Un des trucs que je préfère, dans la vie, c’est les premières fois. Je trouve ça hyper excitant de me dire que, quel que soit l’âge que j’ai, y aura toujours un truc que j’expérimenterai.
À des degrés d’importance et de joie différents, on vit presque quotidiennement des premières fois : la première fois qu’on reçoit son salaire, le premier os cassé, le premier découvert, la première embauche, la première gastro, la première fois qu’on a un coup de foudre, le premier proche qui décède… Y en a plein. Et y en aura encore plein même quand on sera si vieilles qu’on confondra nos visages avec une chemise roulée en boule depuis dix jours.
Peut-être que tu m’en voudras, mais cet article ne parlera pas du premier rapport sexuel. C’est vieux et je regardais la télé en même temps (oui, bonjour, Sophie, cliché humain, enchantée), donc à part le soulagement de l’avoir fait et les jambes qui tremblaient, je me souviens pas de beaucoup de choses bien agréables. Et puis c’est clairement un truc qui devient rarement décevant avec le temps, bien au contraire (bien mais bien bieeeeen au contraire). Fête dans le slip et joie du cerveau.
Non, en fait, je voudrais qu’on parle ensemble des premiers petits trucs, qui font faire des vrilles de bonheur dans le coeur et qui, par la suite, deviennent un peu… Décevants. Enfin, c’est moins bien quoi. Un peu comme si ça avait, d’une façon ou d’une autre, mis la barre trop haut.
Je voudrais que la vie soit douce comme la première bouchée d’un hot dog.
La première gorgée du premier verre de la soirée
Que tu boives du Coca, de la bière ou un cocktail avec ou sans alcool, c’est toujours la même chose : la première gorgée que tu t’envoies dans le gosier, après une journée à bosser sur tes cours ou à bosser tout court, est… magique. Non seulement elle a un véritable pouvoir désaltérant et te fait frétiller le palais : elle sonne (ou plutôt « goûte ») surtout comme des retrouvailles avec la détente.
Elle dit plein de choses, cette première gorgée. Elle te dit « Bienvenue dans ton temps libre. À ta gauche tu trouveras des blagues nulles, à ta droite tes livres préférés et partout autour de toi, beaucoup de glande et des potes. Demain/Lundi matin faudra que tu me quittes pour être studieuse à nouveau, et c’est bien aussi, parce qu’on s’équilibre vachement bien, la vie active et moi. En attendant, détends-toi et rappelle-toi que je t’aime ». À peu près, quoi.
Mais dès la deuxième, c’est plus pareil. Les papilles frétillent moins fort, le coeur y est moins. T’es toujours contente d’être en week-end, ou libre pour la soirée, mais y a un peu moins de magie. En tout cas la sensation de redécouverte n’est plus là, je trouve.
Mais c’est pas bien grave parce qu’elle reviendra à la prochaine soirée, et ça, c’est cool !
(Et pour une meilleure description de la première gorgée de bière, t’as aussi le recueil de nouvelles de Philippe Delerm.)
La première bouchée d’un plat
La satiété est un drame. Parfois, je voudrais être fournie avec un petit interrupteur « jaiplusfaim », pour pouvoir vivre les repas de famille sans m’écrouler sur la table de douleur stomacale. Parce que finalement, c’est toujours la même routine, pour plein de gens :
- tu te mets à table, heureuse d’être entourée de tes proches
- tu lorgnes sur les entrées qui arrivent
- tu te demandes de quoi sera faite la suite du repas et salives à l’avance
- sauf qu’une fois l’entrée finie, tu commences à ne plus avoir le ventre qui gronde
- mais comme t’as encore un peu faim, tu manges du pain
- du coup comme tu manges du pain t’es à satiété quand le plat arrive
- mais comme C’EST BON à s’en taper la fesse par terre, tu finis tout et tu sais aussi que tu prendras probablement du fromage et du dessert
- ce faisant ton ventre a triplé de volume et il est désormais tout dur
- éventuellement, deux heures après, soit tu accouches d’un alien par les parois abdominales, soit d’un bébétron par l’anus.
À partir du moment où tu es rassasiée, deux choix s’offrent alors à toi : soit tu finis ton assiette malgré tout, même si c’est douloureux, même si après, tu seras écoeurée pendant au moins dix minutes, soit tu ne la termines pas, mettant un terme prématuré à ce plaisir énorme qu’est le bon repas.
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J’ai toujours pas trouvé la bonne solution. Tout ce que je sais, c’est que je ne sais rien, et que rien ne vaut la première bouchée d’un plat délicieux.
