Je crois ne pas déroger à la règle du complexe d’Œdipe les ami•es. Qui n’a jamais vu son papa comme l’incarnation du super-héros sur Terre ? Lorsqu’il te porte sur ses épaules… n’est-ce pas le meilleur sentiment qui existe ?
À mes yeux, mon papa n’avait aucun défaut — il faut dire que c’est un peu l’homme couteau-suisse, vous voyez. Il a une culture générale épatante, il est investi politiquement, il est sportif, pompier, écolo ; il sait dessiner, jouer de la musique et j’en passe.
Mais ce qu’on ne voit pas à cet âge, c’est ce qu’il y a au-delà. C’est le coté humain de nos parents, n’est-ce pas ?
Maladresse et imperfections
Un jour, tu te rends compte que ton père est imparfait.
Un jour, tu te rends compte que ton père est imparfait (ça vient souvent après l’étape où tu comprends que tes parents ne s’appellent pas « papa » et « maman » mais qu’ils ont des prénoms — j’ai été très marquée par cette pensée quand elle est venue à moi).
Pour ma part, c’est en partie arrivé parce que ma maman m’a parlé de nos histoires de famille du côté de mon papa. J’ai peu à peu pris conscience qu’il ne parlait JAMAIS de ses sentiments, de son passé, qu’il était maladroit quand il essayait de me réconforter, qu’il exprimait ses frustrations et déceptions en râlant contre mon grand frère ou le monde en général.
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Et puis vint la puberté. Comme l’avait annoncé le Dico des ados (consciencieusement lu à l’âge où il ne sert pas encore, bien sûr), la seule marque d’affection de mon papa — les câlins — est devenue un peu plus maladroite, gênée peut-être par ma poitrine pourtant pas opulente.
Comment régler cette maladresse ? Au début, j’ai eu beaucoup de mal à m’y retrouver. Déjà que la puberté est un moment bouleversant, ce rejet indirect me rappelait que l’enfance était définitivement finie.
Une relation père-fille en surface
Heureusement pour moi, avec de la détermination, j’ai retrouvé les bons vieux câlins — ça aura été long (presque quatre ans), mais ça vaut le coup !
En ce qui concerne notre manque de conversation sur le plan émotionnel, j’ai appris à faire avec. Ça rend notre lien très différent de celui qu’on peut montrer dans les films.
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Je ne parle jamais sentiments avec mon père et je n’aime pas pleurer devant lui, mais je discute de beaucoup d’autres choses avec lui.
J’ai compris cette année que mon père était définitivement mortel.
Je me suis adaptée sans doute : j’aime globalement les mêmes choses que lui, la musique, dessiner, l’environnement, la natation. On partage ça, c’est la manière que j’ai trouvée de garder un lien avec lui. Et puis il reste drôle quand il est de bonne humeur, alors on continue quand même à se payer de bonnes tranches de rigolade !
J’ai compris cette année que mon père était définitivement mortel. Jusque-là, j’essayais tant bien que mal de le maintenir sur son piédestal (difficile vu son caractère vraiment lunatique et ses nombreuses remarques désobligeantes quand il est ronchon). Mais cette année est spéciale : c’est celle de mon départ de la maison.
Crise d’adolescence et acceptation
Je suis en prépa et je vis à trois heures de chez mes parents, je ne peux donc pas rentrer très souvent, ce qui me déprimait gravement au début. Et puis il y a eu leur divorce, l’éloignement de mon père, et un gros changement s’est opéré.
On peut dire que j’ai fini par faire une crise d’ado à dix-huit ans, mais mieux vaut tard que jamais ! Pour la première fois de ma vie, j’ai crié contre mon père. Je vous le conseille à tou•tes, si vous entretenez une frustration à cause de non-dits avec vos parents : parlez-en, sincèrement, faites-le avant d’exploser.
Pour la suite, je vous fais un résumé : je suis passée par des stades successifs de colère, de déception, de déni façon « Je m’en fiche de lui »… puis j’ai fini par accepter mon père comme ce qu’il est, à savoir un être humain.
En conclusion…
Mon père reste mon papa que j’aime de tout mon cœur. Je lui reproche encore pas mal de choses parce qu’il pourrait aussi faire des efforts pour faire un pas vers moi (et surtout vers mes frères), mais j’ai la chance de pouvoir l’avoir pendant encore pas mal d’années à mes côtés, alors comme pour les câlins, je vais continuer à entretenir ce lien un peu fragile.
Un jour, j’aurai une vraie conversation profonde avec lui sans que ça se finisse en silence gênant, j’en suis sûre !
En attendant, je profite de cette bouffée d’oxygène pour me construire ma petite vie de mon côté, et mes parents en resteront toujours le socle.
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