Ce n’est pas la première fois que TF1 aborde la transidentité. En 2017, la chaîne présentait Louis(e), l’histoire d’une femme trans qui refait surface auprès de son ex-épouse — laquelle ne l’a connue qu’avant sa transition — dans le but de retrouver une place auprès de ses enfants.
Aujourd’hui, il est encore question de famille.
L’histoire est simple : mal dans sa peau, Juju, 15 ans, confie à ses parents se « sentir fille ». L’annonce de sa transidentité et de son désir d’accéder à des bloqueurs de puberté va se confronter aux avis radicalement opposés de sa mère et de son père et va faire imploser la cellule familiale.
Avec Il est elle, diffusé ce 1er novembre sur TF1, c’est donc la question de la transidentité des ados qui est abordée — un thème qui a gagné en visibilité ces dernières années, à travers des fictions (Girl, Lola vers la mer), ou des documentaires (Petite Fille).
Là où on salue déjà Il est elle avant de l’avoir vu, c’est parce que son personnage principal est incarné par une actrice, Andréa Furet, qui se trouve être une femme trans. Et c’est suffisamment peu fréquent pour être souligné.
Longtemps, les productions se sont cachées derrière la difficulté à trouver des acteurs et actrices trans pour perpétuellement choisir des personnes cisgenres. Heureusement, des initiatives comme Representrans participe enfin à changer la donne.
Montrer au grand public l’enjeu des bloqueurs de puberté
À l’heure où la question des enfants et adolescents trans gagne en visibilité, à l’heure où l’Éducation nationale travaille à informer le personnel enseignant sur l’accueil des élèves trans, montrer une trajectoire comme celle du personnage central de Il est elle, Emma, est important — si tant est qu’on le fasse convenablement.
Récemment des psychologues et des médecins se sont évertués dans une tribune de L’Express à entretenir la panique morale autour d’une prétendue « inflation considérable de demandes de changement de sexe chez les enfants et plus particulièrement chez les adolescentes ». La tribune laisse entendre que des opérations chirurgicales seraient perpétrées sur ces enfants, qu’on leur administrerait des traitements hormonaux.
Ces peurs, le téléfilm les reprend… pour les contrer et les dédramatiser.
Il est elle aborde au contraire frontalement la question des bloqueurs de puberté et casse quelques idées reçues sur ce qu’ils sont (ou ne sont pas). Il permet de comprendre notamment que les bloqueurs de puberté n’équivalent pas à la prise d’un traitement hormonal : ils ne sont pas irréversibles mais permettent de mettre en pause la puberté et ses effets, afin que l’adolescent ou l’adolescente puisse envisager plus tard la prise d’un traitement hormonal, à partir de 16 ans et avec l’accord de ses parents.
Des poncifs et quelques bonnes intentions
Il est elle ne s’adresse pas en premier lieu aux jeunes trans – souvent bien informés sur la transidentité à l’instar du personnage d’Emma – qui pourront néanmoins trouver dans ce téléfilm une représentation rare incarnée par une actrice trans.
Le téléfilm représente plutôt une première porte d’entrée pour des proches d’enfants trans, des parents, une première étape de connaissance et de compréhension. En cela, il n’évite pas certains clichés et quelques rebondissements plus efficaces que subtils.
Oui, Il est elle y va avec de gros sabots — à commencer par son titre un peu lourdingue, qui met l’emphase sur le passage du masculin au féminin. En 2021, on aurait aimé que le brainstorming aille un peu plus loin que ce genre de raccourci.
Comme souvent dans des œuvres qui abordent la transidentité, on se focalisera principalement sur les réactions de l’entourage, notamment la détresse du père d’Emma, comme si le coming out de la jeune femme fracturait la famille. Comme souvent, on n’évitera pas non plus une scène d’outing violente (et plutôt inutile) où le personnage principal est confronté à des remarques transphobes.
Il est elle est loin d’être parfait, et il est probable que beaucoup de personnes trans elles-mêmes aient à redire sur cette représentation. Comme le souligne Representrans dans son analyse de Il est elle, le téléfilm est avant tout adressé à un public cisgenre et à ce titre, coche toutes les cases du cis gaze.
Il aura néanmoins ce mérite : celui de valoriser le soutien de la famille, à travers le personnage d’Odile Vuillemin, qui joue la mère d’Emma et qui va non seulement accepter son coming out mais aussi épauler et soutenir son enfant.
Enfin il montre aussi une ado trans aller à l’école, sortir, avoir un groupe de rock, flirter. Être une ado, en somme, avant d’être une ado trans.
Il est elle, le 1er novembre à 21h05 sur TF1
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Crédit photo : Manuelle Toussaint / TF1
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