Mardi 11 juillet, un groupe de scientifiques a désigné le lac Crawford, au Canada, comme site de référence mondial du commencement de l’Anthropocène.
Comment s’y sont-ils pris ? Après avoir étudié les sédiments stratifiés au fond de cette petite étendue d’eau, ils ont conclu que ceux-ci constituaient la meilleure preuve « qu’un nouveau chapitre de l’histoire de la Terre s’est ouvert, (…) caractérisé par l’impact de l’humanité sur la Terre », détaillent nos confrères de 20minutes.
L’entrée dans cette nouvelle ère géologique n’est pas officiellement reconnue : le groupe de travail doit encore obtenir l’approbation officielle la Commission internationale de stratigraphie (ICS) qui est la seule autorité habilitée à déterminer la subdivision des époques géologiques.
Que signifie l’anthropocène et que révèle-t-il de l’impact humain sur nos écosystèmes ? Éclairage.
Qu’est-ce que l’anthropocène ?
Microplastiques, traces d’essais nucléaires, cendres issues de la combustion du pétrole et du charbon… Nos activités humaines laissent des marques indélébiles sur nos sols et nos écosystèmes.
L’anthropocène (du grec « anthropos », humain) correspond à une ère géologique justement marquée par cette empreinte humaine dont l’ampleur a modifié – comprendre, mis en péril – l’environnement à une échelle globale. À tel point que l’impact anthropique rivalise avec celui de certaines grandes forces de la nature. :
Pour ces scientifiques, nous avons quitté l’holocène, c’est-à-dire la période tempérée qui a démarré il y a 12 000 ans, à la fin de la dernière glaciation et qui a permis le développement de l’espèce humaine. Car une rupture s’est produite : certains équilibres environnementaux et climatiques ont été rompus sous l’influence des activités humaines et sous l’influence des émissions de gaz à effet de serre bien sûr, mais aussi sous l’influence de certaines pollutions plastique, chimique, nucléaire, qui vont marquer la terre pour plusieurs millénaires, ainsi que des pressions exercées sur les ressources naturelles et la biodiversité.
FranceInfo, « Anthropocène : est-on entré dans un nouveau chapitre de l’histoire de la Terre ? », 12 juillet 2023
On doit ce terme au météorologue et chimiste de l’atmosphère Paul Josef Crutzen, prix Nobel de chimie de 1995, et aux travaux d’Eugene Stoermer, biologiste. Selon ces deux scientifiques, l’anthropocène aurait débuté à la fin du XVIIIᵉ siècle avec la révolution industrielle.
Pourquoi le lac Crawford a-t-il été désigné comme berceau de l’anthropocène ?
Malgré sa petite superficie (un kilomètre carré), le lac Crawford a été retenu car il concentre en son sein beaucoup de traces emblématiques des activités humaines.
Comme l’explique à nos confrères de Reporterre Andrew Cundy, professeur à la Chaire de radiochimie environnementale à l’université de Southampton et membre du groupe de recherche, 12 sites candidats étaient examinés.
Parmi les sédiments relevés, se trouvaient notamment « des concentrations de pollens qui témoignent de l’évolution de la végétation et des changements de températures, et même des retombées d’explosions liées aux essais nucléaires » révèle France Info.
Ces retombées radioactives seraient justement la preuve de ce changement d’ère :
Les règles de la Commission internationale de stratigraphie (ICU) exigent toutefois d’identifier un « marqueur primaire » synchrone pour marquer le changement de période qui soit détectable dans les archives géologiques presque partout sur la planète. Pour l’Anthropocène, le plutonium rejeté par les essais de bombes à hydrogène fournit cette « empreinte mondiale. »
20 minutes. « Le lac Crawford au Canada désigné comme référence de l’Anthropocène, toujours pas officialisée », 11 juillet 2023
En effet, la présence de plutonium dans les sols du lac Crawford, très rare dans la nature, est significative. C’est en tout cas ce que soutient le professeur Cundy, rappelant que sa « date d’apparition globale, 1952, correspond étroitement à la date de début de l’Anthropocène au milieu du XXe siècle ».
Que signifierait ce changement d’ère géologique ?
Comme le résume simplement le professeur Cundy au média Reporterre, « cela mettrait en évidence notre impact global sur la planète ».
Un impact que certains s’évertuent à nier, malgré les catastrophes tangibles qui se multiplient : les feux canadiens de ces dernières années, les canicules, la perte de biodiversité, les sécheresses, les inondations, la pollution des sols et des océans… Pour n’en citer que certaines.
L’anthropocène a une pertinence écologique et scientifique, abonde le professeur Cundy : « Cela montrerait que l’empreinte de nos activités peut être trouvée dans les matériaux terrestres récents qui s’accumulent des pôles aux tropiques. Cela montrerait aussi que nous avons eu un impact global suffisant pour changer la nature de l’enregistrement des roches de la Terre, détectable à l’échelle mondiale aujourd’hui, et probablement aussi dans le futur. »
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