Il y a quelques jours, je sortais des bureaux de madmoiZelle, et j’ai croisé le regard d’un homme. Il m’a fait un clin d’oeil et un sourire qui n’étaient pas de simples gestes de courtoisie. Je me suis alors mise à presser le pas et à regarder le sol, pour ne pas qu’il pense que j’étais « intéressée ». J’ai alors senti quelqu’un qui passait à coté de moi sans s’arrêter et qui m’a lancé :
« Salut toi… »
Ni une ni deux, je me suis retournée avec un regard agacé dans l’objectif de lui demander :
« Oui moi quoi !? »
Avant même de pouvoir répondre, je me suis rendu compte qu’il s’agissait de Fab, mon patron bien-aimé. Je me suis alors mise à rire et l’ai rejoint pour m’excuser. Il ne comprenait pas pourquoi j’avais eu ce regard glaçant. Je lui ai alors expliqué qu’aujourd’hui, j’en avais ras le bol des hommes qui passaient en me lançant un mot sans buts ni objectifs. Un homme qui m’aurait salué et se serait arrêté pour me demander quelque chose (son chemin, mon numéro, la couleur du ciel…) je lui aurais répondu d’une manière tout à fait courtoise.
Malheureusement, ces cas sont rares et je croise de plus en plus d’hommes qui me lancent un mot, qui me sifflent, qui me chuchotent des choses à l’oreille ou qui me klaxonnent sans se retourner. Parfois, quand je les regarde, un sourire fier peut se lire sur leur visage, comme s’ils savaient qu’ils m’avaient mise mal à l’aise.
Avec le temps et les expériences que j’ai vécues, mon corps a adopté un langage propre à la rue et aux transports en commun. J’ai, sans le vouloir, développé un système de défense que j’ai mis du temps à apprivoiser complètement.
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Être confrontée à la dure réalité du harcèlement de rue
À plusieurs reprises, je me suis rendue compte que j’avais adopté un code de conduite dans la rue, pour pouvoir éviter les hommes qui me harcelaient.
Je me souviens que plus jeune, je marchais avec un sourire jusqu’aux oreilles. En écoutant de la musique, je gambadais naïvement lorsque je me rendais à la boulangerie ou à l’école. Plus le temps passait, plus
j’ai constaté que ma bonne humeur était reçue comme une invitation par des nombreux hommes qui pensaient que j’étais ouverte aux rencontres amoureuses. Le fait qu’un homme vienne me parler ne me gêne pas plus que ça. C’est en fait la découverte du harcèlement qui allait me faire totalement changer d’attitude.
Les premières fois où j’ai été insultée pour avoir refusé de donner mon numéro ont eu un impact terrible sur mon comportement. J’ai commencé à avoir peur des hommes qui venaient me parler, peur de leurs réactions quand j’aurai refusé leurs avances… La première fois où j’ai reçu une main au fesses m’a traumatisée. Je me suis alors mise à changer de trottoir quand je voyais un homme qui me regardait avec envie… Je baissais les yeux quand on me fixait dans le métro pour ne pas que l’homme en question pense que j’étais « intéressée ».
Après la fois où un homme m’a coincée dans les allées du métro parisien, en me disant qu’il allait me « baiser comme une salope », avant d’être chassé par un passant venu me secourir, je me suis mise à toujours regarder le sol et à marcher aussi vite que je pouvais, afin d’atteindre rapidement l’endroit où je devais me rendre…
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C’est lorsque je me suis renseignée sur le harcèlement de rue et que j’ai appris que ça n’était pas moi qui avais la mauvaise attitude et qui devais m’adapter au comportement de quelques hommes mal intentionnés, que j’ai commencé à apprendre à répondre, et à ne plus me laisser faire.
Arrêter de fuir pour enfin se défendre
Aujourd’hui, lorsqu’on m’interpelle dans la rue, je réponds toujours. Lorsqu’on m’appelle, je me retourne pour savoir ce que la personne souhaite. Contrairement à plusieurs de mes amies qui ne répondent jamais aux sollicitations répétitives dans la rue ou les transports en commun, je prends toujours quelques secondes pour parler avec celui qui m’a appelée. Il m’a fallut des mois pour réussir à avoir le courage de répondre à quelqu’un qui me criait en pleine rue :
« Hey bébé ! viens un petit peu par là ! »
Alors qu’il y a encore des mois, je n’aurais jamais osé répondre, aujourd’hui j’essaye de comprendre les motivations de l’homme qui m’interpelle et de discuter avec lui. Parfois, je me rends même compte qu’il s’agit d’hommes avec de la conversation, qui semblent comprendre que cette attitude puisse gêner une femme. D’autre fois, je tombe sur des hommes qui se contentent de partir en constatant que je ne répondrais pas favorablement à leur demande.
Dans la plupart des cas, les hommes sont étonnés. Beaucoup d’entre eux ont été habitués à des femmes qui baissaient la tête ou partaient en courant. Je tente encore aujourd’hui d’expliquer à ces hommes qu’il est normal que de nombreuses femmes vivent mal ce genre d’altercations.
Malgré l’assurance dont je peux parfois faire preuve, je me surprends encore souvent à juste regarder le sol ou à éviter les regards. Je n’ai pas toujours la force de répondre pour expliquer aux hommes pourquoi leur comportement n’est pas correct et leur apprendre comment ils devraient se tenir. Parfois je retrouve juste l’attitude de mes 20 ans, lorsque j’avançais en regardant un point fixe et que je mettais mon casque sur mes oreilles. Parfois, je suis juste fatiguée de devoir me défendre face à des hommes qui pensent qu’ils peuvent se servir de moi comme d’un produit de supermarché…
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Les Commentaires
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