La semaine dernière, sans doute pour me signifier son ras-le-bol des câlins, le chat de mes beaux-parents (qui, au passage, lisent ce merveilleux magazine qu’est madmoiZelle, bien le bonjour à eux !), Bichon de son petit nom, m’a bien lacéré le bras et je me suis franchement demandé : pourquoi certain-e-s d’entre nous deviennent cinglé-e-s face aux animaux ? Les animaux ont-ils vraiment un impact sur nos vies ? Est-ce que ce sauvageon de Bichon m’aime ? HEIN ?
Je n’aurais sans doute jamais de réponse à ma dernière question (bordel, j’ai enlevé des tiques grosses comme des raisins de cette boule de poil, est-ce que je n’ai pas gagné un accès illimité aux câlins ?), mais Serge Ciccotti et Nicolas Guéguen, dans l’ouvrage Pourquoi les gens ont-ils la même tête que leur chien, examinent le sujet au travers d’une flopée de recherches scientifiques : quelle influence l’animal a-t-il sur nous ? Sa présence pourrait-elle être utile ?
Les chiens pourraient comprendre ce qu’on leur dit (enfin, vite fait)
Ce n’est pas moi, c’est la science qui le dit. Plus précisément, une équipe de chercheurs-ses (Kaminski, Call & Fischer) a placé dix articles dans une pièce. Ensuite, ils ont demandé à un colley, nommé Rico, de ramener un de ces articles (en nommant l’article, donc). Cette première étape est une réussite : Rico parviendrait à ramener les objets qui correspondent aux demandes des chercheur-ses et aurait même un vocabulaire estimé à plus de 200 mots.
Autre victoire pour notre ami canin, il semblerait que Rico soit capable de « déductions langagières » ; lorsque les chercheurs-ses placent un objet que le chien ne connaît pas au milieu d’objets qui lui sont familiers, et qu’ils-elles demandent à Rico de rapporter cet objet, ce dernier comprendrait que le mot qu’il ne connaît pas désigne l’objet qu’il ne connaît pas. Bluffant, hein ?
Figurez-vous que ce n’est pas tout : les chiens pourraient même interagir avec nous, sans que nous parlions. Par exemple, si vous cachez de la nourriture à un endroit (ou plusieurs), et que vous indiquez ensuite au chien l’endroit où cette nourriture est cachée (en la pointant du doigt, ou en regardant fixement l’emplacement, ou en faisant un simple signe de la tête vers la cachette), celui-ci serait capable de la retrouver !
Dans la même veine, une expérience initiée par Schwab et Huber a démontré que les chiens pouvaient moduler leurs comportements en fonction de l’attention de leur propriétaire : lorsque vous surveillez votre chien, il reste sagement couché. En revanche, lorsque vous détournez votre attention, le chien se lève discrétos pour aller vivre sa vie. EH OUAIS, un chien peut déduire, par des indices « physiques » (l’orientation de votre corps, de votre tête, ou l’absence de contact visuel), qu’il peut aller faire le fifou sans se faire gauler.
La cerise sur le gâteau d’amour des chiens ? Ils sauraient reconnaître leur propriétaire sur des photographies.
Ne nous enflammons pas non plus, selon Ciccotti et Guéguen, les capacités d’apprentissage de Rico et consorts seraient limitées : le chien pourra apprendre par « conditionnement », en jouant… mais ne serait pas capable d’apprendre passivement, spontanément (à la différence de l’humain : lorsque nous sommes enfants, nous apprenons également en entendant les autres parler, en les regardant agir…).
Les chats pourraient réduire notre stress et favoriser les relations sociales
Vous êtes plutôt du côté chat de la force animale ? Voyons quelques éléments issus d’expériences scientifiques à propos d’eux.
Selon une étude menée par Karen Allen (et al.), les chats auraient des effets apaisants sur nous. Pour parvenir à cette conclusion, la chercheuse a réuni des couples « possédant » un chat et leur a demandé d’effectuer un certain nombre de tâches arithmétiques. En parallèle, on place sur l’un des membres du couple des électrodes et des capteurs pour prendre des mesures physiologiques. Pendant un laps de temps limité et avec la diffusion régulière de bruits stridents, les sujets doivent donc réaliser un calcul mental difficile. A priori, la situation devrait donc placer les sujets en situation de stress léger.
