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Tony Valente se lance dans le manga avec « Radiant » — Interview

Radiant est une nouvelle série manga publiée par l’éditeur Ankama, et signée Tony Valente (Les 4 princes de Ganahan, Hana Attori, Speed Angels). Elsa a pu l’interviewer !

Dans un univers d’heroic fantasy, des créatures dangereuses, appelées némésis, débarquent sans crier gare et ravagent tout sur leur passage. Les rares personnes qui ne meurent pas en croisant leur route se retrouvent victimes de déformations de toutes sortes.

Si la population les traite comme des pestiférés, ces « infectés » sont pourtant les seuls à pouvoir combattre les némesis. Parmi eux, Seth, un adolescent maladroit mais débordant d’énergie, qui brûle de remplir la mission qu’il s’est fixé : il veut trouver d’où viennent les créatures, et détruire cet endroit, pour que ses congénères ne soient plus jamais en danger.

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Un beau manga dénué de toute patte « franco-belge »

Si l’on ne prête pas attention au nom de l’auteur sur la couverture, impossible de deviner que Radiant n’est pas un pur shônen japonais. Tony Valente avait beau avoir jusqu’alors fait ses armes en bande dessinée franco-belge, il s’est complètement adapté à ce nouveau format, et aux codes propre au genre.

Graphiquement, c’est vraiment très beau et l’univers est un régal pour les yeux. L’histoire est captivante et riche en rebondissements, les dialogues pleins d’humour, et les personnages aussi délirants qu’attachants.

En lisant ce premier tome, on pense forcément à One Piece. Pas du tout parce que Radiant en serait une pâle copie, mais bien parce qu’on retrouve cette énergie complètement folle, ce rythme trépidant et cet univers immense qui promet de grandes aventures pour la suite.

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Radiant est, en résumé, un excellent shônen, drôle et plein de surprises, qui ravira tous les amateurs et amatrices du genre.

Tony Valente, l’interview

J’ai pu poser quelques questions à Tony Valente, à l’occasion de la Japan Expo.

Peux-tu te présenter, nous raconter ton parcours ?

Je suis auteur de bande dessinée. J’ai commencé chez Delcourt, en étant uniquement dessinateur sur mon premier album. J’ai fait une série de 4 tomes chez Delcourt, je partageais le scénario et j’ai fait la couleur aussi.

Puis je me suis lancé tout seul pour une série chez Soleil qui s’appelle Hana Attori. Ça ne s’est pas très bien passé, ça s’est arrêté en trois tomes. J’ai quand même persisté chez Soleil, avec une série où Didier Tarquin est scénariste. Je le fais en parallèle de ma quatrième série, Radiant, pour Ankama.

Comment résumerais-tu Radiant ?

C’est l’histoire d’un jeune homme, Seth, qui va essayer de trouver la source des forces du mal. Il y a des monstres qui tombent dans son univers, des némésis, et qui soit tuent les gens, soit les infectent. Les infectés ont ensuite la faculté de se battre contre eux, et il en fait partie.

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Le problème c’est que les gens rejettent les infectés autant que les monstres, parce qu’ils ont des déformations physiques ou mentales. Ces gens sont des sorciers qui, souvent malgré eux, se battent contre les monstres. Tout ça dans un univers très heroic fantasy, influencé par les jeux vidéos et le manga, enrobé d’une couche de conneries, pour résumer.

Comment est née l’idée de cette série ?

C’est un thème que j’avais développé pendant que je faisais Hana Attori

, ma première série en solo. J’abordais dans une intrigue secondaire le thème de l’exclusion. Il y avait un village, caché dans des bois, fait d’esclaves, de parias, d’handicapés, qui devaient lutter contre le pouvoir qui essayait de les faucher. Ça n’était pas l’intrigue principale, mais ça m’a tellement intéressé que depuis ça a fait son chemin.

Ça s’est énormément transformé, et ça a donné lieu à Radiant. Et autour de ce thème de l’exclusion, j’ai amené tous les éléments qui m’intéressaient. Beaucoup de blagues, beaucoup de boules de feu, beaucoup de personnages un peu loufoques. Je me suis servi des infections pour faire n’importe quoi parfois.

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Il y a des choses très sérieuses. Le héros a des cornes sur la tête, c’est presque normal. Mais il y en a qui peuvent avoir des nouilles à la place des poils. Il peut vraiment se passer n’importe quoi.

Comment s’est passé ton travail sur cette série ? As-tu créé l’univers, les personnages en amont ou au fur et à mesure ?

La plupart des personnages ont été créés en même temps que l’idée m’est venue. Ils ont été quelque peu transformés mais l’essentiel était là.

Par contre il y a des personnages qui sont apparus au moment du récit, et qui se sont imposés comme étant assez essentiels. La mère adoptive de Seth, qui est finalement très importante, est venue quasiment au moment de faire l’histoire. C’est un personnage de premier plan. Il y en a quelques-uns comme ça…

Mais sinon, je travaille en amont. En général, je construis des personnages en dehors de mes séries. C’est mon problème, j’aime bien faire des personnages, donc j’en dessine beaucoup, et de temps en temps je m’attache à l’un d’entre eux.

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C’est comme ça qu’est né Seth, le héros. Je l’ai inventé quand je faisais ma première série en fait. Il n’avait pas du tout la même tête, mais il a évolué au fur et à mesure pour donner le héros qu’il est maintenant. C’était il y a cinq ou six ans. Je ne savais même pas que j’allais en faire un projet, mais il m’a intéressé.

De temps en temps, dans mon histoire je sens qu’il y a la place pour un personnage que j’ai fait à côté, et qui m’intéresse. Il est là peut-être depuis deux ou trois ans, n’existe que dans un dessin, il bascule et il arrive là.

