avais envie d’y être déjà ! Après s’être perdus quelques fois en route, notre chauffeur (le seul homme de notre petit groupe) nous a montré du doigt le pont d’où nous devions sauter avec un petit « Voilà, on y est ! » teinté d’un mélange d’angoisse et d’envie.
Mon cœur a fait un énorme bond dans ma poitrine (avec du recul, je pense qu’il a eu peur de s’arrêter, le pauvre !) et ma tête s’est vidée d’un coup. J’ai réalisé que cela allait vraiment arriver, que ce n’était pas un rêve !
Après être descendus de la voiture, nous sommes allés chercher nos papiers (dans une espèce de cabane/bar) pour connaître l’heure de notre passage. Nous avons ensuite fait un tour sur le pont, histoire de voir à quelle sauce on allait être mangés, et on a fumé la cigarette du condamné. Après avoir mis nos maigres possessions dans la voiture, nous nous sommes placés dans la première file d’attente, celle qui permettait d’être équipés.
Un monsieur avec une veste indiquant « staff » et un grand sourire nous a pris notre petit bout de papier où nos noms/prénoms, date et heures de passage étaient notés. Quand je dis nous, c’est la fille devant moi et moi, parce qu’à ce stade là mes deux petits camarades étaient collés l’un contre l’autre à s’embrasser avec la passion du désespoir.
Le monsieur nous a fait signe d’avancer, et il nous a envoyé nous peser avant de nous inviter sur un espèce de petit rectangle de pelouse en plastique sur laquelle on se tenait docilement (on tenait à peine à quatre dessus). C’est là qu’il nous a équipés tout en nous détendant. Petites phrases cultes :
« Quoi ça ? Aaah ! C’est ton parachute, si l’élastique casse tire dessus ! »
« J’ai presque plus de matos’… Bah c’est pas grave ! Je vous en donne des usés ! »
Charmant monsieur ! Mais ça a marché puisque nous riâmes de bon cœur (non c’est faux, ce n’étaient pas du tout des rires nerveux, arrêtez de juger).
Une fois équipés d’un baudrier et d’espèces de jambières, nous avons repris l’attente, cette fois dans la deuxième (et dernièèère) file. Les gens y étaient plus agités, on sentait bien que notre tour se rapprochait ! Après des rire nerveux, des encouragement pour les plus angoissés et de gentilles moqueries pour les autres, le tour de la fille devant moi a fini par arriver.
Elle avait 17 ans et presque envie de partir. Je l’ai encouragée, elle s’est avancée, le monsieur lui a parlé un peu (mais je n’entendais pas tout), elle a grimpé les marches qui permettaient de monter sur la rambarde du pont… et a sauté sans marquer la moindre hésitation ! À ce moment précis, ébahis, on a tous pensé la même chose, et on a entendu quelqu’un dans la file derrière nous dire : « Ouahou ! Elle a du cran cette petite ! ».
L’ivresse du saut
Le staff a remonté l’élastique, le cameraman a préparé sa caméra, et pendant ce temps-là je me suis sentie très nerveuse : j’avais mal à la tête, et je n’arrivais pas à rester en place. Et d’un coup, c’était à moi. On y était. Le moment fatidique n’était plus qu’à quelques secondes. Je suis montée sur une caisse (pour être à la hauteur de la première marche), et un gentil monsieur s’est approché et m’a demandé si j’avais peur.
J’ai répondu «
Oui », un peu crispée, et il m’a dit que c’était normal, qu’on avait tous peur mais que ça allait bien se passer. Il m’a demandé d’où je venais, et figurez-vous que j’ai dû réfléchir pour répondre ! Du coup il m’a vannée, tout le monde a rigolé — et moi aussi. Il a fini de m’attacher à l’élastique (par les pieds donc), et un autre membre du staff est venu tout recontrôler et me dire les consignes de sécurité (que j’ai dû entendre une bonne dizaine de fois pour les sauts précédant le mien).
Elles sont simples : ne toucher à rien et pousser fort ! Rien de plus simple en théorie… Il m’a accompagnée pendant que je montais les marches, mais au moment de monter sur la dernière j’ai eu la TROUILLE DE MA VIE.
J’ai regardé en bas, et j’avais l’impression que rien ne me retenait ! Il m’a encouragée, et je suis montée quand même. Mais quand il a commencé le décompte, je me sentais incapable de le faire. Quand je le lui ai dit, il m’a dit de redescendre. La petite voix dans ma tête a crié : « MAIS NON JE SUIS VENUE POUR SAUTER ! », et je n’ai pas bougé (j’ai jamais dit que j’étais logique). Il a insisté et je suis redescendue, mon cœur battant la chamade et tout mon corps pris de tremblements incontrôlés.
