Initialement publié le 16 septembre 2016
Cet été je suis allé au Japon et j’ai mangé plein de trucs, partout, tout le temps. Au milieu de cet investissement sur la taille de mon boule, une constante : la qualité du riz. Peu importe où, peu importe le plat, le riz était si bon que je n’en laissais jamais une miette. Je le dévorais parfois sans sauce ni assaisonnent, juste pour la beauté du kif. Et c’est en visitant le rayon « cuiseurs à riz » d’une boutique d’électroménager, avec des modèles à plusieurs centaines d’euros, que j’ai compris.
Le rice cooker, la genèse
Ce pays a inventé une gamme entière de produit pour cuisiner un seul et unique ingrédient. J’en voulais un. Je voulais moi aussi me rincer les papilles à chaque repas. Il me fallait agir. Ainsi a débuté une longue quête de près d’un mois, à travers plusieurs pays et continents, tout ça pour remplacer mon cuiseur Tang Frères à vingt balles qui m’allait très bien jusque là. Suivez-moi.
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Le rice cooker japonais et le riz parfait
Le riz en théorie, c’est pas super compliqué : tu le plonges dans de l’eau chaude, il s’imprègne et gonfle, puis tu le manges. Le riz c’est comme des pâtes, sauf que ça pousse par terre. Merveilleux. Là où ça devient intéressant, c’est dans les subtilités de cuisson : quelle quantité d’eau, quelle température, quelle pression ?
Le riz est tel le go : il faut deux minutes pour comprendre les règles, et une vie pour le maîtriser.
(Presque) moi quand j’ai compris la dure loi du riz.
Passer de la casserole au cuiseur bas de gamme est déjà un bond en avant. Une simple cuve qui chauffe avec un couvercle et un trou pour évacuer la vapeur, ça change tout ! Bien sûr, tu ne contrôles pas vraiment la température ni le temps de cuisson, mais en ajustant ta quantité d’eau tu peux déjà adapter un peu. Cependant, tel Leo dans Inception, nous devons aller plus profond.
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Les rice cooker japonais proposent de monter d’un cran dans le respect, en proposant plusieurs programmes en fonction de ce qu’on cuisine. Riz blanc, gluant ou brun : à chaque type de grain son temps de cuisson et sa température. Ces modèles sont électroniques, c’est-à-dire qu’une puce contrôle les paramètres de cuisson à mesure pour un résultat toujours au top. C’est ce point de détail qui fait toute la différence, qui empêche ces modèles de se planter. À moins de vraiment faire n’importe quoi question eau, le riz sera toujours réussi.
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Il est également possible de programmer la cuisson à l’avance, histoire de rentrer chez soi au moment où le précieux riz est prêt, pantoufles sous la table et tamago kake gohan en main (riz, œuf cru et sauce soja).
On pourrait s’arrêter là, satisfait•e d’être monté d’un cran dans la qualité, abandonner le Japon et rentrer chez nous. Cependant, tel Jack dans LOST, nous devons y retourner.
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Car on peut aller plus loin, on peut aller caresser le Graal des rice cookers : la cuisson à induction. Là où une résistance chauffante sous la cuve peut accrocher au fond ou moins cuire sur le dessus, l’induction promet autant d’amour à chaque grain de riz. C’est la garantie qu’un plan se déroule sans accroc et ça, que ce soit à l’Agence tout risques ou chez mad, on adore.
Mais l’induction c’est aussi synonyme de tarif délirant en importation. Peut-on seulement se procurer ce genre d’engins chez nous ? Doit-on se résoudre à la contrebande ? Le jeu en vaut-il la chandelle ? Passons au cas pratique.
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Se procurer un rice cooker digne de ce nom
En France il n’y a aucun problème pour se procurer un cuiseur simple. On en trouve partout, sur Internet ou en boutique, de marques étrangères ou françaises, de vingt à cent euros en fonction des à-côtés (cuisson vapeur par exemple). Mais qui veut se satisfaire de ça ? Si vous êtes encore en train de me lire, c’est que vous voulez le top du game (ou vous moquer de mes obsessions, mais ça ce n’est pas super sympa et bienveillant).
Le rêve ultime.
La marque reine des rice cooker japonais, même s’il en existe d’autres très bien, c’est Zojirushi. Si le logo en forme d’éléphant est super mignon, les appareils sont laids mais fonctionnels. Et surtout, comme c’est la numéro une sur le marché, c’est la marque que l’on trouvera le plus facilement chez nous. Parce que si vous pensiez acheter un cuiseur directement au Japon, vous vous fourrez le doigt dans la prise de courant.
