Impossible de passer à côté de ces affiches 4 x 3 mètres en ce moment dans nos tunnels parisiens :
Le Jeu de Paume consacre une rétrospective André Kertész ! Vous avez jusqu’au 6 février pour y aller – et c’est ce qu’on vous recommande.
On y a fait un tour cet après-midi. En plus du plaisir de se réfugier dans la chaleur d’une expo, on a trouvé celui de découvrir de merveilleux clichés – à envisager comme autant d’invitations à sublimer l’Instant. Le photographe hongrois y a distillé son goût « de la campagne, des animaux, des flâneries et des gens simples ».
Ce qu’il y a d’attachant dans l’œuvre de Kertész ? Cette espèce de proximité inhérente à chacune de ces photos : l’homme envisage son art comme « un journal intime visuel » et tout se passe comme si la sensibilité de l’artiste était son unique filtre. Par exemple, lorsque Kertész est envoyé à la guerre, sa motivation n’est pas (à la différence de ses contemporains) celle de constituer un témoignage historique du conflit ; le jeune homme qu’il est à l’époque concentre plutôt « son attention sur les activités quotidiennes des soldats ». La photographie devient alors un moyen de « mettre la guerre à distance » – l’éloge à la vie quotidienne est un véritable pied-de-nez au drame des combats.
Le constat échappe difficilement au visiteur : les photos de Kertész sont plus poétiques que factuelles – qu’il s’agisse des clichés pris de son jeune frère Jenö, de touchants autoportraits avec sa femme (on les imagine volontiers riant de bon coeur ensemble, une fois la photo prise), des rues de ce Paris qu’il a tant aimé, ou encore des toits de New York.
Entre les murs taupes des différentes salles, on part à la rencontre de l’homme qui a côtoyé Mondrian : Kertész nous offre la vue de l’atelier du peintre, quand ce ne sont pas des portraits de celui-ci. À ne pas rater : la photographie des lunettes et de la pipe du pionnier de l’abstraction.
Un petit pan de l’exposition est dévolu à son travail sur le format d’époque de « la carte postale » (9 x 14 cm) : le hongrois s’est pris de passion pour ce format très utilisé alors par les amateurs et portraitistes ambulants. L’avantage de ce format est son développement rapide et bon marché ; ce qui a permis à Kertész de multiplier ses clichés très pratiques, les vendre pour 3 fois rien ou les envoyer à ses proches.
Si vous avez la chance de voir cette exposition, on vous conseille de vous arrêter sur :
- les clichés de nuit de Montmartre (une ambiance très hitchcokienne s’en dégage)
- la série « Distorsion » de photos de nus réalisées pour le magazine de charme Le Sourire
- un numéro spécial mode du célèbre magazine Vu, pour lequel il a longtemps travaillé (la double page est un genre de street styles d’époque intitulé « L’élégance du métier » – on y découvre, entre autres, les portraits en pied d’une crémière, d’une marchande des Halles, d’un boucher et d’un mécanicien)
- le Nageur sous l’eau, sans aucun doute la plus célèbre de ses photos
- ses polaroids réalisés en fin de vie.
On ressort de l’expo avec la sensation de s’être baladé dans un roman de Romain Gary – la jouissive lenteur (quelque chose de l’ordre du repos), la déambulation entres les émotions (on est trimballés d’un souvenir à l’autre), la sensibilité exacerbée de Kertész, probablement.
Découvrez dans ce diaporama quelques photos sélectionnées par la rédac !
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Et pour celles qui ont vu / iront voir la rétrospective : donnez nous vos avis !
En attendant, je vais me faire un thé fraise-vanille, mettre une nappe rouge coquelicot sur ma table basse et me replonger dans mon herbier qui date de la 6e – c’est ce que l’écriture de ce papier m’a inspiré.
— Rétrospective André Kertész au Jeu de Paume, tarif : 5,5 euros pour les étudiants ; gratuit pour les moins de 26 ans le dernier mardi du mois de 17 à 21h. Plus d’informations sur http://www.jeudepaume.org/
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