Le moniteur m’a rassurée, mes amis m’ont crié des encouragements, et j’ai commencé à leur répondre, mais il m’a demandé de me concentrer sur sa voix et sur moi-même. Plus rien n’existait à part cette voix qui m’encourageait, qui comptait les marches avec moi, et qui a repris le décompte : « 3, 2, 1, GOOOOO, POUSSE FOOORT ANAÏS ! ». Je me suis avancée, j’ai hésité un peu (ça faisait vachement haut quand même) et puis je me suis laissée tomber en avant, ne me rappelant qu’au dernier moment de pousser sur mes jambes.
D’un coup, ma peur du vide a disparu (apparemment le vertige ne se ressent que si nos pieds touchent le sol ), et une incroyable puissance m’a envahie : je l’avais fait ! Je tombais encore et encore, tout en ressentant tout un tas de sensations difficiles à décrire tant elles étaient entremêlées et confuses. J’étais comme dans un tunnel de verdure et de lumière ; tout s’entremêlait, je ne voyais que ce qui était devant moi… Et je m’en souviens très peu.
Toute mon attention s’est fixée sur ces sensations nouvelles : je me sentais tomber sans être retenue (c’est pas une sensation courante dans la vie, ça !), et tout mon corps appréciait ! Je ne saurais dire si ma chute a duré dix secondes ou un siècle, j’avais l’impression d’avoir vécu une vie entière (le délire de l’élastique), et en même temps j’avais l’impression d’avoir tout juste sauté.
Au moment où je commençait à me dire que je n’en pouvais plus (mais que j’en voulais encooore !), j’ai entamé mon premier rebond. J’ai ressenti une légère décélération m’indiquant que j’étais ramenée en hauteur. Je montais, je montais, et je me suis rendu compte que j’avais oublié de crier pour la vidéo ! J’ai donc lancé un « Wouhouuuuuuuuuuuuu ».
Entre cette montée et la redescente, il y a eu un instant magique, comme si je flottais, et quand je suis descendue à nouveau, cette fois je me suis totalement détendue. J’avais senti que je partais en toupie, mais j’ai vite arrêté d’essayer de me remettre droite, et je me suis complètement laissée aller.
Les rebonds qui ont suivi étaient tellement doux que je ne savais plus si je montais ou si je descendais, mais je m’en moquais, j’étais bien ! Et je l’avais fait ! Vous vous rendez compte ? Moi la trouillarde, j’avais sauté d’un pont de 103 mètres de haut ! Je me sentais profondément heureuse et incroyablement vivante.
En gros.
Puis une petite voix venue de plus bas m’a demandé d’attraper la corde entre mes jambes. Je me suis redressée tant bien que mal (bah oui, j’étais attachée par les pieds !), et du pont les gentils messieurs ont manoeuvré l’élastique pour me faire atterrir (en douceur et guidée par le monsieur dont la voix avait retenti quelques secondes plus tôt) sur un grand tapis bleu.
Un homme m’a décrochée, et on a marché 15 petits mètres contre un rocher (aménagé comme une via ferrata) pour rejoindre le chemin aménagé qui nous ramènerait jusqu’à notre voiture. Il m’a laissée m’asseoir sur un gros rocher en bas de ce chemin où j’ai attendu mes deux comparses (qui ont sauté d’un coup d’un seul, comme des grands !). Nous avons ensuite commencé notre ascension, pas facile avec les jambes qui tremblotent.
Arrivés tout en haut, j’ai laissé mes deux compagnons se prélasser dans la voiture et je suis retournée dans la « cabane » visionner mon saut. J’ai pris le DVD en échange d’un peu de ma fortune, et j’ai récupéré nos diplômes du premier saut — je suis très fière du mien !
En conclusion…
Nous sommes repartis avec un sourire jusqu’aux oreilles : nous n’oublierons jamais ce premier saut, et je n’oublierai jamais ce monsieur qui m’a aidée à surmonter ma peur !
Chaque saut est unique, chaque personne est unique… Alors lancez-vous les madZ, et racontez-nous à quel point c’était exceptionnel !
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On a hâte de vous lire !
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Les Commentaires
Troooooop biiiiien!
Voilà, je suis trop fière de t'avoir aidé à sauter