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Quelqu’un d’autre (Tonino Benacquista)

Changer de vie. Devenir celui ou celle que l’on rêve d’être depuis toujours sans jamais oser concrétiser ses rêves, par peur de l’inconnu ou de l’échec. C’est le pari que se lancent Nicolas Gredzinski et Thierry Blin.
Tous deux ont laissé, jusqu’alors, leur vie se dérouler de façon linéaire et monotone sans jamais interférer concrètement dans leur propre existence. En se rencontrant, ils ont un déclic : et s’il n’était pas trop tard ? S’il était encore temps de prendre les commandes de sa vie à l’aube de ses quarante ans ?

Un match de tennis improvisé rapproche ces deux hommes que le destin a placé sur la même route. Les premiers sets sont gentillets et n’attirent pas foule, chacun joue pour le plaisir, sans niaque particulière ; puis les hommes vont se laisser prendre au jeu, montrer aux autres qui entourent à présent le terrain et suivent le match avec attention, ce dont ils sont capables. Se laisser prendre au jeu…
C’est ensuite, autour d’un symbolique verre de vodka, alors que Nicolas découvre l’alcool, que l’idée du pari est émise par Thierry : un RDV dans trois ans, dans le même bar, le même jour, à la même heure mais entre deux autres hommes : eux-mêmes mais transformés. Que vont devenir Thierry et Nicolas au terme de ces trente six mois ? Ne risquent-ils pas de se perdent en jouant avec ce qu’ils pensent dominer et contrôler ?

Deux antihéros 

Nicolas en a assez d’être lui-même. Petit employé d’une vaste entreprise, assujetti à un patron tout puissant, timide, n’osant pas prendre la parole en public et s’imposer, il va découvrir l’alcool et ses vertus libératrices. Pour le meilleur, ou pour le pire. Pour devenir un autre ou pour se trouver lui-même, sans le carcan dans lequel sa retenue l’avait enfermé.
Et il y a cette femme dont Nicolas ne sait rien si ce n’est un prénom impossible à vérifier, Loraine. Cette Loraine qui, comme son verre de vodka, lui devient peu à peu indispensable. Elle qui sans le savoir l’initie à l’alcoolisme mais aussi au bonheur de l’instant présent. Qu’adviendra-t-il de Nicolas d’ici trois ans?

Thierry veut lui aussi devenir quelqu’un d’autre. Il a lancé l’idée du pari, et a déjà cogité sur le sujet. Alors que Nicolas souffre de sa première gueule de bois, il est déjà en train de se transformer. Pour lui, le changement sera radical, tout est envisagé : changement de nom, de visage, de métier. Il sacrifiera désormais toute sa vie privée à sa reconversion professionnelle en détective privé. Pris sous l’aile d’un détective en pré-retraite, Thierry entreprend d’orchestrer la rupture avec son ancienne vie doucement mais sûrement. Tout pour échapper à celui qu’il a été pendant trop longtemps déjà. Mais vers quelle destination le mèneront ses métamorphoses ?

L’ambiguïté de l’identité

Se laissant prendre au jeu, plus ou moins consciemment, nos deux antihéros jouent à modifier leur identité. La question est de savoir s’ils peuvent véritablement changer ce qu’ils sont ou tout simplement en devenir la continuation en enfilant, par exemple, un des multiples costumes que nous fabriquons tous.

On retrouve au sein du duo Nicolas/Loraine la question de l’identité intrinsèque, que chacun porte en soi en dépit de ce que les papiers d’identité peuvent représenter dans une société où le statut et la classe sociale sont un pass en or pour bénéficier de la reconnaissance d’autrui.
Thierry, qui de son côté se reconvertit en détective, va endosser un rôle bien singulier : espionner des inconnus en tachant de les deviner pour mieux dévoiler leurs secrets.
Jusqu’où vont-ils aller ? Ne vont-ils pas se laisser prendre à leur propre piège ?

Quelqu’un d’autre est un roman assez troublant. En effet, qui n’a jamais souhaité changer de peau ? Etre moins ceci ou plus cela ?
En alliant humour et suspens, l’auteur nous prend par la main et, avec une écriture pour le moins agréable, nous mène sans mal aux dernières pages de ce roman haut en réflexion. De réelles pistes d’interrogations sur le libre arbitre et la construction identitaire de l’homme s’ouvrent à nous. Il ne nous reste plus qu’à nous y engager et à se demander : qui sommes nous ? Pouvons-nous véritablement changer de vie ? Devenir quelqu’un d’autre ?…


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Les Commentaires

5
Avatar de Morpheen
16 septembre 2008 à 04h09
Morpheen
Merci pour la parenthèse mais tu as le droit d'avoir ton avis pas de soucis
0
Voir les 5 commentaires

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