Cet article a été rédigé dans le cadre d’un partenariat avec KMBO. Conformément à notre Manifeste, on y a écrit ce qu’on voulait.
– Article initialement publié le 2 septembre 2016.
En 2014, le monde de la danse classique se voyait secoué par l’élection de Benjamin Millepied à la direction de la danse de l’Opéra de Paris. Loin de l’image habituelle de la vénérable maison, le chorégraphe de ballets contemporains lui insufflait un souffle moderne.
Son premier test, c’était en quelque sorte sa première création avec les danseurs de l’Opéra en tant que directeur. Et quel marathon : pour 33 minutes de représentation, il ne disposait que de 40 jours — pendant lesquels il lui fallait également assumer ses autres fonctions.
Désireux de garder une trace de cette création, Benjamin Millepied décide de laisser Thierry Demaizière et Alban Teurlai (à qui l’on doit notamment les célèbres portraits de Sept à Huit) le suivre dans ses journées à l’Opéra.
Le compte à rebours était lancé, et Relève était né : d’abord sous la forme d’un documentaire d’1h30 diffusé sur Canal+, et maintenant sous sa forme intégrale (2h) au cinéma.
Le portrait d’un révolutionnaire
Relève se développe autour de Benjamin Millepied, en dressant un portrait délicat. Plein d’énergie, toujours en mouvement et absorbé par sa création, il n’écoute parfois que d’une oreille et la caméra court après lui en même temps que sa secrétaire ! « Est-ce que tu sais où est Benjamin ? » est la réplique qui revient le plus dans le documentaire.
Avec cet hyperactif, c’est tout un choc des cultures qui se dessine à mesure que Relève progresse. Ce portrait puissant le montre quasi seul face à la grosse machine archaïque qu’est l’Opéra. Bouleversant les codes, il fait tout pour moderniser et actualiser le fonctionnement de ce lourd paquebot.
Ayant commencé la danse en Afrique, exerçant aux États-Unis, ses méthodes sont aux antipodes des traditions classiques françaises.
Copyright Photos Emmanuel Guionet
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C’est ainsi tout une critique des traditions archaïques pesant sur la danse classique et surtout sur l’Opéra de Paris qui se dessine : on sent le poids des autres dirigeants qu’on aperçoit furtivement ou devine, de la hiérarchie.
On voit Millepied se débattre face aux lourdeurs et obstacles inhérents à cette structure : ce sont des préavis de grève, une organisation compliquée dans laquelle rien n’est informatisé, dont les quelques ordinateurs sont de vieux mastodontes peinant à montrer correctement des vidéos… La mise en scène épurée de sa création (quelques bancs) se transforme presque en une épopée.
Relève dresse ainsi le portrait d’un révolutionnaire. Millepied changeant littéralement la base de la grande maison : exit les planchers inadaptés, trop durs. Sorte de force tranquille qui parvient malgré tout à déplacer des montagnes, il casse la hiérarchie élémentaire, allant chercher le corps de ballet pour leur donner les premiers rôles de sa création. Pour la première fois il donne également à une danseuse métisse la place d’étoile.
Copyright Photos Emmanuel Guionet
Il pousse les danseurs à parler quand ils ont mal et se bat pour enfin installer une médecine et un vrai suivi médical de ces athlètes de haut niveau. Il ouvre une plateforme numérique, cherchant à ouvrir et diffuser la danse — qui ne doit pour lui ni représenter une élite, ni ne lui être réservée.
On a dans Relève l’impression de voir une performance de Millepied, toujours en réflexion, en mouvement, à danser, écouter la composition pour le ballet, marcher, photographier (le travail méta est sans fin)…
L’histoire d’une création
Cette infiltration dans l’Opéra est captivante, tant on a envie de savoir s’il va réussir à faire changer les choses, et qu’il est passionnant de voir ce qu’il se passe avant et derrière les représentations. Le documentaire met en lumière le corps de ballets, le travail de création et de répétition — jusqu’à une incursion dans une soirée des danseurs.
Copyright Photos Emmanuel Guionet
Relève est rythmé par le compte à rebours inexorable qui découpe les avancées du ballet de Benjamin Millepied. Du casting à la première représentation, nous suivons la naissance des mouvements, les répétitions, les tâtonnements, les blessures… Le processus de création est saisi dans toutes ses nuances, entre émotions et ratés, et excitation de l’accomplissement final.
Une sublime éloge de la danse
Et tout découle du rythme, montré comme la base du mouvement. Il est au cœur du film ; de la création de Millepied qui se base sur la musique qu’on lui a spécialement composée bien sûr, mais également du montage du documentaire et de son compte à rebours, accompagné d’une musique électro enivrante.
Relève, c’est ainsi une éloge de la danse, du mouvement, de la passion et de la grâce.
Copyright Photos Emmanuel Guionet
La musique occupe également une place centrale, à l’Opéra comme dans le montage du docu. Elle accompagne les corps, sur lesquels la caméra s’arrête, qu’elle suit dans leur mouvements, achevant de les sublimer. Le tout est ainsi sublime et gracieux, et d’une puissance telle qu’on a l’impression de se mouvoir avec les athlètes – d’ailleurs, impossible de ne pas avoir envie de danser en voyant Relève (même si, bon, on se rend vite compte qu’on a pas forcément les possibilités d’imiter les pros).
Des moments de respiration complètent la narration orchestrée d’une main de maître(s) — avec d’un côté les running-gags de la secrétaire de Benjamin Millepied cherchant à savoir où il est et les problématiques ubuesques qui s’élèvent quant à la construction des bancs, et de l’autre des plans de l’opéra et des solos superbes des danseurs.
Copyright Photos Emmanuel Guionet
D’une photographie léchée, le documentaire est ainsi exaltant jusqu’à la dernière minute. Déambulant dans le labyrinthe qu’est l’Opéra, il est une sorte de jeu de piste se solvant d’un accomplissement paradoxal : à la fois création aboutie et réussie, et fin du poste de Benjamin Millepied.
Gagne 5×2 places ou 10 affiches dédicacées par les réalisateurs!
Si tu veux aller voir ce beau film, n’hésite pas à remplir ce formulaire! Il ne te restera plus qu’à foncer en salles le 6 septembre. Tu peux également gagner une des dix affiches dédicacées par les deux réalisateurs, Thierry Demaizière et Alban Teurlai.
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Fin du concours le dimanche 4 septembre à 23h59.
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