Les volontaires de l’expérience étaient soit : seul-e-s, accompagné-e-s par leur conjoint-e, accompagné-e-s par un-e ami-e, ou accompagné-e-s par leur chat.
Manifestement, la présence de l’animal permettrait au stress « physiologique » de diminuer
– plus encore que la présence d’un-e ami-e ou d’un-e conjoint-e. TOUT EST DIT. Pour les chercheurs-ses, la disponibilité immédiate du chat serait rassurante (on voit qu’ils n’ont pas eu à affronter la non-disponibilité du chat de mes beaux-parents) et permettrait de détourner notre attention de la source du stress… Et donc de nous détendre.
Ce n’est pas tout : les chats faciliteraient également les relations sociales. Pour le montrer, Ciccotti et Guéguen ont demandé à une jeune fille de monter dans un bus accompagnée d’un chaton (placé dans une « valise » animalière) et de tourner cette valise de façon à ce que les personnes assises en face d’elle puissent apercevoir l’animal. Des observateurs comptent alors le nombre de personnes qui entrent en conversation avec la jeune fille. Verdict : 12% des gens discutent avec la jeune fille lorsque le chat est présent… et aucun lorsqu’il n’est pas là !
En somme, les chats auraient des vertus apaisantes et pourraient nous servir de prétexte à échanger avec un dixième de la population… Mais ça ne répond pas à la question la plus importante : Bichon m’aime-t-il, et, par extension, vos chats sont-ils attachés à vous ?
Pour étudier cette question, les psychologues reviennent sur une expérience reprenant le principe de la « situation étrange d’Ainsworth ». Au démarrage, ce test a été créé pour observer les relations d’attachement entre un enfant et ses « fournisseurs de soins » – qui sont généralement ses parents. On observe un enfant pendant quelques minutes alors que ses parents ou que des étrangers entrent ou quittent la pièce. L’enfant est-il rassuré, continue-t-il ses activités, explore-t-il son environnement ? Le même test a donc été reproduit avec des chats : comment le chat se comporte-t-il (est-il vigilant, inactif, explore-t-il la pièce ?) lorsque son/sa propriétaire ou un-e inconnu-e entre ou sort de la pièce ? Selon les observations des chercheurs, lorsqu’un-e inconnu-e est présent-e, les chats sont plus mobiles, montrent plus de signes de comportements d’alerte, de vigilance… En bref, la confiance ne règne pas – alors qu’ils semblent « apaisés » lorsque leur maître-sse est à leurs côtés.
Nous ne pouvons donc pas affirmer de façon péremptoire que nos chats nous regardent avec des cœurs et des paillettes plein les yeux – mais en tout cas, ils semblent reconnaître notre présence et avoir assez « confiance » en nous pour ne pas adopter de comportements d’alerte spécifiques (en tout cas lorsque nous entretenons avec lui une relation de « bientraitance »).
Les animaux pourraient-ils contribuer à améliorer nos vies ?
Au-delà de la relation propriétaire-animal de compagnie, il semblerait que les animaux aient tout un tas d’effets positifs sur notre santé physique et psychologique, sur nos relations sociales…
Ainsi, Poresky (1996), après l’examen de 88 familles avec deux parents et des enfants de 3 à 6 ans, a montré qu’avoir un animal de compagnie avait un impact positif sur le développement des enfants. Sur ces 88 familles, la moitié possédait un chien ou un chat, l’autre moitié n’avait aucun animal de compagnie. L’observation des familles prenait appui sur deux angles : le premier analysait la perception des parents sur les compétences sociales, le développement intellectuel et moteur de leurs enfants, ainsi que la relation enfant-animal ; le second évaluait les enfants eux-mêmes (par des épreuves d’intelligence verbale, de perception et de capacité d’empathie). Visiblement, la présence d’un animal de compagnie aurait un impact positif sur les attitudes des enfants envers les animaux et les autres enfants… Plus le lien est fort entre l’enfant et son animal, plus l’enfant montrerait d’empathie envers les autres enfants.
Les animaux de compagnie permettraient également d’améliorer la santé et les relations sociales des personnes âgées. Par exemple, selon Ciccotti et Guéguen, une étude menée auprès d’Allemand-e-s et d’Australien-ne-s montrerait que les propriétaires de chats et de chiens utiliseraient moins les services de santé, rendraient moins souvent visite à leur médecin – a fortiori lorsque ces propriétaires sont des personnes âgées.