Non seulement les prises nécessitent un adaptateur, mais le voltage japonais est de 110V quand l’Europe est servie en 220V. Brancher un cuiseur japonais du Japon chez nous, c’est donc prendre quelques risques (une pensée pour la Super Famicom d’un ami achetée d’occasion sur Amazon JP qui a cramé en quelques jours d’utilisation).
La raison pousse donc à se tourner vers des modèles 220V dédiés à l’import, qu’ils viennent de Hong Kong ou d’Angleterre. Plusieurs sites proposent des modèles électroniques d’entrée de gamme, mais une simple comparaison avec les prix japonais permet de se rendre compte à quel point on perd au change.
Payer le prix d’une voiture de course pour rouler en deux chevaux, c’est un tantinet désagréable… ou comment je me suis retrouvé désemparé, à genoux devant mon ordinateur, à maudire le jour où j’ai goûté mon premier katsu-curry. Je n’avais plus que les commentaires ravis des acheteurs français sur Zojirushi pour me consoler. J’allais céder, quand soudain : une illumination.
La Corée aime le riz, la Corée est en 220V avec des broches compatibles avec nos prises. J’ai changé mon fusil d’épaule et me suis mis à écumer les bas-fonds des sites d’import coréens. Parce que là-bas, la marque reine Cuckoo propose non seulement des modèles à induction pour un prix honnête, mais leurs machines ont le sens du style (et parlent) (et font de la musique) !
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Sans parler de leurs publicités où un beau gosse fait du riz pour pécho (notons l’effort minimal du mec vu que ça implique seulement d’appuyer sur un bouton, on n’est pas vraiment dans Toque Chef).
https://youtu.be/uwcrVEn9soc
Galvanisé par cette porte de sortie, j’ai terminé sur Gmarket, l’équivalent local de eBay. Plus personne ne m’entendait crier, ne serait-ce que parce que peu de gens sont assez malades pour investir dans un tel matériel. À cette profondeur dans la folie, les avis de consommateurs n’existent plus. J’étais seul. Des heures de comparatifs et de lutte avec Google Translate plus tard, je me suis dégoté un modèle d’une odieuse beauté.
Pour le prix d’un import japonais d’entrée de gamme, je me retrouvais avec un prototype d’avion de chasse furtif coréen. Le temps de m’assurer de trouver une notice en anglais d’un modèle avoisinant (l’impression d’être Daniel Jackson qui déchiffre du Goa’uld), j’ai commandé.
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Le rice cooker : le test du Saint Graal du riz
Dix jours et cent euros de douane plus tard (je chiale et maudis l’Union Européenne de ne pas s’étendre jusqu’en Corée), je déballe l’énorme précieux. L’appareil est beau, revêtement en métal brossé, multitudes d’éléments détachables auxquels je ne comprends rien.
J’arrive tant bien que mal à activer le guide vocal en anglais (IT’S ALIVE !) et prévient ma team de goûteuses sûres, Mymy en tête, qu’elles peuvent passer. Une heure de cuisson plus tard (en mode normal, non turbo, non super chaleur, car oui il y a trois modes rien que pour le riz blanc), nous boulottons notre riz blanc dans un silence religieux.
« Ouais, okay, c’est pas mal j’avoue. »
Est-ce que c’est « pas mal » au point d’avoir passé un mois à étudier le marché ? Au point de claquer plusieurs centaines d’euros ? Au point d’imprimer des notices en coréen pour trouver les correspondances avec les signes cabalistiques sur ma machine ? Oui.
JE NE REGRETTE RIEN, JE REFERAIS TOUT PAREIL.
Mon riz est merveilleux, doux, chaque grain vit sous ma langue, c’est un délice je décède. Adieu tous les autres riz, ne m’invitez plus au japonais du coin, c’est fini désolé. Je n’ai pas changé de division, j’ai changé d’univers. Mais ça, c’est aussi parce que j’ai pris la peine de me renseigner sur les différentes variétés de riz,et que je suis allé exprès en acheter à… hé mais, stop !
Lâchez-moi je vous dis ! Les gens doivent savoir !
[Éclate en sanglots.]
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Les Commentaires
Il y a plusieurs modèles à présent de cuckoo sur Amazon.