Qu’est-ce qui t’a donné envie de faire du manga ?

Le fait d’en lire, en premier lieu. J’ai commencé par faire de la bande dessinée, mais ce que j’aime le plus, c’est faire du manga. Puis finalement la frustration de faire des histoires trop courtes pour ma tête m’a vraiment poussé vers ce terrain-là.

Du coup j’espère que ça va bien se passer, parce que sinon je vais devoir rétrécir de nouveau mes histoires et me cantonner à des choses qui me frustrent un peu. Pour résumer, ce qui m’a poussé vers le manga, c’est un mélange entre une grosse envie depuis l’enfance et la frustration de ne pas avoir assez de place dans la BD classique.

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Est-ce que ça a été compliqué de passer au format manga, avec tout ce que ça implique ? Le petit format, le noir et blanc, tu as même repris le sens de lecture japonais…

Non. Je croyais. Ça a été un peu long au début pour se mettre sur ses rails. Parce que ça faisait très longtemps que je faisais ma propre couleur, et que je dessinais en fonction de la couleur. Donc le dessin en noir et blanc avait finalement très peu d’importance.

Je lis tellement de mangas depuis tellement longtemps, qu’au final c’est beaucoup plus naturel maintenant de faire ça. C’est aussi valable pour le sens de lecture japonais. Au début j’avais fait ça un peu pour le délire, parce que j’adore les mangas, les shônen classiques japonais. J’avais repris ça tout simplement parce que c’est la manière dont je le lis.

Et finalement ça me va très bien parce que j’arrive mieux à dessiner les personnages qui vont de droite à gauche, donc le sens naturel de lecture japonais.

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Quels outils utilises-tu pour dessiner Radiant ?

Du papier spécial qui s’appelle le papier Kent, déjà. C’est un papier japonais, justement. Je suis vraiment allez au bout. Comme je suis fasciné par les dessinateurs japonais, j’ai essayé plusieurs techniques utilisées par les auteurs que j’aime.

Et il se trouve que le meilleur matériel était utilisé par les auteurs que j’adore. De la plume, traditionnelle, avec de l’encre de Chine. Des plumes japonaises. J’ai essayé des marques américaines, européennes, japonaises. Ce sont les marques japonaises qui sont le mieux.

Et des feutres pour faire les décors. Je fais mes personnages avec les plumes, pour donner un côté vivant, parce qu’il y a des pleins, des déliés, il y a beaucoup de choses possibles avec la plume. Et les décors c’est strict et ça m’ennuie pas mal, donc je fais ça avec des feutres, ça va plus vite. Les gens ne s’extasient pas trop devant les décors, donc ça n’est pas un souci.

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Les mangakas ont un rythme de publication très rapide, imposé par la pré-publication, rendu possible grâce à leurs assistants. Pour ta part, combien de temps passes-tu sur un tome ?

Le premier m’a pris entre sept et huit mois. J’espère qu’il faudra moins de temps pour la suite, mais c’est clair que je ne peux pas avoir le rythme des Japonais. Le fait d’avoir des assistants, c’est essentiel. J’ai ma compagne qui m’aide pas mal dans le travail, mais ça reste des tâches assez limitées. Ça me permet d’aller assez vite, mais pas assez pour les concurrencer.

Sais-tu déjà en combien de tomes est prévu la série ?

On a un accord moral avec Ankama sur trois tomes, ce qui est déjà pas mal. On va essayer de se rendre compte si c’est viable ou si ça ne l’est pas. Si jamais ça l’était, j’aimerais beaucoup continuer, parce que mon histoire ne se cantonne pas à trois tomes. Ce serait juste un pivot dans l’histoire, qui deviendrait une fin ouverte si ça devait se terminer, mais qui serait l’amorce d’une saison 2 si ça continuait. Du coup, dans l’idéal, dix ou quinze tomes.

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Quelles sont tes principales influences pour cette histoire ?

Les mangas d’abord, puisque tout va dans le format et dans le sens des mangas japonais. One Piece surtout, qui est ma série favorite et qui est, paraît-il, la série favorite du monde entier puisque c’est ce qui marche le mieux.

Ensuite il y a eu pas mal de romans jeunesses, de la fantasy jeunesse, qui m’ont influencé pendant mon écriture. La principale étant L’Épouvanteur de Joseph Delaney, qui m’a amené sur le terrain de la sorcellerie. Lui c’est l’inverse, parce que ses héros sont des chasseurs de créatures en quelques sortes, mais les créatures étant aussi des sorciers.

Moi, mes héros sont des sorciers. Mais la lecture de ses bouquins m’a amené sur le terrain de la sorcellerie, m’a poussé à faire des recherches sur tout ça, et notamment à trouver un méchant fantastique dans l’Inquisition.

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Je me suis beaucoup intéressé à cette période, donc il y a aussi l’Histoire à proprement parler, celle de l’Europe, sur la chasse aux sorcières, qui m’a beaucoup aiguillé pour créer mon univers. Le grand méchant de mon histoire étant vraiment inspiré par un personnage historique, Torquemada.

Et puis en dehors de ça, visuellement, les jeux vidéos. Les jeux de rôles japonais : encore une fois je ne fais pas dans l’originalité.

Et je vais citer aussi Les trois Mousquetaires de Dumas que j’ai découvert pendant que je faisais Radiant. Grâce à la manière de raconter, l’élan qu’il y avait, la richesse des personnages, j’avais presque l’impression de lire un manga. Et ça m’a beaucoup influencé sur les rapports, les intrigues… Je pense l’utiliser pour la suite. Ça n’a rien à voir pour le coup, mais je suis obligé de le citer, ça m’a transcendé.

Un grand merci à Tony Valente !

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