Au Canada, une étude longitudinale menée par Rayna (et al., 1999) rejoint les conclusions précédentes. Pendant un an, les chercheurs-ses ont questionné plusieurs fois des personnes âgées de plus 65 ans et ont tenté d’analyser si l’animal (et l’attachement à l’animal) pouvait influencer la santé physique et psychologique (en demandant par exemple aux personnes quel est leur « niveau » d’activités sociales, combien de personnes avaient-elles dans leur réseau, éprouvaient-elles parfois des sentiments de solitude, étaient-elles satisfaites de leurs rapports familiaux, amicaux, de leur travail, de leurs finances, de leur « santé perçue », etc.). Tout compte fait, il semblerait que les propriétaires d’animaux de compagnie soit en meilleure santé et auraient moins de difficultés à maintenir leur niveau d’activités sociales.
Ces observations se retrouvent aussi lorsque des expériences introduisent les visites d’un chien chez des personnes âgées hospitalisées : elles augmenteraient l’humeur positive, diminueraient les sentiments de dépression, de peur et d’anxiété. Finalement, ces visites animales permettraient de casser un cycle de solitude et de minimiser le retrait social.
Finalement, ces sujets peuvent sembler « anodins », mais de telles recherches ont une utilité réelle et très concrète : elles peuvent peut-être aider à améliorer les vies de personnes âgées, de personnes ayant besoin de présence, de personnes hospitalisées… Ou en tout cas, elles permettent d’analyser ou de vérifier si la présence d’un animal pourrait être positive ou négative dans ces situations. Pour donner d’autres types de recherches « utiles » (explicités par ailleurs dans l’ouvrage de Ciccotti et Guéguen), on sait par exemple qu’introduire des animaux dans le milieu carcéral aurait des effets positifs sur les détenus, que la présence d’un aquarium dans la salle d’attente du dentiste permettrait à certain-e-s d’entre nous de moins stresser, ou encore qu’un cheval, pourrait être un excellent auxiliaire thérapeutique pour des personnes handicapées, …
Et vous, quel rapport entretenez-vous avec vos animaux ? Avez-vous la sensation qu’ils vous rendent la vie plus douce ?
Pour aller plus loin :
- Une interview de Serge Ciccotti
- Un article de Nicolas Guéguen pour le magazine Cerveau&Psycho – Animaux : pourquoi nous font-ils du bien ?
- Pour celles et ceux qui souhaiteraient en savoir encore plus, l’ouvrage Pourquoi les gens ont-ils la même tête que leur chien est disponible ici – le livre, à destination du « grand public », est accessible et vulgarise pas mal d’études scientifiques.
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires
Et elle est mignonne parce que, si elle pourrait passer toute sa journée dehors, en général elle reste avec moi, le matin quand mon copain la fait rentrer (il se lève plus tôt) elle miaule pour venir avec moi dans la chambre, la journée quand je suis à la maison elle est sur la chaise à côté quand je suis sur l'ordi ou alors elle me suit un peu partout où je vais.
Et je suis persuadée qu'elle comprend beaucoup de choses quand je lui parle (elle même des fois elle me répond en miaulant -_- comme une fois où je l'avais entendue descendre des meubles de la cuisine en m'entendant alors qu'elle sait très bien qu'elle a pas le droit d'y monter, et où on aurait dit qu'elle essayait de se justifier ) et elle m'"obéit" assez souvent (ça reste un chat) quand je l'appelle x)
Quand j'étais petite, mon vieux mâle (qui avait deux ans de moins que moi) venait me consoler quand je pleurais, il venait se frotter contre moi en miaulant, c'était trop mignon :3
J'avais lu aussi que le fait d'avoir un animal avec des enfants en bas âge permettait aux enfants de développer un système immunitaire plus conséquent, ou plus performant (et je ne sais pas si c'est une coïncidence ou pas, mais mes cousins qui n'avaient pas d'animaux ont été souvent malades quand ils étaient petits (otites à répétition pour ma cousine notamment) alors que mon frère et moi qui avons eu notre chat à 2 et 6 ans n'avons eu aucun problème de santé majeur... >_>