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Quand les EVJF deviennent un enfer : « La moindre notif me donnait envie de fuir »

Si ces lectrices ont choisi de rester anonymes, c’est parce qu’elles ont une opinion très controversée à exprimer : être invitées à des EVJF, ça les saoule. Elles expriment pourquoi en quatre points.

Le 27 novembre 2021

Bien sûr que les enterrements de vie de jeune fille sont des moments heureux. On y célèbre l’amour, l’amitié, et les liens profonds qui les unissent. C’est aussi une belle occasion de se retrouver entre proches, de s’amuser et de créer des rencontres…

Mais, il y a un mais. Quatre lectrices ont décidé de l’exprimer.

« Mon portable qui vibrait toutes les trois secondes pendant trois mois, c’était insupportable. »

Quand il y en a un, ça va…

C’est Jeanne*, 29 ans, qui raconte la première :

« Quand j’ai dû organiser le premier enterrement de vie de jeune fille d’une de mes amies, j’étais aux anges : je n’ai compté ni mon temps, ni mon argent. On a passé un moment merveilleux, et c’est un des souvenirs que je chéris le plus.

Ça, c’est la partie de la vérité que je lui raconte. L’autre partie, c’est le stress pas possible, les dizaines d’appels après des journées de boulot crevantes, la pression de ne pas être à la hauteur, l’angoisse que les choses ne tournent pas comme prévu, le coût élevé — parce qu’on met une attente énorme sur ces évènements… »

L’année suivante, quand deux, puis trois de ses amies prévoient de se marier à la même période, Jeanne sait très bien ce qui l’attend, et cela la rend nerveuse par avance.

« On sait bien que c’est un moment spécial pour les futures mariées, et personne n’a envie de le gâcher. Mais il faut aussi se rendre compte que vous n’êtes très probablement pas la seule personne plus ou moins trentenaire à avoir décidé de se marier entre juin et septembre dans nos vies !

Vous avez déjà essayé d’organiser un week-end entre potes, à douze ? Essayez de faire ça trois fois dans la même saison, avec des gens qui ne se connaissent pas, et une occasion qui nécessite de faire des choses spéciales.

Au bout d’un moment, la moindre notification WhatsApp me donnait envie de fuir à l’autre bout du monde sans rien dire à personne. Moi, j’en ai marre des EVJF, et j’aimerais que l’on puisse l’entendre. »

La pression de l’EVJF plein de paillettes

Quand Paula*, 27 ans, a dû organiser l’enterrement de vie de jeune fille d’une de ses amies, sa première réaction a été l’angoisse :

« J’ai été victime de violences à l’école toute mon enfance, et je me sens très mal avec les groupes. Je me mets tout de suite en retrait, parce que ça me renvoie à des souvenirs très vieux et très mauvais…. J’étais donc terriblement angoissée par l’idée de ces EVJF. »

Finalement, elle est agréablement surprise par les excellents moments qu’elle passe à ces deux reprises. Elle y rencontre même plusieurs amies aujourd’hui très proches ! Mais certaines choses lui semblent difficiles à gérer. Elle reprend :

« L’organisation est horrible : il y a une pression énorme à devoir surprendre la mariée, à fabriquer de la spontanéité, à faire une surprise… Mais c’est tout sauf spontané pour les dix personnes qui passent des mois à organiser !

Et puis, il y a une pression à faire quelque chose d’exagéré. Surconsommer, sur-picoler, être surextatique devant la future mariée… On y perd en naturel. Pour moi, un week-end entre pote, ce n’est pas ça ! »

Elle mentionne aussi la charge financière de devoir parfois avancer des sommes astronomiques pour une dizaine de personnes… Dont certaines ont mis des mois à la rembourser.

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Amy Shamblen / Unsplash

Passer un week-end avec douze inconnues, quel bonheur

Marina a 28 ans et son expérience des EVJF est empreinte de malaise. Sur les 15 personnes invitées au week-end consacré à l’une de ses amies, toutes étaient très différentes et ont eu du mal à s’accorder.

« On ne se connaissait ni d’Eve, ni d’Adam, et on était pas du tout le même type de personnes — parfois, je me sentais un petit peu mal à l’aise. Il y a eu quelques engueulades sur les activités à faire, et la personne qui organisait tout se vexait très facilement…

Sur la fin, il y a eu un moment où on était toutes fatiguées, et où l’une des organisatrices de l’EVJF s’est mise à pleurer parce qu’elle avait peur que personne ne s’amuse. C’est dire la pression qu’elle s’était mise. Nous, ça nous a mises encore plus mal à l’aise. Ce n’est pas parce qu’on était claquées qu’on passait un mauvais week-end !