En fait si, je l’ai, la solution idéale : ce serait de ne se nourrir que des premières bouchées de plats délicieux ! Mais vu qu’il faut environ 30 ou 40 bouchées pour ne plus avoir faim, ça reviendrait vachement cher, cette affaire…
La première écoute d’une chanson que t’aimes
Mise en situation : tu es chez un ami, il a mis une playlist de ses chansons préférées, quand soudain, la révélation. Un morceau qui t’était jusqu’alors inconnu te retourne le bide. Tu l’aimes. Coup de coeur musical foudroyant. Tu te le procures et l’écoutes en boucle le soir même. Le lendemain aussi. Voire le surlendemain.
Et puis à un moment, le feu s’éteint, la passion n’est plus. Tu connais désormais cette chanson un peu trop pour pouvoir continuer à n’écouter qu’elle ; elle devient un peu plus fade, un peu moins belle, et à moins de retomber amoureuse d’un autre morceau très vite, tu te retrouves un peu désemparée, privée de cette joie profonde, ne sachant pas quoi écouter.
L’avantage, c’est que si tu restes suffisamment longtemps sans la ré-entendre, elle te fera à nouveau un effet dingue quand tu te la repasseras. Il sera peut-être même amplifié par les souvenirs qu’elle t’évoquera, si t’as eu la chance de vivre un truc sympa au moment où tu la découvrais !
Le premier devoir post-rentrée
Nous sommes le 9 octobre, soit environ un mois après la rentrée. Tu as peut-être vécu il y a quelques jours le truc dont je vais te parler : le premier devoir maison.
Personnellement, quand j’étais encore étudiante, lycéenne voire collégienne, j’avais beau savoir que ça allait vite passer, je me laissais toujours porter par la joie des premières semaines. Cette fois-ci, j’en étais persuadée : j’allais cartonner. J’allais noter tous mes trucs à faire dans mon agenda, dont je prendrais soin (pas comme l’année dernière où j’avais renversée mon jus d’orange dans mon sac), j’allais relire mes leçons tous les soirs (et souligner les mots importants en rouge), et je ferai mes devoirs à l’avance (pas comme en 4ème où je les faisais la veille à 2h du matin, planquée sous ma couette pour pas que mes parents grillent que j’étais pas couchée).
Alors quand on nous donnait le premier DM (pour devoir maison), j’étais trop contente ! J’avais vraiment, vraiment hâte de le faire, et de le rendre. Généralement, à cette première salve d’exercices, je cartonnais. Toute la classe cartonnait. Et puis il suffisait d’attendre le mois d’octobre pour voir les notes chuter, sous le regard déçu mais habitué de nos profs…
Parce qu’après deux mois de vacances, un premier DM, ça faisait vachement plaisir, mais ça nous aurait bien suffi.
Le premier « je t’aime »
Quand on se met en couple et qu’on tombe amoureux, les premières fois sont toutes magiques : le premier baiser, le premier coït, le premier réveil, le premier repas ensemble, la première nuit passée à discuter, le premier fou rire, le premier « Eh ! Tire sur mon doigt » éventuellement… Tous ces éléments m’ont toujours semblé géniaux, tant que les sentiments étaient encore là. Tous, sauf un : le fameux « je t’aime ».
Autant les autres petits moments du couple sont restés dans mon coeur totalement grisants, autant les « je t’aime » qui suivent le premier n’ont plus du tout la même saveur. Le premier, je sais pas, on l’attend pas vraiment… On l’espère, mais on sait pas quand il arrivera, s’il arrive. Il tombe comme un cheveu sur la soupe, mais le plus joli cheveu sur la plus jolie soupe. Ça fait s’emballer tout ce qui peut s’emballer dans le corps et on ne touche plus vraiment terre. Et le mieux, c’est que ça marche quand on l’entend, mais aussi quand on le dit !
Peut-être qu’il y a qu’à moi que ça fait ça, mais j’ai toujours trouvé les suivants pas si bien. Un peu plus mécaniques, un peu moins surprenants. Peut-être que ce qu’il me manque, dans les « je t’aime » qui suivent, c’est la légère appréhension dans la voix de mes partenaires et dans la mienne, quand ils le disaient mais ne savaient pas si je pensais pareil. Peut-être que dans ma tête, entendre « je t’aime », c’est la fin de la pente ascendante des sentiments et le début de la fin. Si c’est ça, j’suis con, j’ai que des exemples contraires autour de moi !
En tout cas, si c’est une simple question d’appréhension dans la voix, j’ai qu’à m’arranger pour faire continuellement peur à mes partenaires, genre en leur balançant des cafards dans le slip une fois toutes les heures.
Et toi, quels sont « les premiers » qui te semblent un peu moins bien ensuite ?
Écoutez l’Apéro des Daronnes, l’émission de Madmoizelle qui veut faire tomber les tabous autour de la parentalité.
Les Commentaires
La première bouffée de cigarette quand t'arrive en soirée.
La première fois que tu fais l'amour avec un nouveau partenaire.