En plus, les organisatrices de l’EVJF étaient complètement contre ce genre d’évènement, et contre le mariage en général. Elles n’étaient pas du tout à l’aise d’organiser tout ça ! »

Elle précise :

« Moi, j’aime pas particulièrement le mariage, mais en plus, je trouve que le concept d’EVJF est beaucoup trop genré. Il y a un côté très normé derrière l’idée de “sa dernière soirée avant de se caser, il faut la passer entre fille ou entre garçons”.


Moi, si je devais organiser un EVJF, je crois que je ferais juste une soirée simple, en mixité, un truc qui plaise à la personne sans avoir besoin de respecter des codes de l’EVJF où il faut à tout prix faire des jeux, des activités, certains types de choses… »

Elle aborde un dernier point, que toutes les personnes interrogées ont elles aussi souligné avec une pointe de tremblements dans la voix :

« Et puis, mon portable qui vibrait toutes les trois secondes pendant trois mois, c’était insupportable. »

On ne peut tout simplement pas dire non à un EVJF

Candice*, 30 ans, est agacée par la pression sociale autour de ces évènements. Elle détaille :

« C’est terrible, la pression sur ce type d’évènement. Quelqu’un se marie, est heureux, a envie de partager son bonheur avec vous. Il y a un côté “élue” : c’est très flatteur, d’avoir été choisie pour passer un moment privilégié avec la future mariée !

Le problème, c’est qu’on a absolument pas le choix : personnellement, je me suis retrouvée catapultée dans des enterrements de vie de jeune fille de personnes que je connaissais à peine, sans avoir la possibilité de décliner poliment… Je n’avais ni le temps, ni les moyens financiers de m’investir dans ces évènements. Je n’étais pas non plus à l’aise, à l’idée de faire un hammam avec une dizaine d’inconnues, de faire des choses qui ne me ressemblaient pas du tout..

Mais en vérité, ce qu’on veut dans ces moments-là n’importe pas. Personne ne veut dire non ou gâcher le moment, qui est aussi censé être un préambule au mariage ! On se dit qu’il faut faire plaisir à la future mariée à tout prix.

Du coup, j’ai dit oui, j’ai serré les dents… Et ça a créé une forme de distance entre la future mariée et moi, parce que je me sentais prise en otage. Alors que le but, à la base, c’était de nous rapprocher. »

Jeanne, Candice, Marina et Paula concluent toutes sur le fait qu’elles ont tout de même passé des bons moments, lors de ces occasions certaines y ont fait des rencontres, d’autres ont apprécié les activités, ou simplement pris plaisir à voir une amie être contente.

Mais leur constat est clair : pour elles, en matière d’EVJF, la simplicité est la meilleure des recettes pour passer un bon moment… Et s’éviter de faire des crises de panique devant des devis pour des limousines.

À lire aussi : Cinq conseils pour organiser un enterrement de vie de jeune fille de folie !

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Les Commentaires

57
Avatar de Lia_Stilton
24 juillet 2023 à 17h07
Lia_Stilton
@Lia_Stilton C'est quelque chose d'assez générationnel puisque pour mes parents et grand-parents aussi les EVJF et EVJG, et toute la "pression" autour qu'il y a désormais, c'est quelque chose qui ne se faisait pas du tout de leur temps et qui paraît un peu lunaire (et à moi aussi, d'ailleurs).
Si, au départ, le côté "fête de pré-mariage" se retrouve dans beaucoup de cultures (par ex en Asie du Sud-Est avec des célébrations la veille ou avant-veille de la cérémonie), le système d' "enterrement de vie de célibataire" largement en amont du mariage s'est popularisé dans les pays anglo-saxons dans les années 70. Et puis, via le soft power américain, ça a fini par arriver en France.
On voit d'ailleurs assez bien à quel point ça infuse dans notre société avec les "wedding cake", "wedding planner" (et ensuite, pour plus tard, les "baby showers", termes qui ne sont même plus traduits.
Le côté non-mixte de la célébration vient du fait qu'aux origines du phénomène, seuls les hommes faisaient une célébration entre eux puisqu'il y avait souvent un passage par une maison-close pour dépuceler le futur marié.
Martine Segalen, prof émérite à Paris X- Nanterre et ethnologue, a écrit sur ces "rites contemporains" et notamment sur les "nouveaux" rituels de mariage :
D'accord, merci beaucoup c'est super intéressant !
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